Derrière le changement, la continuité
Dans
une récente interview télévisée, Laurence Parisot, présidente du Medef, a tenté
de faire pleurer dans les chaumières en contant les malheurs des patrons
français dont les marges se rétrécissent de plus en plus… Petite scène destinée
à montrer que le patronat n’est pas content à l’idée d’augmenter le Smic. Et
Parisot d’affirmer que la moindre augmentation du Smic au-delà de ce que
prescrit la loi, ce sont des centaines de petites entreprises qui sont poussées
à mettre la clé sous la porte et donc des dizaines de milliers d’emplois qui
sont supprimés ! Ben voyons !
Cela fait plusieurs années qu’il n’y a pas
eu le moindre « coup de pouce » au Smic et pourtant le chômage n’a
cessé d’augmenter. Et les suppressions d’emplois ne sont pas le fait du
boulanger de quartier ou du petit entrepreneur en bâtiment qui, au demeurant,
quand ils sont poussés à la fermeture ne le sont pas parce que leurs salariés
sont trop bien payés mais parce qu’ils sont étranglés par leurs banquiers ou
par leurs donneurs d’ordre.
Mais c’est le trust Peugeot qui prépare
son plan de fermeture de l’usine d’Aulnay, avec 3 400 licenciements directs à
la clé, 9 000 peut-être en comptant les sous-traitants, depuis trois ans, sans
aucun rapport avec le montant du Smic.
Parisot n’a vraiment aucune raison de
s’affoler. La presse estime que le « coup de pouce » sera de l’ordre
de 6,6 euros par mois ! Et encore, seulement pour les smicards. Voilà ce
qui mesure le « changement » promis par Hollande en matière de
pouvoir d’achat. Toutes les familles ouvrières ont pourtant de plus en plus de
mal à joindre les deux bouts et on vient d’annoncer une nouvelle hausse du gaz
et de l’électricité, sans parler de tout le reste.
Une autre annonce mérite d’être confrontée
à celle-ci. Pendant sa campagne, Hollande avait promis de doubler le plafond
des dépôts sur le livret A. Finalement, il sera un peu augmenté mais pas
doublé. C’est que les banquiers ont bruyamment protesté contre une mesure qui
risquait de les léser – et le gouvernement s’est poliment exécuté.
Hollande vient de passer ses 50 premiers
jours à l’Élysée. Il a déjà épuisé son stock de gestes symboliques destinés à
l’électorat populaire pour montrer sa différence avec la droite. Maintenant, il
passe aux « choses sérieuses ». À la place de l’austérité de droite,
nous aurons la rigueur de gauche, à commencer par des suppressions d’emplois
dans la Fonction
publique.
Le patronat, de son côté, ne se gêne pas
pour annoncer de nouveaux plans de licenciements, nullement impressionné par
l’agitation de Montebourg. Il est vrai que le ministère de ce dernier n’est pas
celui du « Sauvetage des emplois », mais celui du « Redressement
productif » !
Le temps du slogan électoral, « Le
changement c’est maintenant », est terminé. Seuls les dirigeants
politiques ont changé mais la politique reste celle dictée par le grand
patronat.
Mélenchon et ceux qui se sont agités
derrière lui, le PCF principalement, se font aujourd’hui plus critiques,
accusant Hollande d’avoir « capitulé face à Merkel ». Comme si
Hollande avait besoin de Merkel pour mener la politique du grand patronat
français ! Il n’est pas facile de critiquer comme si on était dans
l’opposition tout en proclamant fièrement qu’on est de la majorité
présidentielle ! Mais il n’y a pas besoin de traverser le Rhin pour tomber
sur le véritable ennemi : le grand capital.
Nous n’avons rien à attendre de bon de ce
gouvernement. Nous ne pouvons pas espérer qu’il résorbe le chômage car pour
cela il faudrait qu’il impose l’interdiction des licenciements, à charge pour
le grand patronat de financer le maintien des emplois. Nous ne pouvons pas
espérer qu’il améliore le pouvoir d’achat des travailleurs car cela n’est
possible qu’en prenant sur les profits des entreprises et, au besoin, sur la
fortune de la bourgeoisie. Le gouvernement ne prendra pas plus des mesures
coercitives à l’égard du grand patronat et des banquiers que n’en a pris son
prédécesseur. Hollande, comme avant lui Sarkozy, gouverne pour le compte de la
bourgeoisie.
Nous ne pouvons compter que sur notre
propre force. Mieux vaut le savoir, plutôt que de croire les faiseurs
d’illusions. Mais sachons aussi que, malgré la pression du chômage, la force,
nous l’avons. Ce sont les entreprises qui tournent qui assurent la vie
économique du pays mais aussi les profits des actionnaires capitalistes.
Ce sont eux qui dépendent de nous, pas
l’inverse. Le jour où nous en serons collectivement conscients, nous imposerons
notre droit au maintien de notre emploi et de notre pouvoir d’achat, notre
droit à la vie !