À propos de la disparition des gerbes
de fleurs devant la stèle dédiée au jeune Rino Della Negra fusillé par l’armée
allemande le 21 février 1944, nous avons écrit une brève ces jours derniers.
Ci-dessous, un complément, celui d’un article du journal Lutte de classe de fin février 1944 édité par le groupe trotskyste
dont Lutte ouvrière se réclame. Cet article y affirmait sa solidarité avec les
militants fusillés, mais indiquait quelle voie politique les jeunes qui
voulaient s’engager devait prendre. Celle de la transformation de la guerre
impérialiste en guerre civile menée par les travailleurs contre le capital,
pour les États-Unis socialistes d’Europe, pour le combat internationaliste,
pour la IVème Internationale.
Défense
des terroristes
Vingt-quatre
« terroristes » sélectionnés viennent d’être livrés à la publicité par la
Gestapo, pour dégoûter de l’armée clandestine, qui lutte contre l’impérialisme
allemand, la « bonne société » et les petits bourgeois conformistes.
Regardez-les,
disent les scribes de la Gestapo, ces faces « rusées et cruelles » de Juifs, de
Polonais, d’Italiens, d’Espagnols communistes : ces gens prétendent juger du
destin de la France ! Certes, d’après les prostitués de la presse bourgeoise,
ce sont les Doriot et les Goering, aux faces bouffies, et tous les engraissés
du régime de terreur bourgeois qui doivent décider du sort de la France...
Regardons-les
bien, travailleurs : ces visages que le photographe et les commentaires des
affiches veulent nous empêcher de voir sont des visages d’opprimés, des visages
de travailleurs : ils sont notre propre visage. Comment ces têtes d’opprimés et
d’exploités de plusieurs pays, qui luttent à mort contre le régime capitaliste
d’exploitation et de misère, ne feraient-elles pas écumer de rage les bourgeois
gavés au marché noir et vautrés dans les bras de prostituées qu’ils
entretiennent avec le sang et la sueur des ouvriers ?
Regardons-les
bien, camarades, ces têtes énergiques de jeunes qui bravent à leur « procès »
les canailles galonnées chargées de les faire fusiller : leur courage doit
servir d’exemple à tous les jeunes, à notre époque de guerres impérialistes et
de guerres civiles.
« Ils ont des dizaines de crimes
sur la conscience »,
profèrent leurs bourreaux, experts dans l’assassinat de milliers d’hommes en un
seul jour, en une seule bataille… «
Ils ont suivi l’école du crime », clament les professeurs qui enseignent
l’« art » de la tuerie à des milliers de jeunes de 16 ans arrachés à leurs
familles contre leur gré… « Ils ne
sont pas la France », affirment les tortionnaires du peuple français qui
n’ont pas assez de leur Milice, de leur police, de leur Garde mobile, des
bandes fascistes et des troupes d’occupation spéciales pour venir à bout des
dizaines de milliers de réfractaires à la déportation et au travail pour la
guerre impérialiste, et qui se gardent bien de publier les listes des jeunes
gens qu’ils abattent par dizaines tous les jours.
« Ce sont des bandits », écrivent les journaux à solde, en exposant
certains cas particulièrement suspects. Mais si l’activité de véritables
bandits, parmi lesquels il ne faut pas oublier des bandits de la Milice, de
Doriot et de Déat, se poursuit impunément, n’est-ce pas là le résultat de
l’anarchie croissante dans laquelle le capitalisme et la guerre ont jeté la
société ?
La
classe ouvrière est résolument pour ceux qui ont pris les armes contre les
bourreaux français et allemands qui martyrisent les peuples ; elle accueille
avec mépris les manœuvres de diversion de la bourgeoisie. Mais la classe
ouvrière est inquiète ; elle ne comprend pas pourquoi des militants qui
autrefois combattaient sans compromis la bourgeoisie de tous les pays, mènent
actuellement leur lutte sous le drapeau tricolore et au bénéfice des armées de
Washington, de Londres et d’Alger. Les ouvriers savent qu’ils n’ont rien à
attendre d’une victoire d’armées capitalistes qui ne feraient que relever les
armées allemandes dans leur rôle de gardes-chiourme pour maintenir le
capitalisme. Ils savent que Roosevelt en Amérique et Churchill en Angleterre
prennent contre la classe ouvrière les mêmes mesures que Hitler en Allemagne.
Le
prolétariat cherche des militants et un parti qui luttent directement pour ses
intérêts, pour son relèvement économique et culturel, pour ses conquêtes de
juin 1936, conquêtes qui sont également odieuses pour tout gouvernement
capitaliste, totalitaire ou parlementaire, et qui rencontreraient la même
résistance de sa part.
Servir
la classe ouvrière, c’est lutter pour les États-Unis socialistes d’Europe, pour
la transformation de la guerre impérialiste en guerre civile, pour le
socialisme. Lutter pour le triomphe de soi-disant démocraties sur le fascisme,
c’est renouveler la trahison de 1914, quand les partis socialistes de l’Entente
se mirent du côté de leur bourgeoisie sous prétexte de vaincre le militarisme.
De
même que la grande majorité des ouvriers socialistes comprirent la trahison de
leurs chefs et passèrent à la IIIe Internationale de Lénine et de Trotsky pour
accomplir leur devoir de classe, de même la grande majorité des ouvriers
communistes doit cesser de s’accrocher aux restes pourris de ce qui fut
autrefois la IIIe Internationale pour lutter avec les militants de la IVe
Internationale, parti mondial de la révolution socialiste.
Les
militants combattants du PC restés fidèles à leur classe doivent se convaincre
que le réveil de la classe ouvrière, par l’activité croissante de ses éléments
les plus avancés et l’assaut de celle-ci contre le régime capitaliste, n’ont
rien de commun avec la lutte sous le commandement des officiers réactionnaires
de De Gaulle.
La
IVe Internationale appelle les meilleurs militants de la classe ouvrière à
serrer leurs rangs autour du drapeau rouge communiste, qui triomphera envers et
contre tous de la barbarie capitaliste et de la guerre !
Lutte de classe Février 1944