Équateur
: révolte contre les attaques du gouvernement
09 Octobre 2019
En Équateur, l’état d’urgence
décrété jeudi 3 octobre par le président Lenin Moreno, après des affrontements
violents dans les principales villes du pays sur fond de grève générale des
transports, n’a pas arrêté la mobilisation de la population. Actions massives
et blocages se multiplient dans tout le pays.
L’annonce par le président de
mesures aux conséquences dramatiques pour les classes populaires a mis le feu
aux poudres. Il y a d’abord l’arrêt des subventions publiques au prix de
l’essence qui duraient depuis quarante ans, qui double les prix à la pompe. En
l’absence de réseau ferré, bus et taxis sont utilisés par la population.
Confrontés à la hausse de l’essence, les transporteurs devraient augmenter
leurs tarifs. Par ailleurs, les travailleurs du secteur public perdent un jour
de salaire par mois et voient leurs congés réduits de 30 à 15 jours, tandis que
les salaires des contractuels baissent de 20 %.
Lenin Moreno avait été élu en
2017 comme successeur de Rafael Correa. Ce dernier, allié de Hugo Chavez et Evo
Morales, avait financé des programmes sociaux et des infrastructures dans
toutes les régions, en particulier les Andes et l’Amazonie, sans toutefois s’en
prendre aux intérêts de la bourgeoisie.
Comme au Venezuela, la chute des
cours du pétrole a eu des conséquences catastrophiques. La dette a explosé.
Sous la pression des banquiers internationaux, Lenin Moreno mène désormais une
politique de plus en plus antiouvrière qui le rend très impopulaire :
mesures accentuant la précarité et la flexibilité des contrats de
travail ; licenciements massifs de contractuels du secteur public ;
privatisation des entreprises d’État les plus rentables ; et innombrables
concessions territoriales accordées aux géants mondiaux de l’industrie minière.
Ces attaques, aujourd’hui contestées, ont été négociées avec le FMI en
contrepartie d’un nouveau prêt de 4 milliards de dollars.
Le 3 octobre, les syndicats de
transporteurs appelaient à la grève contre ce plan, rejoints par les syndicats
ouvriers, les organisations étudiantes et la Confédération des nations
indigènes. Tout le pays se retrouvait bloqué et les rues de Quito, Guayaquil ou
Cuenca se remplissaient de manifestants. Dans les trois plus grosses villes du
pays, il y a eu des heurts violents avec la police. Le soir, Lenin Moreno
décrétait soixante jours d’état d’urgence. Le lendemain, le président de la
Fédération nationale des coopératives de transport appelait à la fin de la
grève, tandis que le gouvernement faisait circuler des chars dans les rues de
la capitale Quito.
Loin de s’arrêter, le mouvement a
pris alors dans tout le pays une nouvelle dimension. Dans toutes les provinces,
les routes sont bloquées par des paysans ou des communautés indigènes. En
Amazonie, des puits de pétrole sont occupés. Dans la province de Bolivar, le
siège du gouvernement a été pris d’assaut par les manifestants.
En réponse à l’état d’urgence, la
Confédération des nations indigènes a décrété son propre état d’exception, en
annonçant que les policiers et les militaires se rendant sur les « territoires
ancestraux » seraient arrêtés et jugés par la population. Cela s’est
effectivement produit les jours suivant dans plusieurs provinces. La même
confédération a lancé une marche sur Quito, pour se joindre à la grève
nationale appelée par les syndicats ouvriers, le 9 octobre. Dès le 7, face à
l’afflux de manifestants dans le centre historique de la capitale, le palais
présidentiel a été évacué et le gouvernement transféré à Guayaquil.
Lenin Moreno a beau accuser les
grévistes et manifestants d’être des putschistes manipulés par l’ancien
président Correa ou le président vénézuélien Maduro, la protestation populaire
contre lui et ses attaques ne cesse de grandir.
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