Qui sème le vent récolte la colère
Au
Sri-Lanka, dans la capitale Colombo, les manifestants ont pris
d’assaut la résidence du président Rajapaska, le forçant à fuir. Ce dernier et
son premier ministre ont promis de démissionner. À voir.
Immédiatement, ce sont les dirigeants
américains qui sont montés au créneau. Que des manifestants opèrent de la sorte
avec leurs dirigeants est toujours pour eux de mauvaise augure, pour les
dominants du pays bien sûr mais surtout par l’exemple qui est donné à tous les
peuples de la région et pour l’inquiétude créée parmi les dominants du monde.
Leur refrain actuel : contre la menace du chaos, la « stabilité économique
à long terme » qui puisse calmer « le mécontentement du peuple ».
Voilà
ci-dessous, ce que nous écrivions il y a deux mois
Sri Lanka
: de la crise à la faillite
18 Mai 2022
Bousculée par des semaines de
manifestations, la famille Rajapaska, qui contrôle le sommet de l’État au Sri
Lanka, a été obligée de sacrifier le grand frère, Mahinda.
Le 9 mai, celui-ci a démissionné
de son poste de Premier ministre, pour tenter de sauver la présidence de son
cadet, Gotabaya. Plusieurs autres membres du clan avaient déjà démissionné de
leur ministère ces dernières semaines.
L’ascension des Rajapaska tient à
leur rôle dans la répression que l’armée a exercée contre la minorité tamoule,
mettant fin dans le sang à la rébellion des Tigres en 2009. Mahinda, président
de 2005 à 2015, avait dû céder sa place à l’opposition après avoir perdu les
élections. Mais en 2019, profitant de l’émotion suscitée par des attentats
islamistes – 258 morts et près de 500 blessés – ce clan avait repris le
pouvoir, jamais avare de démagogie nationaliste flattant la majorité
cinghalaise et bouddhiste.
Depuis, le Sri Lanka s’enfonce
dans une crise économique sans solution. La pandémie, renforçant l’effet des
attentats, l’a privé des ressources du tourisme. Le pays s’est endetté
considérablement et n’a plus de réserves de devises. L’accélération de
l’inflation mondiale a rendu les importations hors de prix : la roupie sri
lankaise a perdu 30 % de sa valeur en mars. L’électricité ne fonctionne
plus que de manière intermittente, les malades ne trouvent plus de médicaments,
ou bien hors de prix. Même les chaussures sont considérées comme des biens
non-essentiels dont l’importation est stoppée. Le gouvernement a cru bon de
maquiller l’impossibilité financière d’importer des engrais chimiques, dont les
prix s’envolent sur les marchés internationaux, en une bonne action pour
l’environnement. Mais la production agricole a chuté, la disette est là et dans
la population pauvre on saute des repas.
Depuis un mois et demi, les
manifestations sont quotidiennes dans la capitale, Colombo, demandant le départ
du président. Même le clergé bouddhiste, qui avait soutenu le nationalisme
violent des Rajapaska, s’est retourné contre eux et s’est montré dans la rue.
Les manifestants, repoussés par la police lorsqu’ils essayaient d’atteindre le
palais présentiel et les ministères, ont incendié les maisons de certains
ministres.
Le 8 mai, les Rajapaska ont
mobilisé leurs partisans, qui ont attaqué les protestataires
antigouvernementaux à coups de bâtons, accompagnés par les gaz lacrymogènes de
la police. Deux députés ont tiré sur des manifestants et ont fait des morts. Le
couvre-feu a été décrété sur toute l’île, neuf personnes sont mortes et 300 ont
été blessées, mais le Premier ministre a quand même dû jeter l’éponge, après
avoir essayé en vain de convaincre l’opposition de rejoindre son gouvernement
pour le stabiliser. Dès que la place a été libre, les politiciens de
l’opposition ont formé un nouveau gouvernement, sous l’autorité affaiblie du
président Gotabaya Rajapaska.
Le nouveau Premier ministre,
Ranil Wickremesinghe, est un cheval de retour qui gouverne pour la quatrième
fois. Au vu de la déconfiture économique, il n’a pu que promettre des
sacrifices à la population, annonçant : « Les deux mois à venir
seront les plus difficiles de nos vies », la crise économique « va
aller de pire en pire avant une amélioration ». Le 16 mai, il a dû
avouer qu’il n’y avait plus qu’une journée de stock de carburant. Quatre
pétroliers ont été financés par une ligne de crédit d’urgence débloquée par
l’Inde voisine mais, quand ils accosteront, le sursis ne sera que de quelques
jours. Avec son ministre de l’Économie, Wickremesinghe a supplié la population
d’arrêter de faire la queue aux stations-service, où les gens se rencontrent et
d’où partent des manifestations spontanées. Impuissant, le nouveau gouvernement
a indiqué qu’il allait imprimer plus de billets de banque, tout en
reconnaissant que cela accélérerait l’inflation.
Il voudrait en finir avec les
manifestations et l’instabilité politique qu’elle provoque. Mais, pour
desserrer l’étau de la crise économique mondiale dans laquelle ce pays se
débat, la classe ouvrière et la population pauvre n’ont rien à attendre d’un
tel pouvoir politique.
Lucien DÉTROIT (Lutte ouvrière n°2807)
Les
prochaines permanences prévues.
-aujourd’hui
de 18 à 19 heures, centre commercial des Raguenets à Saint-Gratien ;
-Mardi 12
juillet, de 11 h.45 à midi 15, devant la boulangerie de la cité
Champagne ;
Et de 18
h.30 à 19 h. devant Monoprix.