Les
étrangleurs du peuple grec
Il a suffi que Tsipras annonce la
tenue d’un referendum permettant aux Grecs de s’exprimer sur les sacrifices
exigés en échange d’argent frais pour que les créanciers considèrent les
négociations terminées. « Puisque le gouvernement grec ne veut pas signer,
l’Europe ne prêtera plus un euro à la Grèce », ont-ils expliqué.
Cette
décision est déjà lourde de conséquences : vent de panique bancaire en Grèce,
qui a forcé le gouvernement à fermer les banques toute la semaine ; places
boursières dans le rouge ; risques d’emballement spéculatif et d’un nouveau
chaos financier. Mais si les créanciers ne reviennent pas sur leur décision
dans les heures qui viennent, ce sera pire.
La Grèce,
qui doit rembourser 1,6 milliard d’euros au FMI le 30 juin au soir, sera poussée
à la faillite. Rapidement, elle sera aussi incapable de payer les salaires des
fonctionnaires, les retraites et de faire face à ses dépenses intérieures… sauf
à créer sa propre monnaie et à sortir de la zone euro.
Les
dirigeants européens disent ne pas souhaiter une telle issue. Et tous de jurer
qu’ils cherchent un compromis. Mais ils continuent de mettre le couteau sous la
gorge du peuple grec.
Et tout
cela pourquoi ? Pour payer une dette à laquelle le peuple grec est étranger !
Pour payer une dette qui n’est rien d’autre que le fruit du délire de la
finance internationale !
En Grèce,
l’endettement s’est envolé avec la crise de 2008, pour les mêmes raisons que
dans tous les autres pays : parce qu’il a fallu sauver les banquiers de leurs
propres agissements.
Même
si la Grèce était l’un des États les plus fragiles de la zone euro, les banques
se sont jetées sur les obligations d’État grecques. Mais plus elles doutaient
de sa solvabilité, plus elles lui imposaient des taux d’intérêt usuraires,
faisant plonger le pays dans la spirale infernale de l’endettement.
C’est un
piège bien connu des ménages surendettés ou des collectivités saignées par des
prêts toxiques. Au départ, on s’endette pour une petite somme. Comme elle
s’avère impossible à payer dans les temps, on réemprunte pour la rembourser à
des taux d’intérêt plus élevés et on se retrouve pris dans une spirale
infernale où, pour avoir emprunté 10, il faut rembourser 50 ou 100.
Mais
combien de plans d’austérité les Grecs ont-ils subis pour que le pays, ruiné
par les financiers, soit mis sous perfusion de l’Europe ? Combien de
licenciements et de souffrances les travailleurs ont-ils endurés pour payer
leur dîme aux financiers ?
Et comme
si, dans ces négociations, Tsipras n’avait pas fait son lot de concessions !
Contre ses engagements électoraux, Tsipras avait concédé de nouvelles
privatisations, des reculs des droits à la retraite et l’augmentation de la
TVA. Quelles concessions ont fait les créanciers ? Aucune.
Ceux-ci
expliquent avoir fait une « une offre exceptionnellement généreuse de 15
milliards ». Mais ces 15 milliards seront immédiatement engloutis dans les
remboursements, avec intérêts, des prêts du FMI puis de la BCE. La Grèce n’en
verra pas un seul euro, mais le jeu d’écriture alourdira la dette grecque de 15
milliards. Et ils appellent ça « aider la Grèce ».
Quant à
la façon dont tous les grands démocrates ont assimilé le recours au referendum
à un coup de force, elle est édifiante. Dès que le vote permet à la population
de s’exprimer sur ce qui l’intéresse concrètement au premier chef, ces Messieurs
crient à la provocation. Ce serait pourtant cela la vraie démocratie, et pas ce
cirque électoral auquel on nous invite régulièrement et qui consiste à voter
pour des gens qui marcheront sur leurs promesses aussitôt élus.
La Grèce
n’est pas poussée à la faillite pour 1,6 milliard, ni même pour 5 ou 10. Jamais
la Grèce ne pourra payer sa dette, tous les créanciers le savent, mais c’est
pour eux une question politique.
À travers
la Grèce, les représentants de la bourgeoisie signifient à tous les peuples
qu’ils doivent accepter de se saigner pour les financiers. Ils signifient que
le paiement des intérêts est au-dessus de tout, au-dessus même de la nécessité
de se nourrir, se loger et se soigner.
Au-delà
de la Grèce, ces événements montrent qu’il est vain de chercher à raisonner ou
à implorer ceux qui sont les chiens de garde du capital. Ils ne cherchent pas à
négocier avec les peuples, ils exigent leur soumission totale à la loi du
capital. Sauf à les renverser, il n’y aura pas d’issue pour les exploités.
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