La Cour suprême brésilienne a
tranché jeudi 5 avril, par six voix contre cinq : Lula doit aller en prison.
Après quelques politiciens, grands patrons et hauts cadres, l’ex-président
tombe victime du scandale Petrobras.
La raison de sa condamnation
n’est pas uniquement judiciaire. Lula est visé par une dizaine d’enquêtes, mais
les juges n’ont pas trouvé grand-chose de concret contre lui. Pourtant ils
l’ont condamné à douze ans de prison parce que l’un d’entre eux a estimé qu’un
appartement triplex que la société du BTP OAS possède sur la plage de Guaruja,
près de Sao Paulo, et qu’elle a rénové pour un million d’euros, lui était en
réalité destiné, pour récompenser ses interventions dans des marchés passés par
Petrobras, la société pétrolière nationale. Pourtant Lula n’est pas
propriétaire de cet appartement et ne l’a jamais habité.
La condamnation de Lula,
dirigeant du Parti des travailleurs, est avant tout politique. On comprend
l’indignation de ses partisans qui manifestent contre son incarcération, car
des dizaines de politiciens pris en flagrant délit, la main dans le sac,
restent gouverneurs d’État ou continuent de siéger au Sénat ou à l’Assemblée.
Ainsi Michel Temer, homme de droite qui ne doit son poste qu’au fait que Dilma
Rousseff, du même bord que Lula, a été destituée de la présidence, est aussi
visé par de graves accusations de corruption mais les députés ont refusé de le
mettre en accusation.
Dans une autre existence, il y a
quarante ans, Lula a été un ouvrier, un militant, un dirigeant de grèves qui
ont ébranlé la dictature. Même s’il n’a jamais été un révolutionnaire, il a
représenté pendant des années aux yeux des travailleurs brésiliens l’espoir
d’un monde meilleur, où militaires et patrons ne seraient plus tout-puissants.
Plus tard à la présidence, entre
2003 et 2010, Lula a bénéficié de la bonne santé de l’économie brésilienne pour
accorder aux pauvres des aides sociales un peu plus larges. Mais il a aussi
déçu des électeurs de son parti, le Parti des travailleurs, qui est arrivé au
pouvoir en promettant un gouvernement propre et transparent, et qui s’est
conduit comme ses prédécesseurs. Lula, puis Dilma Roussef ont gouverné en
alliance avec la droite.
Jamais les capitalistes du soja,
du sucre, de la viande, du pétrole, des mines de fer, de la déforestation, des
OGM, les grands propriétaires terriens, les banquiers n’ont autant fait de
profits que pendant la présidence de Lula, de 2003 à 2010. Lui-même a été
jusqu’à qualifier de héros les grands planteurs de canne à sucre, dont certains
continuent à pratiquer l’esclavage.
Le Parti des travailleurs s’est
usé au pouvoir. Et quand de grandes manifestations l’ont contesté à partir de
2013, la droite brésilienne y a vu l’occasion de prendre sa revanche. Dilma
Roussef a été destituée en 2016 et à présent Lula est en prison. Dans la
perspective de l’élection présidentielle d’octobre où il était favori, les
concurrents de Lula se réjouissent de le voir écarté.
Les milieux bourgeois et
réactionnaires n’ont jamais digéré qu’un homme issu du petit peuple ait pu
accéder à la présidence et veulent maintenant se venger. Mais s’ils peuvent
mettre Lula en prison, ils ne pourront pas mettre aussi facilement en cage les
aspirations des travailleurs et des couches populaires.
Vincent
GELAS (Lutte ouvrière n°2593)
Ce soir vendredi 13 avril
20 heures 30
Cercle Léon Trotsky
L’explosion sociale de mai-juin 1968
Salle de la Mutualité
Paris 5ème
Entrée : 3 euros
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