lundi 8 décembre 2014

Melilla : « On est là pour chercher l'avenir de nos enfants ». Un article de Lutte Ouvrière de cette semaine. En vente dans de nombreux kiosques dont celui de la librairie Le Presse-papier à Argenteuil



Melilla : « On est là pour chercher l'avenir de nos enfants »

Un reportage, tourné sur la côte nord-est du Maroc et diffusé samedi 29 novembre sur France 2, a montré un aspect du drame quotidien de l'émigration.
« On est là pour chercher l'avenir de nos enfants », dit Kamara, 23 ans, originaire de Guinée. Depuis son pays natal, il a parcouru plusieurs milliers de kilomètres avant d'arriver au Maroc pour s'approcher de Melilla, enclave de l'Espagne en terre marocaine. Il veut rejoindre ce dont il dit rêver depuis son enfance : l'Europe, où il voudrait trouver un travail.
Pour cela, il va lui falloir franchir le rideau de fer que l'Union européenne (UE) a fait construire entre le Maroc et Melilla. C'est un mur haut de 7 mètres sur 12 kilomètres de long, surmonté de caméras et de détecteurs de mouvement et de bruits. Un mur fait d'un triple système de clôtures de fer constituées de barbelés, eux-mêmes hérissés de lames de rasoir dont l'orientation par rapport aux barbelés change au fil du temps ! Mais, comme le dit un migrant : « À chaque fois qu'ils trouvent une solution, nous aussi on trouve une solution, sans ça, tu ne peux pas monter. »
Regroupés dans des campements de fortune au milieu de la forêt, des centaines d'Africains fabriquent donc des crochets adéquats pour se cramponner aux hautes barrières et ils équipent de boulons les semelles de leurs sandales en plastique (cinq boulons, précise un homme en montrant la chaussure), pour escalader les barbelés tranchants.
Au jour J, tous ensemble, par centaines, les migrants se jettent sur le rideau de fer. C'est le nombre, disent-ils, qui augmente leurs chances de passer et d'échapper à la police. De l'autre côté, ils seront en territoire espagnol, territoire de l'Union européenne où, après avoir attendu des semaines, des mois, voire des années dans des centres d'accueil, certains obtiendront l'autorisation de rester.
Deux mille Africains auraient ainsi réussi à passer cette année. Les autres, mains, jambes, ventre, visage entaillés par les lames de rasoir ou frappés par les matraques policières, sont reconduits en bus à l'autre bout du Maroc. Pour la plupart, ils reviendront, pour tenter une nouvelle fois l'escalade. Ils sont ainsi des milliers prêts à tout risquer - leur intégrité physique voire leur vie. Car tout vaut mieux que les conditions d'existence auxquelles ils sont promis dans leur pays d'origine.
Ce n'est pas le scénario d'un film catastrophe, c'est la réalité barbare et cruelle de la société capitaliste.
                                                                            Sophie Gargan

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