« Pourquoi je ne suis pas allé devant les Bains douches hier. (mardi 13 novembre) ?
Peut-être parce que la rue du moulin a déjà
trop organisé des veillées et des moments de recueillements envers tous ceux
qui, épuisés par la rue, se sont éteints, à l'hôpital, dans la rue, dans des
voitures. Que nombre d'entre eux étaient connus sinon accompagnés depuis de
longs mois, sinon des années, par l'équipe de la rue du moulin.
A ce sujet : admirable, éminemment admirable,
et bien méconnue est cette équipe qui, aujourd'hui, visite leurs accompagnés
dans les hôpitaux et tous les autres lieux d'accueil ou d'errance, dans des
squats. Il faut noter que pendant de nombreuses années, ils sont restés un peu
seuls devant ces décès si difficiles à vivre lorsque l'on a tenté, et parfois
réussi à sortir les gens de la rue, au prix d'une patience infinie et d'une
humanité rare.
Alors, la machine à exclure de la société
n'est pas prête de s'arrêter.
Le repli, l'abandon de soi, la volonté de se
cacher aux yeux des autres, parfois des proches, ne sont pas si loin, et
surtout à son propre regard, ne sont pas prêts de trouver une solution magique.
Oui, malgré les efforts de tout le réseau, et
il faut souligner la persistance des efforts et l'humanité de ce dernier,
nombre de "sans abris" refusent de s'abriter, voir même de prendre
une douche.
C'est ainsi. Il faut pouvoir prendre le
temps, beaucoup de temps, gagner des moments de confiance, pour pouvoir mieux
connaître l'itinéraire singulier de chacun, et pouvoir tenter de tirer des fils
vers un abri. Parfois, les épreuves de la rue marquent tellement ceux qui les
ont éprouvées, qu'il devient très très difficile d'établir un contact.
Le corps n'est pas le seul à souffrir. Alors,
est ce que le passage d'une gestion municipale à une gestion associative est un
risque pour les « sans abri » ? J'observe qu'à ma connaissance, Ermont
avait fermé la sienne depuis 6 ans et que l'essentiel, sinon la quasi-totalité
des structures du Val d’Oise sont associatives. Je n'ai pas connaissance que la
ville de Cergy se soit plainte du travail effectué par les associations. Par
ailleurs, de mon point de vue, il aurait été préférable, à bien des égards,
j'en ai une bonne liste, que dès son ouverture, le centre de la rue du moulin
soit géré par une association.
Aujourd'hui cependant, l'équipe de la rue du
moulin concentre mon attention, car pour accompagner au jour le jour, malgré
les agressions, malgré les crises psychiatriques, (tout le monde ne peut le
faire), il se forge au fil du temps et des évènements une personnalité
singulière, une manière d'aborder les situations et les conflits, une approche
des personnes en difficultés, qui, il me semble, s'avère bien différente du
profil d'un agent territorial lambda.
Toutefois,
il me semble vraiment bien que nombre de personnes se soient mobilisées pour
rendre un hommage à ce disparu. Si une ou deux de ces personnes prenaient leur
courage à deux mains pour renforcer les équipes de bénévoles, qui régulièrement
effectuent des tournées à Argenteuil et dans le département, peut-être qu'il y
aurait eu moins de maraudes annulées cet été faute de bénévoles. » M.M
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