dimanche 17 mars 2013

Michèle AUDIN à Argenteuil vendredi 22 mars à 18 heures 30 à l'auditorium de l'hôtel de ville

  Michèle Audin viendra parler de son livre "Une vie brève". Une vie brève, c'est celle de son père Maurice Audin, qui a disparu lorsqu'elle avait trois ans et demi et dont elle part à la recherche dans ce récit. Avant l'entretien et la dédicace, l'historienne Sylvie Thénault reviendra sur l'"affaire Audin". 
     Voici ce qu'écrivait Lutte Ouvrière dans un numéro de janvier 2009. 

                   Michelle Audin refuse la Légion d'honneur et l'amnésie d'État

Trois personnes viennent de refuser la Légion d'honneur que leur destinait le président de la République en ce début d'année.
     Ainsi les journalistes Françoise Fressoz (Le Monde) et Marie-Ève Malouines (France Info) ont souligné qu'elles n'avaient pas sollicité cette décoration et que rien d'exceptionnel dans leur parcours professionnel ne la justifiait. Françoise Fressoz a même ajouté que, « pour exercer librement sa fonction, un journaliste doit rester à l'écart des honneurs ».
    Le troisième refus provient de la fille de Josette et Maurice Audin, Michelle Audin. Mathématicienne comme son père, elle a motivé son refus au président de la République. Dans sa lettre, elle suppose que cette distinction entend récompenser ses recherches mathématiques. Mais elle n'a pas oublié que, lors de la prise de fonction présidentielle, sa mère avait écrit à Sarkozy pour lui demander que toute la vérité soit faite sur la mort de son mari, torturé et assassiné en 1957 par des parachutistes de l'armée française pendant la bataille d'Alger. Celle-ci, conduite par le général Massu, institua l'usage de la torture contre les partisans de l'Algérie indépendante, avec le quitus du gouvernement dirigé par le « socialiste » Guy Mollet, qui entendait que l'Algérie reste française.
     Le 11 juin 1957, Maurice Audin, professeur de mathématiques de 25 ans, anticolonialiste et militant du Parti Communiste Algérien interdit depuis 1955, était arrêté à son domicile d'Alger par des parachutistes. Il devait mourir le 21 juin 1957 au cours d'une séance de torture, étranglé par le lieutenant Charbonnier. Les parachutistes maquillèrent l'assassinat en une tentative d'évasion. Le corps du « porté disparu » ne fut jamais retrouvé. Paru en 1958, un livre, La Question, écrit par Henri Alleg, militant du PCA, ami d'Audin, arrêté et torturé lui aussi, allait dénoncer l'usage de la torture. Alleg a donné un échantillon des propos des officiers pendant qu'ils le torturaient : « Tu sais ce que c'est la Gestapo ? Tu vas disparaître. Personne ne sait que tu es arrêté, tu vas crever et ta putain de République, on la foutra en l'air aussi ! »
     Plusieurs tentatives de Josette Audin d'obtenir réparation en justice, à l'époque et encore en 2001 sous Jospin, se sont soldées par des non-lieu ou des appels rejetés, sans parler du décret d'amnistie promulgué par l'État français dès 1959 pour les crimes de l'armée lors des « opérations de maintien de l'ordre contre l'insurrection algérienne ».
     Cinquante ans après, Josette Audin estimait qu'il restait des témoins susceptibles de faire la lumière sur les circonstances précises de la mort de son mari. Un des protagonistes, le général Aussaresses, supérieur hiérarchique de Charbonnier, n'avait-il pas fait des demi-aveux sur les circonstances ? Josette Audin espérait aussi que l'État français reconnaîtrait que ses représentants avaient usé de la torture et condamnerait cette pratique.
Mais l'amnésie de l'État, quand il s'agit de ses crimes, est en général durable. Heureusement, la famille Audin n'a pas la mémoire courte. Et c'est parce que le président Sarkozy n'a même pas daigné répondre à la lettre de sa mère que Michelle Audin a refusé la Légion d'honneur. Comment, il est vrai, aurait-elle pu accepter une décoration que l'État français avait jadis remise au tortionnaire de son père ?
                                                                            Jacques FONTENOY

 

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