Marseille : l’assassinat de Mehdi dans une société qui pourrit
Mehdi Kessaci, un jeune homme de 20 ans, a été abattu au volant de sa voiture avec une arme de poing par le passager d’une moto, en plein jour, dans un quartier calme de Marseille.
Publié le 19/11/2025
Inconnu des services de police et de justice, Mehdi était le jeune frère d’Amine Kessaci, un militant associatif et écologiste de 22 ans.
Erreur de cible ou assassinat d’avertissement ? L’enquête ne fait que commencer. Mais l’engagement d’Amine Kessaci pour dénoncer les dégâts du trafic de stupéfiants et leur emprise sur les cités de Marseille est connu de tous. À la suite du meurtre barbare de son frère aîné, Brahim, il a été le fondateur d’une association, « Conscience », qui soutient les proches des victimes du narcobanditisme. En 2020, le corps de Brahim Kessaci avait été retrouvé criblé de balles et calciné, dans un véhicule détruit par le feu.
En 2023, année où on a compté 49 homicides liés au narcotrafic uniquement sur Marseille, Amine Kessaci avait manifesté aux côtés des familles endeuillées, notamment le 1er mai. Remarqué par les responsables de gauche, il avait été candidat du parti Les écologistes aux élections européennes de 2024 et avait manqué de peu d’être élu député du Nouveau front populaire aux législatives de 2024.
Alors que le procès des assassins de son frère Brahim devrait avoir lieu début 2026, Amine Kessaci vient de publier un livre qui lui est adressé : « Tu es mort d’avoir cru en un rêve pourri, vendu au détail dans les cages d’escalier ». Loin de s’en prendre aux petites mains du narcotrafic, qui en sont les victimes, il revendique le combat contre les gros trafiquants qui s’enrichissent et vivent à Dubaï. Il dénonce surtout l’état d’abandon des cités de Marseille, le sort qui attend une fraction de la jeunesse populaire « entre la case prison ou la case cimetière », ainsi que la lenteur de la justice qui ajoute à la peine des familles meurtries.
Face à ce drame, qui touche de plus en plus de villes depuis dix ans, l’État se contente de répondre par la répression. De Valls à Nuñez, en passant par Darmanin et Retailleau, chaque ministre de l’Intérieur a montré les muscles en déployant sa police dans une « opération antidrogue », ou « place nette XXL », en créant un parquet national de lutte contre le crime organisé, en rouvrant des quartiers de haute sécurité, abandonnés pour inhumanité il y a plus de quarante ans. La situation ne fait pourtant qu’empirer car le principal terreau du narcotrafic qui gangrène la société est d’abord la pauvreté entretenue par le chômage de masse, auquel s’ajoutent le délabrement des cités populaires, la dégradation des services utiles à la population et l’abandon de la jeunesse livrée aux trafics.
Pour un autre avenir, cet ordre social pourri par le fric et le chacun pour soi ne mérite que d’être renversé.
Correspondant LO (Lutte ouvrière n°2990)



