Assange :
pas extradé mais toujours pourchassé
06 Janvier 2021
La justice britannique a décidé,
pour des raisons de santé, de refuser la demande d’extradition vers les
États-Unis du fondateur de WikiLeaks, Julian Assange. La cellule qui lui est
réservée là-bas dans une prison de haute sécurité et son procès pour
espionnage, où il encourt 175 ans de prison, devront donc attendre.
Les États-Unis poursuivent Julian
Assange depuis dix ans. Ils lui reprochent d’avoir diffusé 700 000
documents classifiés concernant les activités militaires et diplomatiques de la
première puissance mondiale, notamment des informations sur ses exactions
militaires en Irak et en Afghanistan. Ainsi, plusieurs vidéos diffusées par
WikiLeaks montrent comment des hélicoptères américains y ont délibérément
mitraillé des civils et des journalistes.
Si les États-Unis n’ont pas
encore réussi à mettre la main sur Assange, ils lui font depuis 2010 chèrement
payer la diffusion de ces documents. Suite à des accusations pour délits
sexuels, qui ont été classées sans suite en 2017, Assange a été dès 2010 placé
en liberté surveillée à Londres. En 2012, sous la menace d’une extradition, il
s’est réfugié dans l’ambassade équatorienne. Il y est resté confiné pendant
sept ans, surveillé en permanence par les services anglais et américains,
menacé d’être interpellé sur le seuil et extradé. En 2019, le nouveau président
équatorien, Lenin Moreno, lui a retiré la nationalité qu’il avait obtenue
quelques mois auparavant de son prédécesseur, Rafael Correa. Sur invitation de
l’ambassadeur équatorien, la police anglaise l’a alors arrêté dans l’enceinte
du bâtiment et, bien que manifestement très malade, il a été écroué dans une
prison de haute sécurité, avec le régime réservé aux terroristes. En février
dernier, 117 médecins de 18 pays ont accusé le gouvernement britannique de
tortures et de privations de soins pouvant entraîner sa mort.
Assange n’est pas le seul à subir
cet acharnement. Ainsi Chelsea Manning, cette analyste militaire qui a fourni
des documents à WikiLeaks, a été emprisonnée sept ans, graciée et de nouveau
emprisonnée pour ne pas avoir voulu témoigner contre WikiLeaks. Face à des
hommes et des femmes qui ont rompu le secret dont ont aussi besoin les États
pour maintenir l’oppression sociale, la solidarité entre les plus puissants
d’entre eux ne faiblit jamais.
Ainsi, si la justice britannique
a décidé de ne pas extrader Assange, c’est seulement en fonction de sa santé
mentale et du risque de suicide, la juge rejetant explicitement les
considérations relatives à la liberté de la presse et d’expression et donnant
raison sur le fond aux États-Unis. En Europe, depuis 2012, aucun pays n’a voulu
lui accorder l’asile. En France, l’actuel ministre de la Justice, qui a déposé
pour Assange une demande d’asile quand il n’était encore qu’avocat, s’est bien
gardé de toute déclaration. Quant aux États-Unis, dont le futur président,
Biden, avait dans le passé qualifié Assange de « terroriste
high-tech », ils ont déjà annoncé qu’ils allaient faire appel de la
décision de la justice britannique.
Serge BENHAM (Lutte ouvrière
n°2736)
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