Migrants :
nos frères en humanité, nos frères de classe
En
revanche, il ne faut pas être dupe des dirigeants européens. Derrière leurs
discours humanistes et l’inflexion de leur politique en faveur des Syriens, il
y a toutes sortes de calculs sordides.
En
ouvrant les portes de son pays, Merkel passe presque pour une sainte. Mais elle
ne l’a fait que parce que l’afflux d’une nouvelle main d’œuvre arrangera bien
le patronat allemand ! Quant à Hollande, il se sert de cette vague de
sympathie non pas pour ouvrir les frontières mais pour justifier les frappes
aériennes contre Daesh en Syrie, c’est-à-dire pour renforcer sa politique
guerrière !
« C’est
l’honneur de la France que d’avoir toujours accueilli les persécutés »,
a-t-il déclaré lors de sa conférence de presse, avant d’annoncer l’accueil de
24 000 Syriens sur les deux prochaines années. Comparé aux 20 000 arrivés sur
ce seul week-end en Allemagne, Hollande met « l’honneur de la
France » bien bas ! Bien plus bas que ses prédécesseurs qui avaient
accueilli 450 000 réfugiés espagnols en 1939 et 130 000 boat people vietnamiens
et cambodgiens à partir de 1979.
Le drame
migratoire n’est pas le fruit d’une catastrophe naturelle. Il est le fruit de
la politique impérialiste des grandes puissances qui consiste à piller les pays
les plus pauvres de la planète en exploitant leurs richesses naturelles ou en
les étranglant par l’endettement au profit de la grande bourgeoisie. Il est le
fruit de leurs manœuvres, de leurs rivalités politiques, de leurs guerres.
Les
dirigeants européens ont contribué à transformer une partie de la planète en
enfer pour les populations et ils font tout pour qu’elles ne puissent pas en
partir. En transformant l’Europe en forteresse, ils portent la responsabilité
des milliers de morts, noyés en Méditerranée, asphyxiés dans les camions ou
électrocutés aux abords du tunnel de la Manche.
Et cette
politique macabre va continuer. Car si les Syriens auront officiellement droit
à l’accueil, les migrants dits « économiques » auront droit aux
barbelés, aux matraques, aux expulsions. Comme si être tué par la misère était
plus acceptable qu’être tué par les bombes ! Comme si les millions d’enfants,
de femmes et d’hommes condamnés à la misère ne faisaient pas aussi partie des
persécutés !
Dans
toute cette affaire, où sont les intérêts des travailleurs ? Sûrement pas
de rejeter les migrants. Et ce n’est pas qu’une question d’humanisme. Il en va
de l’intérêt général de la classe ouvrière. Il en va de son unité. Car les
migrants font ou feront partie de la classe ouvrière. Même si une fraction des
réfugiés avait des vies de médecin, d’avocat ou de commerçant dans leur pays,
c’est dans leur immense majorité une vie de prolétaire qui les attend, une vie
d’exploitation, notre vie. Et les travailleurs ont intérêt à s’en faire des
alliés.
Les
migrants demandent la liberté de circuler et de s’installer en Europe. La
classe ouvrière de France se doit de porter cette revendication qui vaut pour
tous les travailleurs.
Beaucoup
se demandent s’il est possible d’accueillir dignement les migrants dans le
contexte de crise que l’on connaît. Mais le chômage, la précarité, les bas
salaires ne dépendent pas de la venue des immigrés. Ils dépendent du rapport de
force avec la bourgeoisie car la misère n’existe en France et en Europe que
dans la mesure où on laisse l’argent s’accumuler dans les mains d’une minorité.
Il y a
six millions de personnes qui cherchent aujourd’hui du travail, cela n’a rien à
voir avec l’arrivée des migrants. Et tous ceux qui passent leur temps à montrer
du doigt les immigrés feraient mieux de s’en prendre aux licencieurs.
Combien
de travailleurs pourraient vivre avec les 14 millions du parachute doré du PDG
d’Alcatel ? En réservant ne serait-ce que la moitié des profits des grands
groupes capitalistes à la création d’emplois, ce sont des centaines de milliers
de chômeurs qui auraient un travail. Avec les dizaines de milliards prévus pour
les Jeux Olympiques, on pourrait construire des dizaines de milliers de
logements.
Mais pour
cela, il faudrait que les travailleurs rejettent cette fausse évidence selon
laquelle « on ne peut pas accueillir toute la misère du monde » pour
proclamer « qu’on ne veut plus se saigner pour la bourgeoisie ».
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