Maroc –
Al-Hoceima : les manifestations continuent sur les plages
La mobilisation ne faiblit
toujours pas à Al-Hoceima, dans le Rif marocain, malgré la répression
systématique. Ne pouvant plus se rassembler dans les rues de la ville, les
manifestants continuent à défier le régime en organisant des sit-in sur la
plage, dans la mer, ou en remplaçant les chansons traditionnelles à l’occasion
d’un mariage par leurs slogans.
Depuis la fin de l’année 2016,
les manifestations se succèdent pour réclamer la fin de la « Hogra », ce mépris
des autorités pour la population, qui a conduit à la mort horrible de Mouhcine
Fikri, un vendeur de poisson broyé dans une benne à ordures alors qu’il
cherchait à récupérer sa marchandise confisquée. Les manifestants, soutenus par
une large partie de la population d’Al-Hoceima et des villes alentour,
demandent des investissements pour créer des emplois, construire une université
et un centre hospitalier. Ils tiennent aussi à ce que cesse la militarisation
du Rif, mise en place par Hassan II après un soulèvement en 1958 et permettant
toujours un contrôle étroit de la région par l’armée.
À partir de la fin mai, la
répression s’est durcie, avec l’arrestation de nombreux manifestants.
Aujourd’hui, près de 240 d’entre eux font l’objet de poursuites judiciaires,
176 sont détenus. Le procès des principaux leaders, Nasser Zefzafi et Silya
Ziani, a commencé. Ils sont sous le coup d’accusations, comme l’atteinte à la
sécurité intérieure, l’entente avec l’étranger ou l’atteinte à la « sacralité »
de la monarchie.
Les rassemblements sont
systématiquement dispersés par les policiers ou les gendarmes, ce qui a
d’ailleurs conduit à des scènes cocasses quand les hommes en uniforme ont dû
pourchasser dans l’eau les manifestants des plages qui s’étaient éparpillés en
mer ! Les arrestations continuent elles aussi. La police a même osé convoquer
et interroger pendant quatre heures un petit garçon de 6 ans qui apparaissait
sur une vidéo invitant la population à manifester. Dans le même temps, des
proches du pouvoir appellent à la conciliation, les pelleteuses commencent à s’agiter
sur les chantiers en cours, des rumeurs font état d’une grâce royale à
l’occasion de la Fête du trône, le 30 juillet.
S’agit-il de dissensions à la
tête de l’État marocain, comme beaucoup le pensent ? En tout cas, les autorités
ont interdit les manifestations des 19 et 20 juillet. De leur côté, les
manifestants ne s’en laissent pas conter et continuent à se mobiliser comme ils
le peuvent pour exiger la libération des détenus qui ne font que réclamer une
vie digne.
Valérie FONTAINE (Lutte ouvrière n°2555)
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