Affaire
Benalla : officielle ou officieuse, la violence de l’État
La vidéo qui a déclenché
l’affaire Benalla, du nom de ce membre du cabinet présidentiel chargé de la
sécurité de Macron, le montre frappant violement deux jeunes qui participaient
à un rassemblement pacifique place de la Contrescarpe à Paris, dans la soirée
du 1er mai, puis ordonnant leur arrestation.
La presse et l’opposition
d’abord, puis le préfet de police ainsi que le ministre de l’Intérieur, pour se
dédouaner et surtout pour protéger Macron, lui reprochent de s’être permis un
tel comportement alors qu’il n’avait pas le droit de participer directement à
l’opération, n’étant ni policier ni gendarme en activité. Mais les CRS,
d’ailleurs présents pendant toute la scène filmée, se comportent
quotidiennement de la même façon, et le fait qu’ils y soient autorisés par
l’État ne rend pas leur violence plus légitime.
Ainsi, le même jour, sous
prétexte des violences commises par les black blocs en marge de la
manifestation parisienne du 1er mai, plus de 280 personnes avaient été
arbitrairement arrêtées. Pour l’immense majorité d’entre elles, il n’y avait
aucune preuve de leur participation à des dégradations, et elles ont été
libérées sans poursuite, mais après avoir passé la nuit en garde à vue, et ont
été obligées de se soumettre à un prélèvement ADN. Et plusieurs autres ont été
condamnées pour des broutilles : un jeune homme à trois mois de prison ferme
car il avait sur lui des massettes et des ciseaux, une femme à un mois ferme
pour avoir refusé de donner son ADN, un autre jeune homme à de la prison avec
sursis simplement pour s’être débattu pendant son arrestation.
La liste des récentes violences
policières et arrestations arbitraires de manifestants est longue. Le 22 mai
par exemple, 102 personnes, dont 40 mineurs, qui occupaient le lycée Arago à
Paris pour protester contre le durcissement des conditions d’entrée à
l’université, étaient placées en garde à vue pour 48 heures. À
Notre-Dame-des-Landes, le déploiement de force ordonné en avril dernier par le
gouvernement a provoqué de nombreuses blessures, parfois graves, parmi les
défenseurs de la Zad. Et presque chaque fois que des travailleurs manifestent,
refusent de se laisser licencier, font grève massivement, comme on l’a encore
constaté récemment à la SNCF ou à Air France, l’État mobilise ses forces de
répression. Et dans les quartiers populaires, c’est quotidiennement que les
jeunes et moins jeunes subissent contrôles au faciès, brimades, humiliations,
voire pire, un jeune homme ayant été tué à bout portant par un policier à
Nantes début juillet. Sans parler des violences permanentes contre les migrants,
encore plus vulnérables.
Alexandre Benalla, du fait de sa
proximité avec le pouvoir, s’est senti le droit de se comporter comme une brute
sans en avoir l’autorisation officielle. Il y a de quoi en être choqué. Mais
les violences perpétrées au quotidien par des policiers et gendarmes en
fonction sont exactement du même ordre, et tout aussi choquantes.
Claire
DUNOIS (Lutte ouvrière n°2608)
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