PCF :
lutte des places à gauche
12 Avril 2023
Le PCF a tenu son 39e
congrès du 7 au 10 avril à Marseille. Fabien Roussel, réélu à sa tête, s’est
fait remarquer en déclarant que « la Nupes est dépassée » et qu’il faut
rassembler la gauche jusqu’à Bernard Cazeneuve, l’ex-Premier ministre de
Hollande.
Il n’y a pas à s’étonner de la
main tendue à un politicien qui a refusé l’alignement du PS derrière la Nupes
initiée par Mélenchon et qui se démarque du spectacle radical joué par les
députés LFI au Parlement.
D’un côté, même si ce n’est guère
que par son nom, le Parti communiste français reste associé à la lutte des
classes et à la contestation du capitalisme. Malgré ses déboires électoraux
successifs et la perte des municipalités qu’il a dirigées pendant des
décennies, il conserve un réseau militant dans certains quartiers populaires et
parmi les travailleurs, un réseau que n’ont pas les autres partis de la gauche
gouvernementale. Il continue d’attirer à lui des femmes et des hommes, y
compris des jeunes, pour qui « la lutte des classes est toujours une
réalité », pour reprendre les termes d’un sondage qu’il a commandé.
Mais, de l’autre côté, la
politique des dirigeants du PCF, depuis des décennies – en fait depuis les
années 1930, où il a cessé d’être un parti révolutionnaire pour devenir un
gardien de l’ordre social –, a toujours consisté à apporter leur soutien à un
politicien bourgeois présentable en vue d’obtenir des ministères. Blum, De
Gaulle, Mitterrand, Jospin : la liste est longue et le spectre politique
très large. Quand le PCF avait une influence presque hégémonique dans la classe
ouvrière, sa capacité à encadrer les travailleurs était le principal argument
de ses dirigeants pour monnayer des postes de ministres. Leur participation au
pouvoir s’est accompagnée de leur complicité dans les coups portés aux
travailleurs, comme sous Mitterrand qui a mis en œuvre le blocage des salaires
et laissé supprimer des centaines de milliers d’emplois, puis sous Jospin qui a
privatisé en masse. Cette politique a fait chuter les voix du PCF, partir ses
militants et baisser son influence, sans que ses dirigeants changent vraiment
de politique.
Quand l’ex-sénateur Mélenchon a
rompu avec le PS, les dirigeants du PCF, sous l’égide de Pierre Laurent, l’ont
aidé à créer le Front de gauche, lancé lors des élections européennes de 2009.
En 2017 après la création de La France insoumise (LFI), ils ont mis le
dévouement de leurs militants au service de sa campagne présidentielle. Mais, à
trop suivre Mélenchon, le PCF risquait de disparaître. En 2020, pour conserver
des municipalités, il avait besoin d’alliances avec le PS. En 2022, pour
sauvegarder l’existence indépendante de son appareil, Fabien Roussel a choisi
de se présenter à la présidentielle. Puis, pour faire réélire ses députés, il a
pris part à la Nupes, l’alliance électorale proposée par LFI pour les élections
législatives de juin 2022. Aujourd’hui, pour ne pas tout parier sur l’alliance
avec LFI, Fabien Roussel tend la main aux dissidents du PS, hostiles à Olivier
Faure et à la Nupes.
Sur le fond, tous ces politiciens
sont bonnet blanc et blanc bonnet, selon une vieille formule du PCF. Sur le
terrain du nationalisme ou du protectionnisme, les différences entre Roussel,
Mélenchon ou Ruffin sont indiscernables. Sur le terrain de la sécurité,
Roussel, qui est allé manifester derrière la police, aux côtés de Darmanin et
Bardella en mai 2021, doit apprécier Cazeneuve, ancien ministre de l’Intérieur.
Depuis des années, la politique
du PCF se résume ainsi à ses tentatives de sauvegarder ses positions
électorales face aux pressions de ses alliés, tout en se présentant toujours
comme candidat à être un parti de gouvernement. Cela signifie en tout cas être
« toujours prêt » à faire passer sous la table les revendications des
travailleurs, comme on l’a vu quand le PCF a eu des ministres sous Mitterrand
comme sous Jospin.
Ce n’est pas au PCF, pas plus
dans sa version Roussel que dans les précédentes, que les militants ouvriers et
les jeunes, attirés par le langage « lutte de classe », la référence
au communisme et l’envie de combattre le capitalisme, trouveront une réponse à
leurs aspirations.
Xavier
LACHAU (Lutte ouvrière n°2854)