Nous
sommes tous des cheminots
Depuis mercredi, des dizaines
de milliers de cheminots sont en grève contre la réforme ferroviaire. Ce que le
gouvernement présente comme une réunification salutaire entre la SNCF et RFF
n’est qu’un « plan de compétitivité » destiné à réaliser des milliards
d’économies sur le dos des usagers et des cheminots en vue de la privatisation
de la SNCF.
Pour
les cheminots, elle se traduira par plus de flexibilité, par des jours de
congés en moins, par le blocage de leurs salaires et des suppressions
d’emplois. Les cheminots disent non, ils ont raison.
Le
gouvernement a choisi l’épreuve de force. « Il faut que cette grève s’arrête »,
ont ordonné Hollande et Valls. Cuvillier, le secrétaire d’État aux Transports,
a même accusé les cheminots d’être des « incendiaires ». Comme les grévistes de
l’usine d’Aulnay-sous-Bois avaient été accusés par les dirigeants de Peugeot
d’être des « casseurs », voilà que c’est le tour des cheminots.
Cette
fois, ce n’est pas une grande famille bourgeoise qui manifeste sa rage, mais un
gouvernement PS. En se montrant aussi autoritaire contre les grévistes qu’il
est à plat ventre devant les patrons, il apparaît sous son vrai jour.
« Il en
va de la sauvegarde de la SNCF et de sa modernisation », se défendent les
ministres. Mais de Peugeot à La Poste en passant par La Redoute ou par Bouygues
Telecom, on sait ce que cachent les mots de « modernisation » ou «
restructuration » : une régression et des attaques contre l’emploi et les
conditions de travail.
On peut
être usager de la SNCF et touché par la grève, on n’en demeure pas moins un
ouvrier ou un employé qui mesure les conséquences de ces reculs, pour les subir
soi-même.
Les
politiciens et les médias se répandent en calomnies contre les cheminots. Quel
cinéma, les médias ont-ils dû faire pour que « l’exaspération » des usagers
s’exprime ! Quelle dramatisation autour du bac ! C’est écœurant.
À
chaque fois que des travailleurs se battent pour ne pas être transformés en
chômeurs et pour leurs droits les plus stricts, ces gens-là les clouent au
pilori et les accusent d’être des « privilégiés » et des « irresponsables ».
C’est d’ailleurs aussi parce qu’ils se battent que les intermittents du
spectacle sont accusés d’être les enfants gâtés du régime de chômage !
Patronat
et gouvernement voudraient que l’on se taise et se résigne face à leurs mesures
anti-ouvrières. Alors, que les cheminots et les intermittents du spectacle
relèvent le gant est une bonne chose pour tous les travailleurs car il faut
rompre cette spirale qui nous tire tous vers le bas.
Bien
sûr, la grève des cheminots « gêne ». Mais si les cheminots sont en mesure de
bloquer sérieusement la marche de la société, c’est qu’ils sont indispensables.
Il en va de même pour tous les travailleurs. Les intermittents ne peuvent pas
bloquer les trains mais ils peuvent aussi peser sur l’économie.
L’annulation
d’un festival comme celui d’Avignon coûterait, dit-on, plusieurs millions
d’euros pour les hôteliers ou les restaurateurs. Chaque jour de grève coûterait
20 millions à la SNCF.
Eh
bien, cela donne une idée de ce que les travailleurs rapportent au quotidien et
prouve qu’ils apportent infiniment plus à la société qu’ils n’en retirent. S’ils
n’ont pas leur part, c’est que celle-ci leur est volée par une minorité qui se
repaît de l’exploitation.
Cela
donne aussi une idée de la force que nous représenterons lorsque tous les
contingents de salariés entreront en lutte ensemble, avec la conscience que,
par delà nos secteurs d’activité, nous subissons la même offensive et que nous
avons les mêmes exigences à défendre.
Alors
oui, il faut marcher la tête haute, être conscients de nos droits et nous
battre pour nos intérêts. Nous sommes mille fois plus utiles que ces parasites
qui nous font la leçon. Les cheminots, comme les intermittents, ouvrent la voie
et peuvent en être fiers.
Jusqu’où
les cheminots vont-ils pouvoir aller ? Les directions syndicales
résisteront-elles aux pressions gouvernementales ?
Sont-elles
traversées par des divisions qui pourraient les conduire à négocier des
arrangements contre la poursuite de la grève ?
Quoi
qu’il en soit, il revient aux grévistes et à eux seuls de décider de l’avenir
de leur mouvement. Ils ont montré qu’ils n’étaient impressionnés ni par les
attaques du gouvernement, ni par celles des médias. Leur mécontentement est
profond et suffisamment légitime pour qu’ils tiennent bon.
Vive la
grève des cheminots ! Vive la solidarité entre travailleurs !
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