Une initiative ancienne du mouvement ouvrier révolutionnaire
Clara Zetkin
À propos du « mois de la
femme » dont nous avons déjà parlé, le site de la Ville écrit : « Le 8 mars est depuis plusieurs années la
Journée internationale pour les droits des femmes : une formidable occasion de
mettre en avant la nécessaire réduction des inégalités entre les femmes et les
hommes ». Si nous n’avons bien sûr rien à redire avec la seconde
partie de la phrase, il n’en va pas de même avec la première où le rédacteur
fait preuve d’une inculture grave pour le moins. Toujours généreux quand il s’agit
de connaissances, nous lui proposons de lire l’article ci-dessous de la
parution de cette semaine de notre hebdomadaire Lutte ouvrière qui porte sur cette journée du 8 mars qui a tout de
même plus… d’un siècle et qui n’a pas attendu ces dernières années, même lorsqu’il
s’agit de celle mise en place par l’ONU. DM
Journée du 8 mars : une initiative du mouvement ouvrier révolutionnaire
02 Mars 2022
En 1977, les Nations unies, sous la pression des mobilisations de femmes dans le monde, ont fait du 8 mars la Journée internationale des droits des femmes, une manifestation empruntée au mouvement ouvrier révolutionnaire, pionnier dans la lutte pour l’émancipation des travailleurs et des femmes.
L’Internationale ouvrière, créée en 1889, fut en effet la première organisation politique à mettre en avant le principe « à travail égal, salaire égal ». Dirigeants et militants de cette Internationale n’aspiraient pas à gérer les affaires de la bourgeoisie mais à renverser le capitalisme et à le remplacer par une société socialiste égalitaire, sans exploitation ni frontières.
Friedrich Engels poussa une militante allemande, Clara Zetkin, à intervenir au congrès de 1889 pour y défendre les droits des femmes contre les préjugés de certains militants, partisans du maintien de la femme au foyer. Les premières militantes socialistes ne devaient pas manquer de courage pour s’adresser à des assemblées composées presque exclusivement d’hommes, parfois narquois ou hostiles.
En Allemagne, entre 1882 et 1907, le nombre des ouvrières avait triplé, passant de 500 000 à 1,5 million. Le Parti socialiste allemand (SPD) organisait de plus en plus de femmes : 62 000 en 1908. Au même moment, les syndicats ouvriers liés au SPD comptaient 135 000 femmes.
Aussi, en 1907, les militantes de la Deuxième Internationale appelèrent à une conférence internationale des femmes, où cinquante d’entre elles représentèrent quinze pays. Dans la défense des droits des travailleuses, elles marquaient les limites des féministes bourgeoises, qui ne revendiquaient que le droit de vote, parfois même seulement pour les femmes riches. Les militantes socialistes réclamaient le suffrage universel, tout en soulignant qu’il ne mettrait pas fin à l’exploitation des travailleuses et des travailleurs. Pour abattre le capitalisme, femmes et hommes devaient s’organiser économiquement dans les syndicats et politiquement dans les partis socialistes.
En 1910, une seconde conférence des femmes socialistes lança l’idée d’une journée internationale pour les droits des femmes, comparable au 1er mai ouvrier. La première de ces journées eut lieu en mars 1911. Un million de femmes y participèrent dans plusieurs pays d’Europe. Le 8 mars 1914, les ouvrières allemandes manifestaient pour le droit de vote, qui fut obtenu en 1918. Le 8 mars 1917, en Russie, la Journée des femmes marqua le début de la révolution. Ensuite, le mouvement communiste né de cette révolution prolétarienne fit du 8 mars la Journée des droits des femmes, officialisée en Russie soviétique en 1921 par un décret de Lénine.
C’est bien le mouvement ouvrier révolutionnaire qui a donné naissance à la Journée internationale des droits des femmes car, comme le disait le socialiste August Bebel dans son livre La femme et le socialisme : « Il ne peut y avoir d’émancipation humaine sans indépendance sociale et égalité des sexes ». C’est toujours vrai et c’est une raison, toujours actuelle, de manifester ce jour-là.
Jacques FONTENOY (Lutte ouvrière n°2796)
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