Nouvelle-Calédonie :
manœuvres politiciennes et antiouvrières
Publié le 15/01/2025
Mercredi 8 janvier, Alcide
Ponga, de la droite loyaliste, a été élu chef du gouvernement local à la place
de l’indépendantiste Louis Mapou.
Louis Mapou a chuté le
24 décembre, au moment où les élus calédoniens au Congrès, le Parlement
local, votaient les trois « réformes » fiscales exigées par Paris en échange
d’une aide d’urgence de 236 millions d’euros. Ces « réformes » constituent
une véritable attaque antiouvrière : instauration d’un jour de carence pour les
fonctionnaires territoriaux, hausse de 50 % de l’équivalent calédonien de la
CSG, qui touche directement les salariés, et une hausse de la TGC, équivalent local
de la TVA. Les deux premières mesures ont été votées le 23 décembre à une
très large majorité, par les élus anti-indépendantistes comme par les élus
indépendantistes. Les députés ont même enchéri sur les exigences de Paris, en
instaurant à l’unanimité le jour de carence dès le premier arrêt maladie et non
au troisième, comme le proposait le gouvernement.
Si la hausse de la TGC n’a pas
encore été votée, ce n’est pas en raison du caractère antipauvre de la mesure
mais parce que, à la suite du deuxième vote, un des partis de droite a
interrompu la procédure, en démissionnant du gouvernement de Louis Mapou, donc
en le faisant chuter car il lui reprochait de négocier dans son coin avec
Paris. Bayrou a alors accentué son chantage, informant les élus calédoniens
que, comme seulement deux des trois mesures antiouvrières étaient votées, ils
n’auraient que deux tiers de l’aide.
En Nouvelle- Calédonie, le
gouvernement local est collégial, élu à la proportionnelle des 54 élus au
Congrès. Grâce à l’alliance formée avec l’Éveil océanien, un parti qui veut
représenter la communauté des îles du Pacifique, les partis indépendantistes
ont eu la majorité en 2019, permettant à Louis Mapou, du Palika, de prendre la
tête du gouvernement et au Kanak Roch Wamytan, de l’Union calédonienne, de
prendre la présidence du Congrès.
Mais après la mobilisation de la
jeunesse kanake et océanienne contre la réforme du corps électoral le
13 mai dernier, les partis ont multiplié les manœuvres. Les élections
territoriales qui devaient avoir lieu fin 2024 ont été repoussées pour la fin
2025. L’Éveil océanien, qui a voulu prendre ses distances avec la révolte de la
jeunesse, a fait chuter Roch Wamytan de la présidence du Congrès en s’alliant
avec la droite loyaliste pour prendre sa place. Pour l’élection du
gouvernement, l’Éveil océanien a réitéré la manœuvre en constituant une liste
avec un des partis de droite, offrant ainsi une majorité aux
anti-indépendantistes. C’est ainsi que le chef du gouvernement est maintenant
Alcide Ponga, élu d’origine kanake, anti-indépendantiste et un des dirigeants
de la droite loyaliste, symbole de l’intégration par l’État français d’une
couche de notables kanaks. Cadre à la société Le Nickel, il a été un des
directeurs de l’usine KNS, celle de la province Nord, jusqu’à sa fermeture au
mois d’août dernier.
Les travailleurs de
Nouvelle-Calédonie n’ont rien de bon à attendre de ce nouveau gouvernement ni
d’aucun de ces partis de notables qui, même s’ils veulent se démarquer les uns
des autres à l’approche des élections territoriales, veulent tous montrer à
l’État français qu’ils sont responsables et capables de voter les mesures qui
font payer les plus pauvres.
Serge Benham (Lutte ouvrière
n°2946)