Le crash
du vol Rio-Paris : la justice à la rescousse d’Airbus
04 Septembre 2019
Le 1er juin 2009, le
vol Air France 447 Rio-Paris s’abîmait en mer au large du Brésil. Sur 216
passagers et 12 membres d’équipage de l’A330-200, il n’y eut aucun survivant.
Mais comme la justice se hâte
lentement dès que de gros intérêts sont en jeu, il a fallu dix ans avant
qu’elle ne s’apprête à rendre sa décision sur l’affaire. En outre, il semble
qu’elle s’oriente vers un non-lieu pour Airbus et Thalès, pourtant mis en cause
dès le lendemain du drame, en n’accusant qu’Air France.
C’est ce qu’a requis le parquet
de Paris cet été. Il a considéré qu’aucune « faute pénale en lien
causal avec l’accident ne peut être imputée au constructeur ». Cela a
provoqué l’indignation des familles et proches des victimes qui viennent de
répliquer en produisant un document accablant pour Airbus et son équipementier
Thalès. Il concerne les sondes Pitot, trois petits appareils situés à
l’extérieur du fuselage pour mesurer la vitesse de l’avion. Or sur le vol AF
447, ils avaient tous givré et donc fourni des indications erronées aux
navigants, ce qui avait provoqué le décrochage fatal de l’appareil.
Ce document intitulé
« Expertise d’une sonde Pitot » date de novembre 2004. Élaboré pour
Thalès, qui fabrique des sondes Pitot AA, il notait qu’au bout de 10 000
heures de vol en moyenne, celles-ci connaissaient des dysfonctionnements du fait
du givre. Ainsi, en 2008 – un an avant la catastrophe du Rio-Paris, dont les
sondes affichaient 19 000 heures de vol ! – on avait noté une
recrudescence de tels « incidents » : onze en un an, dont huit
pour Air France.
Alors que le moindre incident
aérien et a fortiori accident est censé faire l’objet d’une enquête et d’un
suivi très stricts, Airbus, qui connaissait ces problèmes, se serait arrangé
pour que l’autorité de surveillance de la sécurité du ciel en Europe, EASA,
n’interdise pas les sondes incriminées.
Quant au parquet, son
réquisitoire « règle en cinq lignes » la question des sondes,
s’indignent les proches des victimes, dont les représentants s’étonnent que la
trace même des fameuses sondes ait disparu du dossier judiciaire !
À l’heure où les ventes de
Boeing, le concurrent d’Airbus, connaissent un gros trou d’air du fait de
crashs répétés de son B737 Max, il semble hors de question pour les juges de
faire de l’ombre au constructeur européen en reconnaissant qu’il ne fait pas
mieux que son rival américain en matière de sécurité. Et pour la même
raison : la course au profit, aussi meurtrière dans les cieux que sur
terre.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire