États-Unis : un maire
“socialiste” à New York
Zohran Mamdani, jeune candidat du Parti démocrate,
l’a emporté à l’élection municipale de New York sur son rival Andrew Cuomo,
autre démocrate, qui avait été contraint de démissionner de son poste de
gouverneur de l’État en 2021, accusé d’agressions sexuelles.
Publié le 05/11/2025
Le maire sortant, Adams, démocrate également,
corrompu notoire, n’a même pas osé se représenter. C’est une sorte de second
tour qui a eu lieu après que, en juin dernier, malgré l’appui des dirigeants
nationaux du Parti démocrate, le cacique Cuomo, 68 ans, déjà ministre sous
Clinton, avait perdu la primaire face au jeune Mamdani, 34 ans.
Partisan de taxer les riches, de rendre les bus
gratuits et de geler les loyers exorbitants, Mamdani a attiré beaucoup
d’électeurs dans cette ville de plus de huit millions d’habitants, très marquée
par les inégalités sociales. Manhattan, le plus connu des cinq districts,
abrite des avenues prestigieuses où les appartements des milliardaires
surplombent les boutiques de luxe. Mais les 1,7 million d’habitants de
cette île sont loin d’être tous des privilégiés, ne serait-ce que dans le
quartier noir de Harlem. Les quatre autres districts sont nettement moins
prospères : le Bronx et le Queens sont faits de vastes quartiers populaires.
Près de 154 000 élèves des écoles de New York sont
sans domicile fixe au moins une partie de l’année scolaire. Chaque nuit, plus
de 100 000 personnes dorment dans des abris sociaux. Les prix à New York, et
pas seulement ceux du logement, sont plus élevés que dans le reste des
États-Unis. Un quart des New-yorkais survivent en dessous du seuil de pauvreté
: cette proportion est le double de celle du pays dans son ensemble.
Déjà Bill de Blasio, maire démocrate de 2014 à
2021, avait fait campagne sur le thème des inégalités sociales, sans qu’elles
reculent. Le nouveau maire, Mamdani, a promis de remettre les prix new-yorkais
à la portée de ses habitants ordinaires. C’est ce qu’il appelle du socialisme
et qui est caricaturé comme du communisme par Trump, qui au dernier moment a
laissé tomber le candidat républicain pour appeler à voter pour le démocrate
Cuomo.
En fait, si Mamdani a obtenu suffisamment de
soutien parmi les classes populaires pour l’emporter sur les autres démocrates
lors de la primaire de juin, dès ce cap franchi il a cherché celui des milieux
financiers influents de Wall Street. D’après la représentante d’une fédération
patronale qui l’a introduit dans les milieux d’affaires, Mamdani « a été
très bon pour nouer des relations et assister à des réunions ».
Depuis, plusieurs dirigeants nationaux du Parti
démocrate lui ont apporté leur soutien, même si c’est parfois du bout de
lèvres. Bien qu’ils craignent de prêter le flanc aux accusations de socialisme
ou de communisme lancées contre eux par les républicains, ils sont
reconnaissants à Mamdani, tout comme à Bernie Sanders, de ramener vers le Parti
démocrate les électeurs qui s’en étaient éloignés lors de la présidence Biden
en le voyant gouverner exclusivement au service des plus riches.
Les New-yorkais vont bientôt voir Mamdani à
l’œuvre, en représentant d’un Parti démocrate d’autant plus enclin à gauchir
son langage qu’il est éloigné du pouvoir central. Il est peu probable qu’ils
voient un changement, tant il est vrai qu’on ne peut faire le socialisme dans
une seule ville, même le socialisme version Mamdani et même à New York.
Lucien Détroit (Lutte ouvrière
n°2988)