Un article de notre hebdomadaire de la semaine passée
Clichy-sous-Bois
: un drame sans coupable ?
Le tribunal correctionnel de
Rennes a prononcé lundi 18 mai la relaxe définitive des deux policiers
poursuivis dans le drame de Clichy-sous-Bois d’octobre 2005. Deux adolescents
de 15 et 17 ans avaient alors été électrocutés dans un transformateur EDF où
ils s’étaient réfugiés pour échapper à la police. Un troisième jeune avait été
très grièvement brûlé. Près de dix ans après, la justice a relaxé ces deux
policiers poursuivis pour non-assistance à personnes en danger.
À l’époque,
l’indignation soulevée par ce drame avait mis les banlieues du pays en
ébullition pendant trois semaines et Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur,
avait eu recours à l’état d’urgence pour mettre fin aux émeutes. Mais il
n’avait pas pu empêcher que deux policiers soient renvoyés devant la justice,
l’un qui était sur les lieux du drame et une autre qui, depuis le commissariat
de Livry-Gargan, recevait les appels radio des patrouilles sur place. D’abord
jugée en Seine-Saint-Denis, au tribunal de Bobigny, l’affaire a été délocalisée
à Rennes, pour que la justice puisse faire son travail en toute sérénité,
paraît-il.
Mais, pas
plus à Rennes qu’à Bobigny, la non -assistance à personne en danger n’a été
reconnue, le souci principal des juges étant, comme le disait le président du
tribunal de Rennes à l’occasion d’un procès, de « ne pas faire le procès de
la police nationale, des émeutes qui ont secoué la France ou des interventions
politiques des uns et des autres ». Les magistrats qui viennent de décider
la relaxe définitive ont repris les mêmes arguments et décidé que les deux
policiers n’avaient aucune responsabilité dans le drame. La policière en poste
au commissariat ne connaissait pas la ville et ignorait l’existence d’un site
EDF. Quant au policier sur place, qui avait dit à la radio « S’ils rentrent (dans
le transformateur), je ne donne pas cher de leur peau », il n’aurait pas
su que les jeunes étaient déjà entrés sur le site EDF… puisqu’il utilisait le
conditionnel « si » !
À
l’annonce de ce jugement honteux, des cris de colère ont éclaté dans la salle,
les familles dénonçant « dix ans d’impunité policière », « on ne
pardonne pas » et « honte à vous ». À l’époque des faits, Sarkozy
avait affirmé que toute la vérité serait faite. Dix ans après, la justice a
choisi de blanchir, même contre toute évidence, les policiers. Pour « ne pas
faire le procès de la police nationale », il n’y aura pas de procès tout court.
Cédric
DUVAL
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