Macron :
un président démonétisé
La vie
d’un président de la République n’est pas toujours facile. Il ne suffit pas en
effet de gouverner pour les riches, de pressurer les classes populaires de
toutes les façons possibles afin de remplir, directement ou indirectement, les
coffres-forts des capitalistes. Il faut aussi, et c’est toute la difficulté, le
faire sans susciter de protestations populaires.
Colbert,
ministre de Louis XIV, s’y connaissait et parlait avec un certain mépris de
l’art de plumer l’oie sans la faire crier. L’actuel président, visiblement, ne
maîtrise pas cet art.
Pour
tenter de faire cesser la protestation des gilets jaunes, Macron a
soigneusement mis en scène son discours télévisé, lundi 10 décembre. Les mots
étaient d’autant plus sonnants que les concessions étaient minces.
Devant
le recul incessant et catastrophique du pouvoir d’achat des classes populaires,
Macron n’a parlé que d’une prime pour les travailleurs touchant le smic, du
report de la hausse de la CSG pour les retraites en dessous de 2 000 euros, de
la défiscalisation des heures supplémentaires. Et pour le reste, il faudra se
contenter de l’affirmation qu’il s’agit d’un tournant historique et que rien ne
sera plus comme avant.
Tout
continuera, au contraire ! Aucune des annonces de Macron n’effleure les
fortunes des riches et les profits des entreprises milliardaires. La
défiscalisation des heures supplémentaires est une aubaine pour le patronat.
Macron a insisté sur la nécessité de ne pas revenir sur les cadeaux fiscaux
faits aux plus riches, dont la suppression de l’ISF est le symbole, sans être
le plus fastueux. Il a annoncé la poursuite de la réforme des retraites et de
celle de l’indemnisation du chômage. Les réformes qu’il envisage seront de la
même eau que celles réalisées jusqu’à maintenant : des attaques contre le
monde du travail.
La
politique annoncée est celle que lui dicte le grand patronat et elle ne peut
que donner des motifs supplémentaires à la révolte.
Mais
Macron a-t-il maintenant l’autorité nécessaire pour faire passer sans secousse
ces mauvais coups ? En fait, il s’est usé encore plus vite que ses
prédécesseurs, Sarkozy et Hollande, et exactement pour les mêmes raisons.
Au fil
des ans, la politique de pillage de toute la société au bénéfice exclusif du
grand capital devient de plus en plus visible et son orchestration par l’État
de plus en plus manifeste.
La
gauche et la droite s’étant usées à cette tâche et ayant dégoûté l’électorat,
le grand patronat avait favorisé l’arrivée de Macron, nouvelle tête jeune et prometteuse
pour un vieux rôle. Ce président d’un prétendu nouveau monde est aujourd’hui
largement discrédité et démonétisé, au point de concentrer la colère sur sa
personne et de devenir lui-même un facteur d’instabilité sociale et politique.
Certes,
l’appareil d’État a encore bien des ressources et le grand capital bien des
tours dans son sac. Les candidats à la succession du président usé sont déjà
sur les rangs. Ils ne manquent pas... Mais les mêmes causes produiront les
mêmes effets. Quel que soit celui qui leur servira la soupe, la domination des
capitalistes et leur mise en coupe réglée de la société produiront de nouvelles
vagues de protestation. Pour les travailleurs, le problème n’est pas ce petit
Macron, mais les puissances dont il n’est, après bien d’autres, que l’homme de
paille.
Paul GALOIS (Lutte ouvrière n°2627)
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