Melilla
: « On est là pour chercher l'avenir de nos enfants »
Un
reportage, tourné sur la côte nord-est du Maroc et diffusé samedi 29 novembre
sur France 2, a montré un aspect du drame quotidien de l'émigration.
« On est
là pour chercher l'avenir de nos enfants », dit Kamara, 23 ans, originaire de
Guinée. Depuis son pays natal, il a parcouru plusieurs milliers de kilomètres
avant d'arriver au Maroc pour s'approcher de Melilla, enclave de l'Espagne en
terre marocaine. Il veut rejoindre ce dont il dit rêver depuis son enfance :
l'Europe, où il voudrait trouver un travail.
Pour
cela, il va lui falloir franchir le rideau de fer que l'Union européenne (UE) a
fait construire entre le Maroc et Melilla. C'est un mur haut de 7 mètres sur 12
kilomètres de long, surmonté de caméras et de détecteurs de mouvement et de
bruits. Un mur fait d'un triple système de clôtures de fer constituées de
barbelés, eux-mêmes hérissés de lames de rasoir dont l'orientation par rapport
aux barbelés change au fil du temps ! Mais, comme le dit un migrant : « À
chaque fois qu'ils trouvent une solution, nous aussi on trouve une solution,
sans ça, tu ne peux pas monter. »
Regroupés
dans des campements de fortune au milieu de la forêt, des centaines d'Africains
fabriquent donc des crochets adéquats pour se cramponner aux hautes barrières
et ils équipent de boulons les semelles de leurs sandales en plastique (cinq
boulons, précise un homme en montrant la chaussure), pour escalader les
barbelés tranchants.
Au jour
J, tous ensemble, par centaines, les migrants se jettent sur le rideau de fer.
C'est le nombre, disent-ils, qui augmente leurs chances de passer et d'échapper
à la police. De l'autre côté, ils seront en territoire espagnol, territoire de
l'Union européenne où, après avoir attendu des semaines, des mois, voire des
années dans des centres d'accueil, certains obtiendront l'autorisation de
rester.
Deux
mille Africains auraient ainsi réussi à passer cette année. Les autres, mains,
jambes, ventre, visage entaillés par les lames de rasoir ou frappés par les
matraques policières, sont reconduits en bus à l'autre bout du Maroc. Pour la
plupart, ils reviendront, pour tenter une nouvelle fois l'escalade. Ils sont
ainsi des milliers prêts à tout risquer - leur intégrité physique voire leur
vie. Car tout vaut mieux que les conditions d'existence auxquelles ils sont
promis dans leur pays d'origine.
Ce n'est
pas le scénario d'un film catastrophe, c'est la réalité barbare et cruelle de
la société capitaliste.
Sophie Gargan
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