Giselle
Halimi vient de disparaître. C’était une avocate, mais ce fut une avocate militante
du combat des femmes, mais aussi une combattante de bien d’autres causes. Elle
fut ainsi l’avocate de combattants nationalistes algériens durant la Guerre d'Algérie. J’ai noté sur
Wikipédia l’évocation de la grève qu’elle mena à 13 ans pour ne plus faire le
lit de son frère. Bref, un résumé de sa vie. DM
En guise d’hommage, un article de Lutte ouvrière sur le procès de
Bobigny
Le procès
de Bobigny de 1972 : Une étape du combat pour les droits des femmes
05 Avril 2006
Le téléfilm Le procès de Bobigny,
diffusé le 3avril sur France2, a rappelé ce que fut cet épisode du combat des
femmes pour le droit à l'avortement.
C'était en 1972. Marie-Claire,
16ans, enceinte à la suite d'un viol, comparaissait devant le tribunal de
Bobigny pour avoir avorté. Quant à sa mère, elle était jugée pour
"complicité", car l'avortement était alors un délit. Les femmes
n'avaient pas le droit d'interrompre une grossesse non désirée. Les peines
encourues étaient lourdes: six mois à deux ans de prison pour celle qui avait
avorté, et un à cinq ans pour celle ou celui qui lui en avait procuré les
moyens.
Lors de leurs procès, la mère et
la fille eurent le courage de braver cette loi injuste, criminelle et
hypocrite. Tout le monde savait alors que, chaque année, des centaines de
milliers de femmes avortaient. Celles qui avaient les moyens, ou les relations
sociales qui vont souvent avec, le faisaient avec l'aide de médecins ou à
l'étranger. Les autres, celles qui, comme Marie-Claire et sa mère, étaient de
milieu modeste, recouraient à tout ce qui pouvait servir pour déclencher
l'avortement. Des dizaines de femmes mouraient chaque année, des suites d'un
avortement clandestin dans de mauvaises conditions sanitaires.
Marie-Claire eut donc le courage
d'affirmer que ce n'était pas sa mère qui lui avait demandé d'avorter, mais
qu'elle avait décidé, elle-même, de ne pas mettre au monde un enfant non
désiré. Quant à sa mère, elle eut le cran d'affronter un tribunal d'hommes
nantis et pleins d'assurance pour leur asséner que ce choix relevait du seul
droit des femmes, et pas des tribunaux. Elles étaient soutenues autour du
tribunal par des manifestantes brandissant des pancartes: "Notre ventre
nous appartient", "Un enfant, si je veux, quand je veux".
Gisèle Halimi, avocate et
militante pour les droits et les libertés des femmes, assura la défense des
deux accusées. Elle fit le procès de cette législation barbare. Jacques Monod,
prix Nobel de médecine, vint dire à la barre que cette loi était dépassée par
la médecine; le professeur Milliez, médecin gynécologue, catholique et pratiquant,
en affirmant qu'il aurait avorté Marie-Claire si celle-ci le lui avait demandé,
mit en évidence l'hypocrisie de cette loi.
Marie-Claire fut relaxée. Sa mère
fut condamnée à 500F d'amende avec sursis, et la femme qui avait pratiqué
l'avortement à un an de prison avec sursis. Les tribunaux eux-mêmes étaient
contraints de reconnaître l'absurdité de la loi. Mais c'est le combat mené par
Marie-Claire et sa mère, et par des centaines de milliers d'autres femmes dans
ces années-là, qui allait finir par imposer la liberté pour les femmes de
mettre fin à une grossesse non désirée. Comme l'a rappelé Gisèle Halimi dans
une interview, il faut savoir "désobéir à une loi répressive pour affirmer
une liberté première".
Le droit à l'interruption
volontaire de grossesse est aujourd'hui remis en cause, ne serait-ce que par le
manque croissant de structures médicales où le pratiquer. Ce n'est pas un
combat du passé, il reste d'actualité.
Sophie
GARGAN (Lutte ouvrière n°1966)
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