Le
Pen : bien dans le système
Interrogée à plusieurs reprises à
l'approche du congrès du Front national, Marine Le Pen ratisse large. Dans une
interview parue dans le Journal du dimanche du 2 novembre, elle se déclare «
d'accord sur l'essentiel » avec son père, en même temps qu'elle envoie des
signaux en direction de l'électorat de l'extrême gauche, déclarant que celle-ci
« fait souvent le bon constat mais ne va pas jusqu'au bout de sa logique ».
Citer
Marx ne gêne pas Marine Le Pen : elle l'a fait dans un livre que l'on trouve
sur son site Internet. Mais, si elle est prête à prendre la main du diable
marxiste, c'est évidemment pour mieux lui tordre le cou. Le titre de son livre,
loin du « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous » de Marx, proclame tout
l'opposé : Pour que vive la France.
Le Pen y
montre du doigt, Marx à l'appui, le capital financier et l'existence d'une
armée de réserve du capital que constituent les chômeurs. Mais, plus loin, elle
se prononce pour organiser... la liberté d'entreprendre, dont le capital financier
et le chômage sont les deux sous-produits. Et non seulement Le Pen, loin de
s'opposer au capitalisme, est un fervent défenseur des grands bourgeois, mais
elle est viscéralement hostile aux luttes des travailleurs contre la dictature
du capital sur la société.
Contre l'Union européenne et
contre l'ultralibéralisme, l'extrême gauche est d'accord avec le Front
national, prétend-elle, en ajoutant que seul son parti va jusqu'au bout, en se
prononçant pour le rétablissement des frontières à l'intérieur de l'Union
européenne et contre les immigrés ! En réalité, quand elle parle de l'extrême
gauche, il s'agit de courants comme celui du PCF et de Mélenchon qui, en
entonnant souvent des discours nationalistes et antieuropéens, prêtent le flanc
à cette récupération par le Front national. Aux dernières élections européennes
par exemple, Mélenchon a attribué la régression sociale à l'euro, à l'Union
européenne, à l'Allemagne, à l'ouverture des frontières, à la mondialisation,
ce qui revient à dédouaner les capitalistes dès lors qu'ils sont français.
Entre les propos contre la mondialisation d'un Mélenchon et ceux du Front
national contre le mondialisme et les travailleurs immigrés, le terrain est
glissant.
Le
mouvement ouvrier, qu'il s'agit de faire revivre, est à l'opposé de ces idées
chauvines. Il doit miser sur les luttes de la classe ouvrière, par-delà les
nationalités et les frontières, contre les capitalistes et les gouvernements
qui les servent, qu'ils soient dirigés par Sarkozy, Hollande ou... par une Le Pen.
D'un
point de vue politicien, Le Pen, contrairement au PS et à l'UMP, n'a rien à
parier sur la dissolution de l'Assemblée. Elle est même prête à se faire
admettre de plain-pied dans la gestion des affaires de la bourgeoisie, en tant
que Premier ministre de Hollande. La candidate « anti-système » est en plein
dedans. Jean
Sanday
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