Nouveau
naufrage en Méditerranée hier : plus de 200 disparus
Un article de notre hebdomadaire
daté du 7 août 2015 :
Contre-vérités
et propagande
Au moment, où la question des
migrants de Calais occupe l’actualité, on entend nombre de bobards autour de
l’idée que « la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde ».
Cette
affirmation mille fois répétée par les politiciens de droite, et de gauche,
depuis que son auteur le socialiste Michel Rocard, alors Premier ministre, la
prononça en 1989, fait référence. Mais derrière ce qui semble relever d’un gros
bon sens se camouflent des contre-vérités et des exagérations délibérément
calculées.
Toute la
misère du monde ?
Comme
s’il s’agissait d’accueillir toute la misère sévissant sur la planète ! Cette
misère touche en réalité des pays, voire des continents, dans lesquels la
quasi-totalité de la population n’a pas d’autre choix que de rester là où elle
est née. Les migrations, si elles ont augmenté ces derniers temps, restent
marginales au regard de la population des pays riches de l’Europe. Elle est
marginale aussi comparée à des mouvements de populations qui ont eu lieu à
d’autres périodes, sans qu’ils se traduisent par une régression des pays
d’accueil. Au contraire !
Les pays
riches, à commencer par le plus riche d’entre eux, les États-Unis, se sont
développés grâce à des migrations massives et quasiment continues. Mais c’est
tout aussi vrai de pays comme la France, dont l’économie a profité de l’afflux
de migrants venus d’Italie pour travailler dans les mines de Lorraine, de
Polonais dans les mines du Nord, de Portugais et d’ Espagnols, de travailleurs
d’Afrique du Nord qui se sont retrouvés sur les chaînes des usines automobiles.
Quand des manifestants crient « Première, deuxième, troisième génération, nous
sommes tous des enfants d’immigrés », ce n’est pas qu’un slogan, c’est le
résumé d’une réalité vivante.
Un vieil
épouvantail
La peur d’envahisseurs venus d’ailleurs
est une vielle ficelle utilisée par les démagogues de tout bord. Pendant des
décennies ils ont agité la menace du « péril jaune », pour la remplacer par
celle venue du Moyen-Orient ou d’Afrique. Ils échangent les habits de
l’épouvantail, mais c’est toujours la même méthode.
Le gâteau
trop petit pour le partager ?
Mensonge
là encore. Quand les dirigeants politiques prétendent qu’on ne peut pas
partager la « galette de la France » ou d’un pays comparable, ils omettent de
dire que la part des riches, loin d’y diminuer, reste la même, quand elle ne
grossit pas. Ces riches ne partagent rien – ni avec les nouveaux migrants, ni
avec les travailleurs du pays. Il suffirait pourtant de prendre sur leur part
pour pouvoir accueillir tous ceux qui, à travers mille périls, tentent
d’atteindre l’Europe.
Ce serait
une question de justice, car une partie de la fortune de ces riches provient du
pillage des pays dont viennent ces migrants, pillage des richesses de leur sol
et de leur sous-sol, auquel s’ajoute un colossal pillage humain. Car le trafic
d’esclaves, en même temps qu’il enrichissait les bourgeois négriers de Bordeaux
ou de Nantes, vidait des régions entières d’Afrique de leurs populations.
Pour ne
pas avoir à accueillir ceux qui fuient l’insécurité, il faudrait cesser de la
provoquer
Pour
toute personne de bonne foi, l’insécurité qui règne au Moyen-Orient et dans
certains pays d’Afrique a pour origine les interventions des grandes
puissances, en premier lieu les États-Unis, pour protéger leurs intérêts économiques.
Elles sont responsables du chaos qui y domine et du même coup de l’afflux des
hommes, femmes et enfants qui essayent d’y échapper. Ce serait la moindre des
choses qu’elles en assument les conséquences, en accueillant les victimes
innocentes de leurs agissements. Mais il faudrait surtout qu’elles cessent de
mettre de l’huile sur le feu dans ces régions.
Au lieu
de cela, elles augmentent la hauteur de leurs barbelés. Mais elles voudraient,
en plus, ériger des barbelés psychologiques dans les têtes, afin de dresser les
peuples les uns contre les autres, en essayant de faire croire que les migrants
sont nos adversaires. Ne tombons pas dans ce piège.
Jean-Pierre VIAL
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