État
palestinien : une reconnaissance aux allures d’enterrement
22
/09/2025
Ce 22
septembre à l’ONU, Macron a officiellement reconnu l’existence d’un État
palestinien. C’est un geste symbolique car Macron sait qu'il n'a aucun poids
sur la politique des dirigeants israéliens et américains, qui s’y opposent. Et
il sait que cela n'arrêtera même pas la main du bourreau.
Cette
reconnaissance provoque la colère de Netanyahou et l’hostilité de la droite et
de l’extrême droite françaises. À l’inverse, elle est soutenue par beaucoup de
ceux que la politique meurtrière d’annexion d’Israël révolte.
Mais
cette reconnaissance est aussi tardive qu’hypocrite. Il aura fallu au moins 65
000 Gazaouis tués, 163 000 blessés, un génocide et une famine pour que
Macron change de discours ! Il reconnaît un État palestinien quand Gaza n’est
plus qu’un champ de ruines, et que Netanyahou prépare l’annexion totale de la
Cisjordanie.
Macron
se moque du sort des Palestiniens. En rééquilibrant sa politique et en
reprenant la prétendue « politique arabe » de la France, Macron pense à
renforcer l’alliance avec l’Arabie saoudite et les Émirats et aux retombées
pour les capitalistes français au Liban, en Syrie et ailleurs dans la région.
Il pense à Dassault et au groupe de transport maritime CMA CGM. Il agit en
dirigeant cynique d’une puissance impérialiste qui fait ses comptes, tout comme
ses lointains prédécesseurs qui ont partagé avec les Britanniques cette région
stratégique qui regorge de pétrole et qui ont monté les peuples les uns contre
les autres.
Même
quand il prétend agir par solidarité, Macron dicte ses conditions. En échange
de la reconnaissance, Mahmoud Abbas, le président en titre de l’Autorité
palestinienne, a dû s’engager à désarmer le Hamas et à l’écarter de toute
gouvernance future. Autrement dit, Macron est prêt à reconnaître la Palestine,
mais au préalable, les dirigeants Palestiniens doivent montrer patte blanche et
se soumettre !
Le seul
rôle que les dirigeants de l’impérialisme seraient prêts à laisser aux chefs
d’un hypothétique État palestinien est celui de gardiens d’une prison à ciel
ouvert.
C’est
le rôle qu’a joué l’Autorité palestinienne, mise en place lors des accords
d’Oslo en 1993 pour endiguer le soulèvement de la jeunesse palestinienne. Cet
embryon d’appareil d’État était chargé d’administrer des territoires séparés
par des check-points et des murs, soumis à l’autorité militaire d’Israël,
dépendants de l’aide internationale. Impuissants, corrompus et chargés de
maintenir un ordre injuste, les chefs de l’Autorité palestinienne ne pouvaient
que se déconsidérer. Ce discrédit a permis au Hamas de prendre le pouvoir à
Gaza.
Pendant
15 ans, le Hamas a, lui aussi, encadré la population, lui faisant accepter les
privations, traquant et exécutant ses opposants tout en renforçant son appareil
militaire. Financé par des fonds venus du Qatar, avec l’accord d’Israël, le
Hamas participait, à sa façon, au maintien de l’ordre impérialiste. En lançant
l’attaque du 7 octobre 2023, il a voulu entraver par un coup de force les accords
de normalisation entre Israël et les États arabes. À aucun moment, il ne s’est
soucié des conséquences prévisibles de cette attaque pour les Gazaouis.
Cela
fait désormais presque deux ans que l’État d’Israël mène une guerre
d’extermination contre les Palestiniens, une extermination revendiquée par
l’extrême droite qui gouverne avec Netanyahou. Le drapeau palestinien est donc
brandi par beaucoup comme le drapeau de la solidarité avec les Palestiniens et
celui de la contestation de la barbarie impérialiste.
Mais, sur
le plan politique, la perspective strictement nationaliste qu’il symbolise est
une impasse. L’objectif d’un État national palestinien, même croupion et
incapable d’être indépendant économiquement, convient aux dirigeants du Hamas
ou de l’OLP. Car s’ils contestent l’ordre impérialiste, c’est pour s’y faire
une place et prospérer, eux aussi, en exploitant les travailleurs, ce qu’ils
font déjà. Une telle perspective n’offre que la misère et le chômage aux masses
palestiniennes.
La
seule véritable émancipation pour les Palestiniens, comme pour tous les
opprimés de la planète et les travailleurs exploités que nous sommes, ici,
viendra du renversement de l’ordre impérialiste et du capitalisme qui en est le
fondement.
Cette
perspective-là ne peut s’imaginer sans une vague révolutionnaire qui verrait
converger les peuples palestinien, israélien, libanais, jordanien,
égyptien…dans le rejet de la politique de leurs dirigeants respectifs. Et
alors, tout le monde réaliserait qu’il y a de la place pour que les deux
peuples, israélien et palestinien, vivent ensemble, de façon égalitaire et
démocratique dans cette région.
Nathalie Arthaud