jeudi 12 mai 2016

Argenteuil Délégation de service public : Sationnement public à Argenteuil : un rapport accablant de la Chambre Régionale des Comptes pour la municipalité d'hier et celle d'aujourd'hui



Places de parkings et place aux actionnaires


La chambre régionale des comptes vient de rendre public hier les conclusions de son enquête sur la « Gestion du stationnement urbain » à Argenteuil. Nous y reviendrons. En attendant nous le portons à la connaissance de tous (ce qui est souligné l’est par nos soins). Pour faire court, nous pouvons dire que depuis des années cette question du stationnement public à Argenteuil remis pour l’essentiel entre les mains de de grosses entreprises du secteur privé -SPIE, puis Vinci- a été marquée par une « situation de faiblesse » de la commune, et donc de force du secteur privé bénéficiaire. Mais qui s’en étonnera.



11/05/2016


Extrait

Synthèse

L’examen de la gestion du service public du stationnement urbain de la commune d’Argenteuil (9 503 places publiques : 5 345 en ouvrage et 4 158 sur voirie) s’inscrit dans le cadre d’une enquête des juridictions financières et a porté sur les exercices 2010 et suivants, jusqu’à la période la plus récente.
Le dernier avis de contrôle budgétaire rendu par la chambre régionale des comptes, le 10 avril 2015, avait relevé, à cet égard, combien la gestion du stationnement urbain pesait sur les comptes de la commune. En effet, la délégation globale du service public de stationnement couvrant la voirie et les parcs en ouvrage, confiée à la société SPIE Autocité, a donné lieu, fin 2013 et début 2014, à plusieurs contentieux dont l’issue a été défavorable à la collectivité. La commune, in fine, a eu recours à une transaction et a conclu, le 14 novembre 2014, un protocole transactionnel par lequel elle s’est engagée à verser au délégataire précité une indemnité de 13,6 M€[1], selon un échéancier courant jusqu’en 2018.
Une convention déséquilibrée dont les effets continueront de peser sur les finances de la collectivité jusqu’en 2018
Au titre de cette délégation, conclue en 2006, la commune s’acquittait chaque année auprès de la société SPIE Autocité d’un ensemble de subventions et de compensations d’un montant d’environ 2 M€, alors que la société, dans le même temps, percevait la totalité des recettes des parcs en ouvrage de la ville et du stationnement en voirie. En sus de ce montant significatif, une somme de 0,6 M€, correspondant à des compensations diverses, était également facturée par la société SPIE Autocité, mais la collectivité n’assurait ni la comptabilisation, ni le règlement de cette créance, sans pour autant la contester.
Cette délégation, conclue pour une durée initiale de 30 ans, a été dénoncée par la collectivité, en juin 2011, la résiliation prenant effet en juillet 2013. Cependant, en application des stipulations du protocole transactionnel précité, la commune, après avoir procédé à un premier versement de 6 M€, en février 2015, devra verser chaque année à la société SPIE Autocité, jusqu’en 2018, 2,5 M€.
L’absence de maîtrise des enjeux financiers liés à la délégation conclue avec SPIE Autocité est à l’origine de cette situation. Sur des points essentiels, la collectivité, en effet, a singulièrement négligé la défense de ses intérêts :
- elle versait ainsi à son délégataire une subvention forfaitaire d’exploitation (SFE) aux contours mal définis. Aucun élément contractuel ne permettait en effet de relier le versement de cette subvention, qui portait sur un montant annuel de l’ordre de 1,7 M€, à des sujétions de service public identifiées et chiffrées. La collectivité prenait également en charge, au sein de son propre budget, des dépenses en relation directe avec l’exploitation du service public délégué, qui incombaient pourtant au délégataire ;
- en sus de cette subvention, la collectivité s’était engagée à compenser, à hauteur de 0,45 M€ HT, la gratuité accordée, pour une durée anormalement élevée de 2h30 mais résultant d’un choix délibéré de la commune, aux utilisateurs du parkingCôté Seine. Jusqu’à l’intervention d’un jugement du 3 décembre 2013 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, la collectivité, qui interprétait de manière erronée le dispositif conventionnel, semblait convaincue que cette compensation venait en déduction de la subvention forfaitaire d’exploitation déjà acquittée ;
- la totalité des recettes en voirie était reversée au délégataire, soit environ 0,25 M€ par an. Plus encore, la commune était sanctionnée, à hauteur d’une somme équivalente, au titre d’un taux de respect irréaliste des règles de stationnement, arbitrairement fixé à 70 %, alors qu’il s’élevait en réalité à environ 25 % ;
- par ailleurs, les rapports d’activité du délégataire ne retraçaient pas l’intégralité des flux financiers mis à la charge de la collectivité, sans que celle-ci ne formule la moindre observation, se mettant ainsi en position de faiblesse vis à vis des futurs contentieux avec son délégataire.
De même, le contrôle technique de la délégation a toujours été défaillant. L’exemple le plus révélateur de cette lacune réside dans le projet de parking de l’hôtel de ville, qui constituait le principal investissement envisagé. Ce projet, dont le principe et la réalisation ont bien été arrêtés, au demeurant en l’absence de toute étude préalable, a ainsi été abandonné sans que la commune en tire quelque conséquence que ce soit s’agissant du cahier des charges techniques et financières de la délégation.
La reprise du stationnement en voirie
La reprise en régie par la commune du stationnement en voirie, à compter du 24 juillet 2013, s’est accompagnée d’une nette diminution des recettes, alors que, désormais, elles ont vocation à abonder les ressources de la commune.
Selon la collectivité, les recettes de stationnement en voirie s’établissaient, au 1er semestre 2015, à 50 280,97 €, soit 20 % seulement du montant collecté en 2012. Le fait que, début juillet 2015, près de 39 horodateurs, sur un parc total de 72, soient hors service, n’est sans doute pas étranger à cette situation. Cette perte de recettes à hauteur de 85 000 € est d’autant plus regrettable qu’elle s’inscrit pour la commune dans un contexte financier très contraint.
Par ailleurs, la collectivité n’a pas mis à profit la reprise en régie du stationnement en voirie pour pallier les défaillances structurelles mises en évidence par plusieurs cabinets d’audit : stationnement hors places prévues à cet effet, faible taux de respect des règles de stationnement, très faible taux de verbalisation. Les redevances de stationnement ne représentaient ainsi, en 2014, que le tiers de la masse salariale des agents de surveillance de la voie publique (ASVP) de la commune.
En tout état de cause, la collectivité trouverait avantage à mettre en œuvre une refonte de ses tarifs, allant notamment dans le sens d’une harmonisation de la tarification du stationnement en voirie et en ouvrage, et à rendre plus efficaces les modalités de contrôle du stationnement en voirie.
La nouvelle délégation confiée à VinciPark comporte des incertitudes
En ce qui concerne la délégation confiée à la société Vinci Park pour l’exploitation des parcs en ouvrage de la commune, à compter du 23 juillet 2013, les flux financiers paraissent davantage maîtrisés.
Pour autant, cette maîtrise du dispositif contractuel présente toujours des insuffisances notables, au regard des considérations suivantes :
- les modalités de calcul du montant de la subvention forfaitaire d’exploitation, que la collectivité verse à la société Vinci Park, ne sont pas précisément définies par le contrat et les mécanismes de revalorisation de la SFE apparaissent très défavorables à la collectivité ;
- lors du changement de délégataire, en juillet 2013, la collectivité n’a pas saisi l’occasion de remettre à plat le dispositif extrêmement coûteux de gratuité du parcCôté Seine associant la commune, les commerçants riverains et,in fine, le délégataire, alors pourtant qu’une délibération du 12 décembre 2011 et des consultations juridiques approfondies l’invitaient à agir en ce sens. L’enjeu financier de la compensation de cette gratuité est loin d’être négligeable pour la collectivité puisqu’à ce titre elle a mandaté, en 2015, 713 765 € au profit du délégataire ;
- la collectivité n’a par ailleurs effectué aucune comparaison des recettes et des charges au titre des délégations successives. À titre d’exemple, le total des recettes liées au parcCôté Seines’est élevé à 644 595 € HT, en 2014, contre 715 000 € HT, en 2012, dernier exercice d’exploitation complet de l’ancien délégataire. Cet écart de 71 000 € est difficilement explicable, d’autant que la grille tarifaire du nouveau délégataire est nettement plus élevée que celle de son prédécesseur.
Au-delà du changement de délégataire, la gestion du service public du stationnement urbain est marquée par un certain immobilisme : le nombre de places offertes en ouvrage et en voirie est inchangé depuis 10 ans, les tarifs de stationnement en voirie sont identiques depuis le début des années 2000, notamment. Pourtant, le coût de cette politique est important pour la commune et devrait atteindre, en 2015, près de 250 € par foyer fiscal.
En tout état de cause, cette gestion sera conduite à évoluer dans un proche avenir. En effet, le contrat conclu avec la société Vinci Park a prévu d’importants investissements, à l’horizon 2015-2017. Ainsi, près de 11 M€ devraient être engagés pour la réhabilitation des parkings du Val d’Argent, dans le cadre de cofinancements complexes faisant intervenir des subventions de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) directement versées au délégataire. Il en résultera, certes, une offre nouvelle de places de parking, mais aussi des coûts d’exploitation plus élevés pour le délégataire, alors que la collectivité ne dispose à cet égard d’aucune étude permettant de conclure à la présence d’une demande solvable de nature à permettre de rentabiliser la gestion de ces parkings.
([1]) M€ : millions d’euros.

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