Médecine
scolaire : missions impossibles
L’Académie de médecine vient de
publier un rapport alarmant sur la médecine scolaire, décrivant une situation
catastrophique.
« 1 027 médecins scolaires de
l’Éducation nationale étaient en fonction au 1er juin 2016, pour 12 millions
d’élèves, [ce qui fait un médecin pour plus de 11 000 élèves] soit
un effondrement des effectifs de l’ordre de 20 % depuis 2008. La pyramide d’âge
est extrêmement défavorable, puisque l’âge moyen est de 54,8 ans : une
quarantaine de médecins ont plus de 65 ans et 240 ont entre 60 et 65 ans, ce
qui laisse présager d’un nombre très important de départs à la retraite dans
les années qui viennent. L’attractivité pour la médecine scolaire est médiocre
en raison de sa faible reconnaissance professionnelle et des mauvaises
conditions matérielles. La répartition est très hétérogène, allant de 2 000 à
46 000 élèves pour un seul médecin… Le taux des visites pour les élèves de 6
ans varie selon les régions de 0 à 90 % : en moyenne 57 % en 2016. »
Les gouvernements connaissent
cette situation depuis longtemps, et périodiquement des rapports sont faits, de
belles déclarations sont proclamées. Il y a moins d’un an, une Convention-cadre
de partenariat en santé publique a été signée par les ministres de la Santé et
de l’Éducation nationale : des mots, un communiqué, et strictement aucun moyen
supplémentaire pour recruter à la mesure des besoins.
Car les missions des médecins
scolaires sont nombreuses et indispensables. Par exemple, la visite médicale
pour les enfants de six ans, prévue dans le Code de l’éducation, est
obligatoire et pourtant quatre sur dix n’y ont pas droit. Ce sont les enfants
des milieux les plus défavorisés qui en subissent les conséquences, ceux qui
ont une mauvaise couverture sociale, ceux des régions sinistrées où avoir un
rendez-vous avec un ophtalmologiste, un ORL ou un dentiste relève du parcours
du combattant. Pour beaucoup d’entre eux, si le dépistage des problèmes de
vision ou d’audition n’est pas fait à l’école, il ne sera pas fait du tout.
Avec toutes les conséquences désastreuses pour la suite.
Le dépistage des troubles des
apprentissages est la spécificité du médecin de santé scolaire qui doit en
faire un diagnostic et proposer une prise en charge adaptée par un
orthophoniste, un psychologue, un psychomotricien, autant dire mission
impossible quand on a des milliers, voire des dizaines de milliers d’enfants à
suivre !
Les médecins scolaires devraient
suivre les enfants porteurs de maladies chroniques, les allergiques, les
diabétiques, les drépanocytaires (porteurs d’une maladie héréditaire du sang)
ou autres nécessitant des soins à l’école ou la prise de médicaments, former
les enseignants et les animateurs. Ils devraient voir les enfants des classes
spécialisées non-francophones, le plus souvent sans couverture sociale,
arrivant de pays sinistrés par la guerre ou la misère, et aussi les enfants en
situation de handicap qui ont besoin de soins et d’adaptation en classe.
Les textes prévoient aussi de
faire de la prévention contre les grands fléaux tels que le tabagisme,
l’obésité, l’alcoolisme ou les addictions diverses, de voir les adolescents
avant une orientation professionnelle pour éviter toute contre-indication, notamment
le travail sur les machines dangereuses. Sans parler de tous les cas d’urgence,
comme les situations de maltraitance, les épidémies de teignes, gales et autres
maladies de la misère.
Toutes ces missions utiles et
nécessaires sont irréalisables sans des effectifs et des moyens
supplémentaires. Non seulement le gouvernement n’applique pas ses propres
textes, mais il laisse toute la médecine scolaire se dégrader. Cela s’appelle
de la non-assistance à l’enfance.
Correspondant
LO (lutte ouvrière n°2572)
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire