La seule voie pour les
travailleurs
Le Front national, de loin en
tête des résultats, le Parti socialiste, plus bas que jamais depuis des
décennies, et tout cela sur la base d’une forte abstention : voilà les
éléments marquants de ces élections européennes.
Comme aux municipales, le PS a
été rejeté par son propre électorat. Il paye le prix de sa politique,
entièrement consacrée à favoriser les intérêts des groupes capitalistes et des
banquiers en multipliant les mesures qui aggravent les conditions d’existence
des classes populaires.
Le FN a réussi à détourner à
son profit l’écœurement provoqué par le PS. Marine Le Pen a annoncé
triomphalement que c’était la fin du bipartisme, c’est-à-dire de l’alternance
de la droite et de la gauche au pouvoir.
Si cela s’avérait exact, cela
signifierait seulement que la supercherie de l’alternance entre l’UMP et le PS
serait remplacée par une alternance à trois.
À la rivalité gauche-droite, en
concurrence pour la mangeoire mais d’accord pour mener la politique exigée par
la grande bourgeoisie et les possédants, s’ajouterait un troisième larron. Mais
quelle que soit leur combinaison, le pouvoir mènerait sa politique en fonction
des intérêts des possédants, des grands groupes industriels et commerciaux et
des banquiers qui détiennent le véritable pouvoir.
Le FN, comme les deux autres,
représente une politique pour la bourgeoisie mais avec des méthodes encore plus
brutales et en charriant toutes les idées réactionnaires, rétrogrades,
xénophobes et racistes. Avec, en plus, la menace que le renforcement même
simplement électoral du FN encourage une mouvance anti-ouvrière qui ne se
contenterait pas de voter mais qui serait prête à passer aux actes contre les
travailleurs immigrés d’abord, contre les travailleurs tout court ensuite.
Comment en sommes-nous arrivés
là ? Dans l’immédiat, il y a la responsabilité écrasante du PS, le
désespoir et la perte de repères que sa politique a engendrés dans les classes
populaires.
Mais il y a une responsabilité
plus générale des grands partis issus du mouvement ouvrier qui, au fil du
temps, ont complètement sacrifié les intérêts de la classe ouvrière pour
accéder au pouvoir gouvernemental où ils ne pouvaient pas mener une politique
autre que celle de la grande bourgeoisie.
Si le FN a pu devenir le
déversoir du mécontentement dans les classes populaires, c’est qu’il n’y a plus
face à lui de partis qui représentent les intérêts des exploités.
C’est dans ce contexte que les
résultats de Lutte Ouvrière, pour modestes qu’ils soient, préservent une
perspective politique pour les travailleurs. Ils confirment la présence d’un
courant politique qui s’est saisi des deux élections de l’année pour rejeter le
faux choix entre partis qui sont leurs oppresseurs d’aujourd’hui, d’hier ou de
demain. Ils expriment la conviction que les exploités, ceux qui n’ont ni
capitaux ni rentes et n’ont que leur travail pour vivre, peuvent se constituer
en une force politique opposée aux partis de la bourgeoisie.
Cette force ne pèsera
réellement sur la vie politique que lorsque la classe ouvrière retrouvera sa
combativité et ses moyens de lutte : les grèves, les manifestations,
l’action collective.
Les milliers de femmes et
d’hommes qui ont voté pour nos listes ont fait le geste d’exprimer leur
approbation des objectifs qu’il faudra imposer par la lutte pour empêcher le
monde du travail de tomber dans le chômage et la pauvreté. Ils représentent une
minorité, mais une minorité consciente que les combats à venir devront opposer
clairement la force collective des travailleurs à la grande bourgeoisie et aux
gouvernements à son service. C’est la première condition de leur efficacité.
Celles et ceux qui ont voté
Lutte Ouvrière ont levé un drapeau, celui de la tradition révolutionnaire du
mouvement ouvrier. Renforcer ce courant, lui donner la force d’intervenir dans
la lutte de classe au quotidien, dans les entreprises, dans les quartiers
populaires, est la tâche primordiale dans la période à venir. C’est la seule
manière de s’opposer à la montée des forces réactionnaires qui menacent
d’engloutir la société.
C’est, enfin, ce courant qui
pourra faire émerger un parti véritablement communiste capable d’œuvrer à ce
que la classe ouvrière enlève à la bourgeoisie capitaliste le pouvoir qu’elle
exerce sur l’économie et sur la politique, pour créer une organisation sociale
sans exploitation et sans oppression.
Cela semble utopique devant le
succès affiché par le FN, souligné encore par le désappointement des autres
partis et amplifié par les commentateurs. Mais, pour les travailleurs, c’est la
seule voie.
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