« Le
jeune parti communiste : du combat pour créer un parti révolutionnaire au
stalinisme »
La « bolchevisation » et le
stalinisme
La
campagne contre la guerre du Rif
Sur le terrain de la lutte
anticoloniale, le PC conservait une position internationaliste, dans la lignée
de son attitude lors de l’occupation de la Ruhr. En 1921, Abd el-Krim avait
pris la tête d’un soulèvement des tribus du Rif, dans le nord du Maroc. Il
avait infligé une cuisante défaite aux troupes espagnoles avant de proclamer
une République du Rif. Le gouvernement français considéra immédiatement cette
proclamation d’indépendance comme une menace : Abd
el-Krim montrait à tous les
peuples colonisés, au
Maroc comme en Algérie, que
les puissances coloniales pouvaient être battues. Fin 1924, sous le Cartel des
gauches, le gouvernement français envoya un corps expéditionnaire, avec des
chars et des avions de combat qui larguèrent du gaz moutarde sur les Rifains.
Plusieurs dizaines de milliers de Marocains furent tués dans cette guerre.
Le PC et l’Humanité
dénoncèrent la guerre coloniale du Rif et reconnurent le droit à l’indépendance
des Rifains. Ils organisèrent des manifestations et firent une campagne auprès
des soldats, au sein même de l’armée française, à travers des tracts, à travers
le journal des conscrits communistes, la Caserne, pour dénoncer le
caractère impérialiste de cette guerre. Ces positions étaient courageuses parce
qu’à contre-courant de tous les partis politiques. Les députés Thorez et Doriot
envoyèrent un télégramme de soutien à Abd el-Krim. Toute cette campagne fut
réprimée par le pouvoir. Plusieurs centaines de militants communistes furent
arrêtés à la fin de 1925 pour avoir mené cette politique. Ce radicalisme
plaisait à bien des militants, mais en même temps il permettait de masquer la
mise à l’écart des oppositionnels.
La lutte contre la guerre du Rif
cachait cependant une évolution sur le terrain des positions anticoloniales.
Lors du 5e congrès de l’IC, en juillet 1924, la critique des bourgeoisies
nationalistes des pays colonisés avait été abandonnée, comme si les paysans
opprimés en Indochine avaient les mêmes intérêts qu’un propriétaire terrien
indochinois. Cette évolution politique permit à Ho Chi Minh, jeune délégué au
congrès de Tours, de passer facilement du communisme au nationalisme. À la même
époque, l’Union intercoloniale, qui éditait le journal Le Paria et qui
regroupait les communistes qui militaient en direction des travailleurs issus
des colonies, qu’ils vivent dans celles-ci ou en France, quelles que soient
leurs origines, fut divisée en sections géographiques. Le Paria cessa de
paraître. La section maghrébine devint l’Étoile nord-africaine, dirigée par
Messali Hadj. Très vite, elle se sépara du PC pour se placer sur le terrain du
nationalisme.
Cette politique fut imposée à
l’IC dans tous les pays. En Chine, en 1926-2027, elle livra les militants
communistes chinois à leur bourreau, le général Tchang Kaï-chek provoqua
l’écrasement de la révolution chinoise. Ce nouvel échec, en aggravant l’isolement
de l’Union soviétique, renforça le pouvoir de la bureaucratie.
Un numéro du Paria
(Demain
: La
« bolchevisation » et le stalinisme, Des zigzags politiques permanents)