PSA – Aulnay : après l'accord de fin de grève
La direction prise à son propre piège
Lorsque la direction de PSA Aulnay, le 29 mai, a accepté
d'étendre à l'ensemble des travailleurs de l'usine le protocole obtenu par les
grévistes, elle espérait désamorcer une situation qui l'inquiétait. Une fois de
plus, elle s'est trompée dans ses calculs...
Rappelons que, juste avant le week-end de
Pentecôte, la direction avait signé avec les grévistes un protocole mettant fin
à quatre mois de grève, où les travailleurs obtenaient, outre l'amnistie
totale, une prime supplémentaire de 20 000 euros en plus du plan
social et l'assurance, pour ceux qui le voulaient, d'être reclassés dans le
groupe.
Mais, dans les deux semaines qui ont
suivi, des centaines de discussions avaient lieu avec des travailleurs qui
n'étaient pas dans la grève, ou ne l'avaient pas faite en entier, à qui les
militants expliquaient que la seule voie pour obtenir les mêmes conditions
était de s'organiser et de se mobiliser. Lundi 27 mai, un nouveau
débrayage entraînait déjà plusieurs dizaines de travailleurs.
C'est pour essayer de désamorcer cette
situation que la direction a lâché tout de suite. Le nouveau DRH central de
PSA, celui-là même qui se répand dans la presse à longueur de journée pour
prétendre que les grévistes n'ont rien gagné, a dû annoncer le mercredi 29,
d'une voix blanche, que le protocole était ouvert à tous, et que les
volontaires auraient jusqu'au lundi 3 juin pour signer le protocole, être
licenciés, et toucher la somme maximale.
Aucune confiance dans la direction
Mais
ce que la direction n'avait pas prévu, c'est le nombre de travailleurs qui
allaient s'engouffrer dans la brèche ouverte par les grévistes. En effet il n'y
a plus que deux solutions pour les ouvriers : préférer le licenciement
tout de suite, avec plusieurs dizaines de milliers d'euros – parfois plus de
100 000 selon l'ancienneté –, ou croire dans les belles promesses de
reclassement de PSA, en risquant à la fin de se retrouver dehors quand même, à
la fermeture de l'usine, mais avec la somme minimale. Le choix est vite
fait ! Plus personne – certains chefs d'équipe compris – n'a la moindre
confiance en PSA, et chacun préfère compter sur lui-même pour retrouver du
travail plutôt que sur le patron.
Résultat : vendredi 31 mai au
soir, c'étaient plus de 850 ouvriers et chefs qui avaient signé la lettre
d'intention ! Vu le nombre de travailleurs qui sont déjà partis, cela
représente une immense partie des effectifs restants.
La direction, complètement dépassée par
l'ampleur de l'hémorragie, a très vite montré à quel point il est justifié de
ne pas lui faire confiance. Alors qu'elle s'était engagée à ne pas mettre de
conditions à l'obtention du chèque, elle a fait un virage à 180° pour dire que
maintenant, pour que l'accord soit valable, le candidat au départ devait
présenter un CDI ou un CDD de six mois ou un contrat d'intérim de trois mois
dans les huit jours ! Comme elle n'est pas assez stupide pour croire qu'un
ouvrier va trouver un CDI en 48 heures, cela ne signifie qu'une chose :
elle veut décourager les volontaires, ou les inciter à faire de faux contrats
de travail, pour pouvoir prétendre – pas vu, pas pris ! – qu'elle n'a pas
envoyé d'un coup près de mille ouvriers à Pôle emploi.
Bientôt les deux équipes rassemblées
Évidemment,
les signataires ne se sont pas fait avoir. Renforcés moralement par le soutien
et l'aide des militants qui ont fait quatre mois de grève, ils sont allés
demander des explications – expliquant à la direction, pour certains, qu'ils
n'avaient jamais fait grève, qu'ils ne s'étaient jamais syndiqués, mais que
cette trahison-là était celle de trop, et que c'était finalement les militants
de la CGT qui
avaient raison.
Le matin du 4 juin, la CGT appelait à une réunion
d'information. 250 travailleurs, soit la grande majorité de l'effectif
présent sont venus et ont voté leurs revendications : pas de critères pour
toucher les 20 000 euros supplémentaires, et un délai prolongé pour
ne pas avoir à réfléchir dans la précipitation à une décision aussi grave. Ils
sont ensuite allés accompagner une délégation pour présenter ces revendications
à la direction, en manifestation.
Pour l'instant, la direction campe sur ses
positions. Mais elle sait qu'elle a, de nouveau, un gros problème sur les bras.
De plus en plus de travailleurs comprennent qu'ils ne peuvent compter que sur
eux-mêmes pour se sortir du bourbier où PSA les a mis. Et certains ont bien des
raisons d'être motivés : de vieux ouvriers par exemple, qui sont à
quelques mois ou quelques semaines de la retraite, verraient leur indemnité
passer de 45 000 à 110 000 euros en acceptant le licenciement !
Ce ne sera qu'un juste retour de bâton pour un patron qui, depuis des années,
empêche les anciens de partir en préretraite et les tue à petit feu sur les
chaînes.
Lundi 10 juin, l'ensemble de l'usine
doit passer en une équipe – alors que l'agitation des jours précédents n'a
touché que l'équipe du matin, celle d'après-midi étant au chômage. Les
travailleurs ont décidé, lors de l'assemblée du 4 juin, de consacrer toute
la semaine à contacter les camarades de l'autre équipe, et à persuader les hésitants
de venir le lundi suivant à une grande assemblée générale regroupant les deux
équipes.
L'ambiance n'est pas encore explosive,
mais les travailleurs veulent des garanties. Beaucoup se rendent bien compte
que le seul langage que la direction comprend est celui de la confrontation et
de l'organisation collective. Rien ne dit que le patron n'en fera pas de
nouveau l'expérience dans les semaines qui viennent.
Correspondant LO
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