Macron et
l’Algérie : mentalité colonialiste
06 Octobre 2021
Le 30 septembre, Macron a tenu
sur l’Algérie des propos allant de la critique contre son gouvernement et
contre les Algériens accusés de haïr la France, à la négation de l’existence
d’une nation algérienne au 19e siècle.
Que Macron se soit expliqué
ensuite sur ses propos ne change rien. Cette envolée aux relents coloniaux
s’inscrit dans une opération politique qui vise à reconnaître du bout des
lèvres certains crimes commis par la colonisation française, pour tenter de
tourner la page, tout en continuant à la justifier, de même que la guerre
d’Algérie.
Avant ces propos, Macron avait
promis une loi « de reconnaissance et de réparation » en faveur des
harkis, ces Algériens qui, durant la guerre menée par la France pour s’opposer
à l’indépendance, ont combattu le FLN dans les rangs de l’armée coloniale. En
1962, la majorité d’entre eux ont été abandonnés sur place, par ordre de l’État
français, et certains ont été massacrés. Quant à ceux qui ont pu rejoindre la
France, ils ont été parqués dans des camps d’internement, dans des conditions
scandaleuses. Seule une révolte des enfants de harkis, en 1975, a commencé à
mettre fin à cette situation. Le drame des harkis et de leurs familles fait
partie intégrante des crimes commis par l’État français.
Mais Macron se moque du sort des
harkis et de leurs descendants. Cette « reconnaissance » s’inscrit
dans son opération visant à escamoter les responsabilités de l’impérialisme
français, en déplaçant la question de la colonisation de l’Algérie par la
France vers celle de la mémoire des victimes et de la réconciliation entre les
peuples. Comme si les 130 ans de colonisation et la guerre infâme menée durant
huit ans étaient le résultat des haines entre les populations, de la violence
de celles-ci, et non celui d’une politique d’État pour la défense des intérêts
de la puissance coloniale.
Macron a peaufiné sa mise en
scène lors d’un repas regroupant 18 jeunes concernés par cette guerre coloniale
du fait de leur histoire familiale, allant d’un descendant du général Salan –
un des dirigeants de l’armée en Algérie, puis de l’OAS – à l’un des descendants
d’un avocat algérien assassiné par l’armée française. C’est lors de ce repas
qu’il a tenu les propos qui aujourd’hui font scandale.
Bien entendu, cette colonisation,
avec la présence d’une forte communauté d’Européens en Algérie durant des
décennies, a laissé des séquelles dans les populations. En Algérie, des
centaines de milliers de personnes ont des parents, des grands-parents qui ont
subi les violences coloniales, la torture, les assassinats. En France, dix
millions de personnes ont aussi un lien avec cette colonisation, parce que leur
famille était en Algérie, que leurs parents étaient soldats pendant la guerre,
ou bien qu’ils sont enfants de combattants algériens ou de harkis.
Si la colonisation a ainsi marqué
l’histoire des deux pays, de part et d’autre de la Méditerranée, c’est qu’elle
a été un crime contre les peuples qui s’inscrivait dans le développement du
capitalisme européen et de sa domination sur le monde, ses richesses et les
marchés. La fin des colonies n’a cependant pas signifié la fin de cette
domination économique et politique. Les États impérialistes, comme l’État
français, au nom des intérêts de leurs capitalistes, voudraient continuer à
dominer les anciennes colonies, qu’ils considèrent comme leur pré carré.
L’armée française qui s’est illustrée en Algérie, entre autres par la pratique
de la torture est toujours présente en Afrique.
Les propos de Macron, insultants
pour les Algériens, ont déclenché avec l’Algérie une crise, qu’il essaie de
régler au nom de la réconciliation. Mais reconnaître les crimes commis durant
la colonisation, parfois par des dirigeants ou des militaires toujours vivants,
reviendrait à reconnaître les crimes de l’État dans son ensemble et à mettre en
lumière leurs causes. Macron, en serviteur de la bourgeoisie, s’y refuse. Et au
fond, quand il profère des propos pour plaire aux réactionnaires racistes et
nostalgiques des colonies, c’est sans doute là qu’il est le plus sincère.
Marion AJAR (Lutte ouvrière n°2775)
On
nous informe, à Argenteuil prochainement
Invitation
Soirée-débat autour de l’ouvrage collectif
« « Réparer l’injustice : l’Affaire Maurice Audin », une
soirée organisée par Sous les couvertures, avec Michèle AUDIN et Nathalie FUNÈS
Maurice
et Josette AUDIN
Le jeudi 21 octobre
A 19 heures 30
Cinéma Jean Gabin
Parc de la mairie
13-14 bd Léon Feix à Argenteuil
En présence de Michèle AUDIN et Nathalie FUNÈS
Dominique Mariette, de Sous
les couvertures, animera l’entretien