Pour
contester le pouvoir : les travailleurs doivent contrôler l’État et l’économie
La revendication du référendum
d’initiative citoyenne connaît un certain succès parmi les gilets jaunes. Ils y
voient un moyen de contrecarrer la politique d’un gouvernement qui méprise et
écrase les classes populaires.
L’idée qu’il faut aller au-delà
de la revendication d’avoir de quoi boucler les fins de mois est juste. Et il
est légitime de se dire que les classes populaires doivent pouvoir diriger
directement la société, afin qu’elle réponde aux besoins de la majorité. Les
travailleurs, la population, devraient avoir le moyen de contrôler les élus et
l’appareil d’État et de peser directement sur les décisions politiques et
budgétaires.
Mais pour cela, il ne suffit pas
d’institutions ou de modes de scrutin plus ou moins démocratiques. Dictatures
féroces interdisant toute liberté d’expression, régimes autoritaires,
démocraties : l’État et le gouvernement peuvent prendre des formes très
diverses suivant les pays et les situations. À des degrés divers, des
possibilités pour des groupes de citoyens de soumettre à référendum certaines
questions de société ou des problèmes politiques existent dans plusieurs pays
riches, comme en Suisse ou en Italie. Et aux États-Unis on élit même certains
fonctionnaires, du shérif à l’équivalent du médecin légiste en passant par les
juges des tribunaux d’État. L’appareil d’État est-il pour autant sous le
contrôle de la population, voire simplement plus proche d’elle ?
Tant que c’est l’argent qui
commande, même dans les riches pays démocratiques, c’est la grande bourgeoisie
qui fait ou défait les carrières des responsables politiques, comme celles des
hauts fonctionnaires de l’appareil d’État, qu’ils soient élus ou non. Les
hommes – ou plus rarement les femmes – du pouvoir sont intimement liés à la
grande bourgeoisie, dont ils représentent et servent fidèlement les intérêts.
Ils fréquentent le même monde, sont issus des mêmes grandes écoles. Ils passent
d’un poste de responsable de cabinet dans un ministère à celui de dirigeant
d’une grande entreprise, ou inversement, et finissent parfois dans un fauteuil
de ministre.
Derrière la diversité des régimes
politiques et des appareils d’État, il y a une même réalité sociale. L’État,
même lorsqu’il semble représenter également toutes les classes sociales, sert
en réalité les intérêts des capitalistes. Car ce sont eux qui dominent la
société du simple fait qu’ils monopolisent les richesses et les moyens de production.
Le sacro-saint droit de propriété
nous est présenté comme relevant des droits et de la liberté individuels. Mais
la possession des richesses, la propriété des banques et des grandes
entreprises donnent aux capitalistes le droit de diriger la société, de
licencier des travailleurs et d’en exploiter d’autres, de décider de ce qui se
produit ou ne se produit pas, quitte à mettre en danger la planète.
La classe ouvrière et l’ensemble
des classes populaires, si elles veulent pouvoir contrôler vraiment ce qui se
passe dans la société, doivent remettre en cause la loi du profit que
l’économie capitaliste fait régner dans tous les domaines de la vie sociale.
Il est légitime pour le monde du
travail de contrôler les comptes des grandes entreprises, d’exiger de savoir où
vont les milliards qui sont le produit de son exploitation. Aujourd’hui, c’est
un crime puni par la loi pour un travailleur, pour un lanceur d’alerte, de
dévoiler les projets néfastes de l’entreprise qui l’emploie ou les combines
dont il a connaissance ! Il faut imposer la fin du secret qui protège les
affaires et les opérations commerciales des grandes entreprises industrielles
comme financières.
Les travailleurs sont à l’origine
de toute la richesse de la société. Ils produisent, transportent, livrent et
échangent les marchandises, comme ils transmettent et voient passer les
opérations financières. Ils ont les moyens d’imposer leur contrôle sur
l’économie et de contester la domination capitaliste sur celle-ci, jusqu’à
débarrasser la société de la loi du profit en expropriant la grande
bourgeoisie.
Il est urgent que le monde du
travail revendique la direction de la société, contre les politiciens
professionnels qui s’agitent sur le devant de la scène, mais surtout contre la
classe capitaliste qui est leur donneur d’ordres.
Nadia CANTALE (Lutte ouvrière
n°2630)
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