Comme
vous le savez, nous n’avons pas pu tenir le Cercle Léon Trotsky qui devait
aborder, un siècle après le Congrès de Tours de décembre 1920, la naissance du
parti communiste en France. Le texte de cet exposé est néanmoins disponible sur
notre site lutte-ouvrière.org. Nous vous le proposons à partir d’aujourd’hui en
feuilleton sur notre blog « lo argenteuil »
Le jeune
parti communiste : du combat pour créer un parti révolutionnaire au stalinisme
……………………….
1921-1924 : la
lutte pour transformer le parti
Le reflux
et le front unique
La répression du Havre et
l’intransigeance des patrons de la métallurgie confirmaient que l’ordre
bourgeois, menacé à la fin de la guerre, était de nouveau stabilisé. Cette
situation n’était pas propre à la France. En Italie, Mussolini arrivait au
pouvoir après des mois d’expéditions punitives de ses « faisceaux », groupes de combat contre les militants
ouvriers et les paysans rouges. En Europe centrale, des dictatures imposaient
leur joug dans la plupart des pays issus des traités qui, après celui de
Versailles, avaient organisé le charcutage de l’Europe sous l’égide des
impérialistes vainqueurs. Dans tous les pays, la crise économique entraînait le
chômage tandis que les patrons cherchaient à baisser les salaires.
Pour l’Internationale communiste,
l’heure n’était plus à l’offensive mais à la défense face aux attaques, et à un
profond travail d’implantation parmi les masses ouvrières et paysannes.
L’immense majorité des travailleurs restaient en dehors de toute organisation
syndicale ou politique. Il fallait trouver le moyen de les politiser et de les
entraîner. Depuis la scission de Tours, les effectifs du PC avaient diminué
tandis que la SFIO avait regagné un peu d’influence. Des millions de
travailleurs, influencés par les multiples canaux de la propagande bourgeoise,
avaient toujours l’espoir que leur sort pourrait s’améliorer grâce à des lois
progressistes ou des accords collectifs. La révolution leur semblait lointaine
et hasardeuse. Pour résister aux attaques patronales, pour défendre leur
salaire et leur emploi, beaucoup aspiraient à l’unité entre les organisations
ouvrières.
Sans renoncer ni à leur
programme, ni à leur critique des réformistes, ni à leur indépendance
organisationnelle, les communistes devaient prendre en compte cette aspiration
et chercher à s’adresser à tous les travailleurs, y compris à ceux qui
restaient influencés par les socialistes ou la CGT réformiste, pour mener
ensemble des actions communes, ponctuelles. Ils devaient multiplier les moyens
de se lier aux masses.
L’IC avait formulé cette
politique, le Front unique ouvrier, en décembre 1921. Rendue nécessaire par la
situation générale, elle fut mal reçue et mal comprise par les dirigeants du
Parti communiste français. Les centristes, toujours majoritaires à la tête du
parti et influents à travers l’Humanité, s’opposèrent ouvertement au
Front unique. Sur le fond, ils ne comprenaient pas qu’il s’agissait de
s’adresser, par-dessus la tête des chefs réformistes, aux travailleurs, en
partant de leurs préoccupations, de leurs aspirations. Ils ne concevaient les
alliances qu’en termes d’élections, par des tractations au sommet. La confusion
entretenue par les centristes autour du Front unique alimentait la méfiance et
l’hostilité que ressentaient des milliers de communistes, surtout les jeunes, à
l’égard des chefs socialistes. Beaucoup minimisaient l’influence de l’ancienne
SFIO sur les travailleurs et les militants syndicaux.
Alfred Rosmer et Amédée Dunois,
pour la gauche du parti, défendirent cette tactique qui consiste « à frapper ensemble tout en marchant séparément » contre les adversaires communs à tous les travailleurs. Ils ne réussirent pas
à l’emporter.
Une brochure de 1922, quand le
« Front unique » était au cœur de la politique de l’Internationale
communiste
………………………………………….
(Demain
: 1921-1924 : la lutte pour transformer le parti, La crise dans le
parti et le départ de Frossard)