Lafarge
et Daech : les affaires sont les affaires
La presse vient de révéler que le groupe
français Lafarge, numéro un mondial du ciment, avait fait fonctionner une
cimenterie en plein territoire syrien contrôlé par Daech, entre 2013 et 2014.
Pour
cela, Lafarge aurait négocié avec les dirigeants djihadistes pour acheter des
matières premières nécessaires au fonctionnement de son usine et permettre à
ses camions de se déplacer pour vendre son ciment.
En 2007,
Lafarge avait acheté à un industriel égyptien cette cimenterie pour 600
millions d’euros, ce qui représenterait le plus gros investissement étranger en
Syrie hors secteur pétrolier. On comprend pourquoi, une fois la guerre civile
enclenchée, le trust français a tenu à faire tourner son usine coûte que coûte.
Au fil de l’évolution des rapports de force et du front militaire, la zone où
se trouve la cimenterie a été tour à tour sous contrôle de l’armée syrienne
d’Assad, puis sous celui des milices kurdes, puis à partir de 2013… sous celui
de Daech.
Pour
entrer en relation avec ces derniers maîtres de la région, Lafarge a eu recours
à des intermédiaires mi-mercenaires, mi-hommes d’affaires. Mais si une chose
caractérise de tels groupes implantés partout sur la planète, c’est qu’ils
savent faire des affaires avec tout le monde. Si l’argent n’a pas d’odeur, le
profit a, lui, l’odeur de l’exploitation, de la corruption et des passe-droits.
Mais si
Lafarge a su s’adapter à Daech, Daech a aussi su s’adapter à Lafarge. Ainsi les
journalistes qui ont révélé l’affaire ont publié les extraits d’un
laissez-passer qu’un chauffeur de Lafarge devait présenter aux check-points de
Daech. Il ordonnait aux « frères combattants de laisser passer ce
véhicule aux checkpoints – qui transporte – du ciment de l’usine Lafarge
après un accord passé avec l’usine pour le commerce de ce matériau ».
Aujourd’hui,
après le reflux des milices islamistes, la cimenterie serait occupée par des
forces spéciales françaises et américaines… toujours avec l’accord de Lafarge.
Car il y a un principe sur lequel les armées impérialistes et les milices réactionnaires
sont d’accord : le respect de la propriété privée capitaliste.
Pierre
ROYAN (Lutte ouvrière n°2499)
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