Espagne :
l’affrontement de deux nationalismes
Dimanche 1er
octobre, malgré les tentatives du gouvernement Rajoy d’empêcher la tenue du
référendum en Catalogne, la participation a été de 42 %, avec 90 % de oui à
l’indépendance. Le chiffre témoigne du large écho que les idées
indépendantistes, même minoritaires, rencontrent en Catalogne. La grève
générale et les manifestations du 3 octobre l’ont confirmé.
Depuis le 1er
octobre, la vie politique est marquée par une série de tensions et de conflits
en Catalogne. On les retrouve dans le reste de l’Espagne, où les manœuvres des
dirigeants se multiplient pour tenter de trouver une issue politique à la
crise.
Certains en Catalogne, qui
se situent à gauche voire qui se disent anticapitalistes, se félicitent du
résultat, en expliquant que le renforcement du courant nationaliste catalan est
positif. En fait, les deux nationalismes se confortent l’un l’autre et ce renforcement
les rendra plus forts contre leur classe ouvrière. En revanche, c’est cette
dernière qui se retrouve du même coup affaiblie, dans la mesure où elle se
place à la remorque de dirigeants au service de la bourgeoisie, certes rivaux,
mais aussi antiouvriers l’un que l’autre.
Nous publions ci-après
l’éditorial de nos camarades de Voz Obrera (Voix ouvrière, UCI-Espagne) écrit
au soir du 1er octobre.
Le 1er octobre, en Catalogne, des
milliers de personnes se sont exprimées : en manifestant pour le référendum, en
essayant de voter ou en votant. La violence policière organisée par le
gouvernement de Rajoy ne peut réduire au silence la mobilisation de ces
milliers de gens qui ont exigé de pouvoir voter sur la question de
l’indépendance. Cette réaction disproportionnée face à une consultation qui,
certes, ne comportait sans doute pas toutes les garanties démocratiques du
point de vue de larges couches de la population catalane, montre une fois de
plus le visage brutal du gouvernement du Parti populaire, corrompu et
répressif.
Pour couronner sa politique de
coupes budgétaires, ses attaques contre les conditions de vie et les droits de
la population laborieuse, le vol permanent organisé au bénéfice de la
bourgeoisie, ce gouvernement s’en prend à la liberté publique la plus
élémentaire : celle d’exprimer ses idées.
L’intensité de la répression
policière qu’on a pu voir en Catalogne dimanche 1er octobre montre de quoi les
dirigeants bourgeois sont capables quand il s’agit de s’en prendre aux droits
de la population. C’est la même violence à laquelle se heurtent les
travailleurs lorsqu’ils tentent de se défendre contre le patronat et ses
politiciens.
Devant ces agissements, nous ne
pouvons qu’évoquer le dicton « Ne demande pas pour qui sonne le glas : il sonne
toujours pour toi ». En effet les mobilisations de la classe ouvrière contre
les coupes dans les budgets sociaux, contre les privatisations ou pour défendre
les retraites, etc., sont bien souvent réprimées avec cette même violence,
voire davantage.
Le Parti populaire, secondé par
Ciudadanos et le PSOE (Parti socialiste ouvrier d’Espagne), parle de
démocratie, d’État de droit et d’égalité : c’est un pur mensonge. Entre leurs
mains, le système judiciaire, le Parlement, les médias avec leurs journalistes
ainsi que les politiques sont mobilisés pour dissimuler la corruption et les
coups portés aux travailleurs. Tout cela encourage l’extrême droite qui a
commencé à descendre dans la rue, arborant le drapeau d’une monarchie corrompue
qui roule pour la bourgeoisie voleuse.
Dans ce conflit catalan, au
simple droit démocratique qu’ont des millions de personnes de décider de leur
avenir par le vote, ils opposent une légalité douteuse, interprétée dans le
sens qui leur convient le plus. Quand on sait que la Constitution a été
modifiée pour rendre prioritaire le paiement de la dette publique aux banques…
Mais n’oublions pas que, au
premier rang des illusionnistes qui font profession de tromper les classes
populaires du pays tout en se réservant les postes dans les conseils
d’administration des grandes banques et des entreprises, on trouve, justement,
ces politiciens qui ont la bouche toute pleine de proclamations
indépendantistes : les Mas, ex-chef du gouvernement régional catalan,
Puigdemont, son successeur, du même parti de droite, Junqueras, vice-président
du gouvernement catalan, de gauche, Forcadell, présidente de l’assemblée de
Catalogne, Pujol, famille de politiciens catalans notoirement corrompus… qui
n’ont cessé de s’en prendre aux classes populaires de Catalogne et aiguisent
aujourd’hui un conflit nationaliste bien commode pour cacher l’exploitation
capitaliste.
Nous, les travailleuses et
travailleurs de toute l’Espagne, ne pouvons pas tomber dans les clichés contre
les Catalans, les Andalous, les Castillans, les Galiciens… car ce serait nous
laisser affaiblir. Nous ne pouvons pas tomber dans ce piège qui consiste à nous
diviser pour que la bourgeoisie règne.
Il faut lutter pour nos droits et
nos intérêts de classe. Un changement de nationalité, l’indépendance d’un territoire,
ne changent rien à l’exploitation, à la précarité ou aux inégalités qui
s’accroissent. Notre ennemi c’est le capitalisme, c’est la bourgeoisie,
espagnole et catalane, et seule la classe ouvrière a la possibilité de résoudre
ce conflit social par une lutte unie contre le capital et ses gouvernements, où
qu’ils soient.
Voz OBRERA
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