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jeudi 24 novembre 2022

Qatar : des milliards de dollars et le désert autour

Qatar : des milliards de dollars et le désert autour

16 Novembre 2022

Le choix du Qatar pour la Coupe du monde de football 2022 a montré combien cette monarchie pétrolière, tout comme celles du Bahreïn voisin ou d’Abou Dhabi, est courtisée par les chefs d’État occidentaux et des institutions comme la FIFA, intéressés avant tout par les financements qu’ils peuvent en obtenir.

À longueur de reportages, ces États sont présentés comme des puissances émergentes. Mais si leurs richesses remplissent les coffres-forts des dynasties au pouvoir, elles enrichissent davantage ­encore les multinationales ­occidentales. Ces créations artificielles de l’impérialisme ont même été étudiées pour.

La région située entre la mer Rouge et le golfe ­Arabo-Persique est en effet divisée en un grand nombre de très petits États. Le Qatar est d’une taille comparable à la Corse. Il compte trois millions d’habitants avec les travailleurs immigrés, les Qataris, tous issus de riches familles, ne formant que moins de 10 % de la population. De même, les Émirats arabes unis voisins constituent une fédération de sept petits États, comme Dubaï ou Abou Dhabi. Le Bahreïn, situé sur un archipel du golfe Persique, est un micro État dont la superficie totale est de seulement 778 km². Cette division en minuscules États, tous dirigés par des monarchies moyenâgeuses, a été l’œuvre de l’impérialisme anglais qui s’est installé dans ce qui était auparavant des provinces reculées de l’Empire ottoman n’ayant aucune vocation à une existence nationale indépendante, avant de les façonner en fonction de ses intérêts. Mais avec la découverte, puis l’exploitation du pétrole, cette région, comme l’ensemble du Moyen-Orient, a aiguisé de plus en plus les appétits occidentaux. À la chute de l’Empire ottoman, l’impérialisme anglais et l’impérialisme français se partagèrent le Proche-Orient. Dans le cadre du plan dit Sykes-Picot, la France s’appropriait la Syrie et le Liban tandis que les Britanniques dominaient l’Irak, la Jordanie et la Palestine à quoi s’ajoutaient l’Égypte et aussi la côte occidentale du golfe Arabo-Persique.

Dans les années 1930 et 1940, on découvrit partout dans cette région d’énormes gisements de pétrole. Ce fut le cas au Qatar, tout comme à Bahreïn en 1932, puis au Koweït – une création tout aussi artificielle arrachée au territoire irakien – en 1938. Les concessions vinrent enrichir les compagnies britanniques.

Puis l’impérialisme américain supplanta progressivement les autres impérialismes pour exploiter l’or noir pour le compte de ses multinationales. En 1945, Roosevelt signait avec Ibn Saoud, roi d’Arabie saoudite, le pacte du Quincy qui donnait aux États-Unis un accès aux richesses pétrolières durant soixante années. Ce pacte s’étendit ensuite aux monarchies riveraines du Golfe.

La découverte, il y a une cinquantaine d’années, du gigantesque gisement gazier de North Field (qui représenterait 13 % des réserves de la planète), dont le ­Qatar partage l’exploitation avec l’Iran voisin, a fait de l’émirat un des tout premiers producteurs et exportateurs de gaz au monde (notamment du gaz naturel liquéfié, le GNL). Autant dire que l’intérêt des capitalistes, des marchands d’armes et combinards en tout genre pour les revenus du Qatar a considérablement augmenté. Cela vaut bien de la part des ­dirigeants du monde quelques courbettes lors de ballets diplomatiques, des financements divers et, en pourboire, l’organisation d’une Coupe du monde.

C’est ainsi que les énormes revenus du pétrole ont pu enrichir non seulement les multinationales mais quelques grandes familles des monarchies du Golfe, fort attentives à ne pas augmenter le nombre de titulaires de leur nationalité. Ces revenus qui, dans le cadre d’un Moyen-Orient unifié, auraient pu bénéficier à l’ensemble de sa population, n’ont ainsi enrichi qu’une petite couche de richards, dont les investissements sont retournés vers les banques ou les grandes sociétés des pays occidentaux, sans contribuer le moins du monde au développement d’une région qui pourtant en aurait eu bien besoin. Les grands hôtels, poussés comme des champignons sur les rives du Golfe et où vient s’agglutiner la jet-set, n’ont évidemment aucun intérêt pour les peuples de la zone moyen-orientale.

                                           Aline RETESSE (Lutte ouvrière n°2833)