La
drogue et ses trafics sont certes des fléaux sociaux. La délinquance l’est tout
autant. Il n’y a pour autant aucune raison d’accepter que certains éléments des
forces dites de « l’ordre» interviennent
avec violence loin de toute retenue, de toute compétence, sans la formation
nécessaire, et avant tout, en se conduisant aux antipodes du respect de la
dignité humaine. Lorsque l’on peut parler de « bavure policière », c’est
que cet ensemble d’obligations n’a pas été respecté.
Que s’est-il passé dans le quartier du
Val-Notre Dame d’Argenteuil vendredi dernier ?
Sur le sujet, pour information,
l’article du Parisien-95 paru hier.
Policiers et jeune blessés : que
s’est-il réellement passé lors du contrôle qui a dégénéré à Argenteuil ?
>Île-de-France
& Oise>Val-d'Oise|Julie
Ménard| 08 janvier 2018, 21h21 | MAJ : 08 janvier 2018, 23h01 |14
Une information judiciaire a été
ouverte ce lundi après le contrôle de police qui a dégénéré vendredi. Le procès
en comparution immédiate n’a pas eu lieu alors que plusieurs versions
s’opposent.
La comparution immédiate n’aura
finalement pas eu lieu, ce lundi, au tribunal correctionnel de Pontoise. Les
avocats des deux jeunes poursuivis pour avoir violemment résisté à un contrôle de police ce vendredi dans la rue de la
Justice à Argenteuil, sont parvenus à obtenir l’annulation de la procédure en
comparution immédiate et l’ouverture d’une information judiciaire. Un juge
d’instruction va donc être nommé pour tenter de faire toute la lumière sur ce
qui s’est passé. Ce lundi soir, les deux jeunes attendaient de savoir s’ils
étaient ou non remis en liberté.
D’après les dépositions des
quatre policiers présents ce vendredi à Argenteuil, Wahel, 21 ans, et Aymen, 18
ans, auraient proféré menaces et insultes à leur encontre. Aymen, le bras cassé
et qui présente 42 jours d’incapacité de travail (ITT), aurait également porté
des coups à deux des agents. Une policière stagiaire a été blessée à la main et
à l’œil, lui occasionnant 42 jours d’ITT, un adjoint de sécurité s’est vu
prescrire 10 jours d’ITT et porte une minerve.
La patrouille serait intervenue
vers 17 heures pour contrôler trois individus à bord d’une voiture. La fouille
qui s’ensuit serait due à l’odeur de cannabis qui s’en échappe. Lors de la
palpation, les faits auraient dégénérés et virent à la rebellion alors que les
policiers découvrent de petites poches de plastiques vides et une balance.
Mais plusieurs témoignages ne
livrent pas la même version des faits que les policiers. Ce qui a amené Mes
Alimi et Brengarth, avocats de Aymen et Wahel, à réclamer un complément
d’enquête. « La justice part du principe que les témoignages des fonctionnaires
sont des preuves absolues alors que le débat est bien plus complexe que cela »,
assène Vincent Brengarth. « Il y a au moins une dizaine de personnes présentes
dans cette salle capables de fournir des témoignages contraires à ceux des
policiers, enchaîne Arie Alimi. Nous pensons que la policière a été blessée par
son coéquipier. Mais les agents ont refusé de répondre à mes questions lors de
la confrontation au commissariat ce dimanche. »
Hichem, 15 ans, raconte sa
version des faits du contrôle de police qui a dégénéré. LP/Ju.M.
C’est notamment ce qu’explique
Hichem,15 ans. Il était présent dans la voiture lorsque tout a commencé. Placé
en garde à vue, il a été libéré sans poursuite ce dimanche. « Ils ont contrôlé
le conducteur qui avait ses papiers en règle, explique l’argenteuillais.
Ensuite ils ont sorti de la voiture un petit de 8 ans qui était avec nous pour
le fouiller. Je leur ai demandé s’ils trouvaient ça normal de contrôler un
enfant. Alors ils m’ont demandé de sortir du véhicule. Ils m’ont insulté et
l’un des policiers m’a frappé avec sa matraque aux cuisses et au bras alors que
je ne me débattais pas. J’ai une fracture à l’épaule », poursuit le jeune homme
le bras en écharpe. « Il a porté plainte pour violences volontaires sur mineur
et non mineur, faux en écriture publique, faux témoignages et obstruction à la
manifestation de la vérité », précise Me Halimi, son avocat.
Sidahmed, le directeur du centre
de loisirs duquel sortaient les jeunes, dit aussi avoir vu l’enfant se faire
palper. « Quand le jeune a commencé à se faire matraquer, la policière s’est
interposée entre lui et son collègue, poursuit le directeur de la structure.
C’est à ce moment qu’elle a été blessée par les coups de matraque. Moi j’ai
demandé au policier fou de se calmer parce qu’il y avait des enfants et qu’il
tapait partout autour de lui. Il m’a répondu on est flics on fait ce qu’on
veut et m’a gazé. » Après avoir déposé plainte pour violences et menaces,
l’employé municipal a reçu le soutien de la mairie qui se portera partie
civile. « Je suis un fidèle défenseur de la police, mais aussi des agents de la
ville, justifie Georges Morthon, maire (LR) d’Argenteuil. J’aimerais que les
versions différentes soient confrontées pour comprendre ce qu’il s’est passé. »
Les
syndicats outrés par la tournure que prend l’affaire
« C’est hallucinant,
s’offusque Ludovic Collignon, secrétaire départemental d’Alliance. Si les
policiers doivent apporter des preuves à chaque fois qu’ils sont victimes de
violences on marche sur la tête ! Les jeunes étaient porteurs de produits
stupéfiants », targue-t-il. « Nous n’avons aucun doute quant aux déclarations
de nos confrères et nous les soutiendront jusqu’au bout, déclare Sandra
Hairaud, la secrétaire 95 du syndicat Unité Police . C’est inacceptable de
jouer sur le fait que ce soit une bavure policière. » « L’ouverture d’un
complément d’information judiciaire serait une bonne chose pour que toute la
lumière soit faite sur les événements », commente quant à elle sophie bar la
secrétaire départementale d’Unsa Police .
J.M.