Guerre en
Syrie : un chaos dont l’impérialisme est responsable
16 Octobre 2019
En annonçant dès le 7 octobre le
retrait des forces spéciales américaines présentes dans le nord de la Syrie,
Trump a donné le feu vert à Erdogan pour lancer l’armée turque contre les
Kurdes syriens. Le cynisme avec lequel les dirigeants américains ont ainsi
abandonné ceux sur qui ils s’étaient appuyés pour reconquérir les territoires
contrôlés par Daech choque légitimement partout dans le monde.
Mais, si le cynisme des grandes
puissances est sans limite, il n’est pas nouveau. Si les peuples du
Moyen-Orient, de la Syrie à l’Afghanistan en passant par l’Irak et l’Iran,
subissent les guerres et les destructions depuis quarante ans, la
responsabilité en incombe directement aux puissances impérialistes. Les
États-Unis, gendarme du monde, sont à la manœuvre aujourd’hui, mais ils ont été
suivis, ou précédés selon les épisodes, par la France et la Grande-Bretagne,
les premières à avoir dépecé cette région stratégique, riche en pétrole, en y
traçant des frontières arbitraires, coupant notamment les populations kurdes en
quatre morceaux. Cette politique criminelle n’a fait que se poursuivre et
s’approfondir.
Dès 1979, la CIA a financé et
équipé les milices islamiques qui combattaient la présence soviétique en
Afghanistan. Ce soutien a permis à un certain Oussama Ben Laden de faire ses
classes et de tisser un réseau solide, avant de se retourner contre ses maîtres
en fondant al-Qaïda. Le djihadisme, dont l’éradication sert aujourd’hui à
justifier interventions militaires et lois sécuritaires au nom de la
« lutte contre le terrorisme », est un produit direct des manœuvres
impérialistes.
En 2011, le démocrate Obama a
retiré les troupes américaines de l’Irak, que le républicain Bush junior avait
envahi en 2003 sous prétexte des attentats du 11-Septembre, dont les Irakiens
n’étaient en rien responsables. L’armée et les services spéciaux américains ne
laissaient pas alors « un Irak souverain, stable et autonome », comme
le prétendait Obama. Ils laissaient un peuple meurtri et un pays détruit par la
guerre civile, découpé par leurs soins en zones confessionnelles sur lesquelles
prospéraient des milices islamistes de diverses obédiences. Parmi elles, il y
avait al-Qaïda en Irak et son leader al-Baghdadi, futur fondateur de Daech.
Quand, en 2011, le Printemps
arabe toucha la Syrie, l’intervention des grandes puissances ne visa pas, quoi
qu’elles en disent, à appuyer les aspirations sociales et démocratiques de la
population face à la dictature de Bachar al-Assad. Après une période
d’observation prudente, elles voulurent profiter de la situation pour tenter de
remplacer le régime d’Assad par un autre, plus docile à leurs intérêts. Elles
agirent pour remplacer la contestation sociale par une guerre civile et
confessionnelle. Elles le firent directement et par l’intermédiaire d’alliés
régionaux en rivalité entre eux, l’Arabie saoudite et la Turquie, mais aussi le
Qatar, l’Égypte et l’Iran, pourtant ostracisé par les États-Unis. Ces
interventions des puissances régionales, tour à tour encouragées et modérées
par les États-Unis, transformèrent la Syrie en champ de bataille entre milices
concurrentes. Cela juge sans appel les discours des dirigeants occidentaux sur
la démocratie, les droits des peuples, des femmes ou des minorités opprimées.
Quand l’une de ces milices,
Daech, née en Irak, réussit à s’imposer sur un vaste territoire en proclamant
l’État islamique au Levant et en Irak, les grandes puissances durent changer
leur fusil d’épaule. D’un côté, elles remirent le dictateur Assad dans le jeu.
De l’autre, elles formèrent une coalition pour combattre Daech. Les États-Unis
et leurs alliés s’appuyèrent sur les milices kurdes syriennes, encadrées par leurs
conseillers militaires et appuyées par leurs avions. Au prix de lourdes pertes,
les milices kurdes du YPG et les Forces démocratiques syriennes (FDS)
reconquirent, ville par ville, le territoire occupé par Daech.
Comme ceux du Kurdistan irakien,
les nationalistes kurdes de Syrie espéraient profiter de cette alliance pour
conserver durablement le petit espace d’autonomie conquis au nord du pays à la
faveur de la guerre civile. L’espoir aura été de courte durée. Si l’on ignore
quels marchandages ont eu lieu entre Trump et Erdogan, quels sont les calculs
américains, ces derniers ont sacrifié les Kurdes pour satisfaire leur allié
turc, hostile à un Kurdistan autonome à ses frontières et prêt à une aventure
militaire pour redorer son blason. En même temps, les États-Unis redeviennent,
à travers la Turquie, un acteur de la guerre civile syrienne, quitte même à la
relancer.
Cette trahison montre encore une
fois que l’ordre mondial imposé par les grandes puissances ne laisse aucune
place à l’autodétermination des peuples. Qu’il s’agisse des Kurdes, des
Palestiniens ou d’autres, elles n’agissent qu’en fonction de leurs propres
intérêts et de ceux de leurs sociétés, pétrolières ou autres.
La domination de l’impérialisme
ne mène qu’au chaos et à la guerre permanente, comme le montrent les exemples
de la Syrie, de l’Irak et du Moyen-Orient dans son ensemble ; avec le
risque de plonger le monde dans une guerre généralisée.
Algérie : révolte contre le système politique et aspirations sociales
Tel sera
le sujet du Cercle Léon Trotsky
Ce soir vendredi 18 octobre, à 20 h
30 à Paris
Grande salle de la Mutualité,
24, rue
St-Victor, Paris 5ème, M° Maubert-Mutualité
entrée : 3 euros
1 commentaires:
Enregistrer un commentaire