dimanche 22 novembre 2015

Union nationale ? Pas question d’attacher les travailleurs au char de leurs exploiteurs. Un article de notre hebdomadaire Lutte Ouvrière de cette semaine



Un piège politique : pas d’union nationale avec Hollande, Sarkozy, Le Pen !

Lundi 16 novembre, trois jours après les attentats meurtriers, Hollande s’est exprimé devant les deux Assemblées réunies en congrès, à Versailles. La mise en scène était soignée : parlementaires, gardes républicains et journalistes au garde-à-vous, Marseillaise, retransmission en direct sur toutes les chaînes, discours martial prononcé au nom de la France éternelle.
         L’appel à l’union nationale a été répété sur tous les tons. Pour Hollande il ne s’agit pas seulement d’utiliser ce piège cent fois tendu à la population mais aussi de tenter de contraindre l’ensemble des politiciens à l’approuver. L’union nationale vise à faire taire les oppositions dans le propre camp du gouvernement, à tenter d’obliger Sarkozy et consorts à se ranger provisoirement derrière Hollande, et ramène pour un temps Le Pen à un rôle de figuration. Pour quelques jours, Hollande incarne ainsi l’État, tous les défenseurs de l’ordre social sont priés de s’aligner et la population de suivre. Les médias à l’unisson jouent de la grosse caisse sur le même thème.
         Fort de ce soutien, Hollande a annoncé que la France allait intensifier ses opérations en Syrie. Des bombardements ont déjà eu lieu, d’autres vont intervenir, le porte-avions Charles-de-Gaulle est sur le départ pour la Méditerranée orientale. La politique de la canonnière, en vigueur depuis deux siècles et qui a conduit à la situation actuelle, sera donc poursuivie.
         Sur le plan intérieur, Hollande reprend à son compte les mesures prônées par la droite, voire l’extrême droite. Il exige la défense des frontières extérieures de l’Europe contre les réfugiés, alors même que c’est le chaos engendré par l’impérialisme qui fait fuir ceux-ci. L’état d’urgence permet à la police d’intervenir, de perquisitionner, d’arrêter et d’assigner à résidence qui elle veut et comme elle veut. Les manifestations et rassemblements peuvent être interdits, au gré des autorités.
         La droite ayant réclamé qu’on interne des milliers de personnes sur simple soupçon d’islamisme radical, Hollande s’incline et va demander au Conseil d’État si cela est légalement faisable. Le bruit fait autour des mesures antiétrangers, des expulsions, des déchéances de nationalité des binationaux, des interdictions d’entrée du territoire, vise surtout à désigner des boucs émissaires. Les services de police, les effectifs des gardiens de prison seront renforcés. Les diminutions d’effectifs dans l’armée sont suspendues, ses crédits seront augmentés.
         Pour faire face à ces dépenses, Hollande est prêt à creuser le déficit, car, a-t-il affirmé, « le pacte de sécurité passe avant le pacte de stabilité ». On suppose naturellement que, dans un esprit d’union nationale, les banquiers qui prêteront à l’État de quoi payer la note le feront gracieusement, tout comme les marchands de missiles et les fabricants d’avions qui fourniront les troupes.
         Enfin, peut-être pour justifier le déplacement de tous ces parlementaires à Versailles, Hollande a évoqué une obscure modification de la Constitution. Il s’agirait d’adapter les possibilités répressives aux nécessités du monde moderne en donnant encore plus de pouvoirs au président. Ainsi, Hollande au gouvernement, après avoir comme prévu poursuivi et amplifié la politique propatronale de ses prédécesseurs, après avoir porté coup sur coup aux travailleurs, reprend maintenant les habits de la droite : l’ordre, l’uniforme, les contrôles de police, les frontières, la restriction des libertés, les déclamations patriotiques.
         Aucune de ces mesures n’arrêtera les tueurs de Daech. Ni les poses de Hollande ni ses Rafale n’éteindront les flammes d’où sortent les terroristes, au contraire. L’union nationale est seulement une façon d’attacher les travailleurs au char de leurs exploiteurs. C’est bien pourquoi il faut la récuser.

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