SNCF : la
grève tient bon
À
chaque vague de grève de deux jours, journalistes et gouvernement scrutent
l’horizon en espérant voir baisser le niveau des eaux. Mais ils en sont pour
leurs frais. Les chiffres mêmes de la direction SNCF, qui minorent pourtant le
mouvement gréviste, confirment au contraire sa puissance.
Ainsi
vendredi 13 avril, à l’Éxécution, c’est-à-dire sur l’ensemble des cheminots
sauf maîtrise et cadres, la SNCF recensait à l’échelle nationale 33 % de
grévistes, contre 36 % quatre jours plus tôt. Mais dès le lendemain, samedi 14
avril, ce chiffre remontait à 41,4 %. Sur des régions comme la région PACA, 70
% des agents d’exécution étaient en grève, dans le Limousin près de 80 % ! Dans
bien des endroits, la grève touche largement la maîtrise et l’encadrement. En
Midi-Pyrénées, 64 % des cheminots, tous collèges confondus, étaient en grève le
14 avril, dont un agent de maîtrise sur deux et un cadre sur trois.
Expression
de l’opposition de cadres, même dirigeants, à la réforme : le très
collaborateur Syndicat national des cadres supérieurs (SNCS), soutien total de
toutes les précédentes réformes, vient d’envoyer une lettre indignée à la
ministre Élisabeth Borne, lui reprochant « pour des raisons de stratégie
politique, d’avoir fait le choix, avec le Premier ministre et le président de
la République, de livrer à la vindicte populaire les cheminots. […] En les
accusant injustement, vous avez provoqué leur révolte.» Selon lui, «
certains cadres supérieurs seraient prêts à se joindre ponctuellement au
mouvement».
La
direction se console d’avoir, lors du dernier week-end, légèrement augmenté la
circulation des trains. Mais, pour faire péniblement rouler un TGV ou un TER
sur trois et un Intercité sur cinq, elle a utilisé des moyens inavouables.
Après avoir offert une prime aux cadres pour conduire des trains, dans
plusieurs endroits, des retraités agents de conduite ont été recrutés en CDD
pendant la grève !
Dans
certains secteurs, des cheminots ne participent pas à toutes les journées du
calendrier décidées par les organisations syndicales, préférant parfois se
concentrer sur les journées les plus chargées en travail. Mais à l’inverse,
dans plusieurs secteurs, des cheminots choisissent de rester en grève et la reconduisent
de jour en jour, afin de militer pour la grève et de préparer les prochaines
échéances. C’est le cas de l’assemblée de grévistes de Paris-Nord, qui a
majoritairement choisi de rester en grève depuis le 13 avril.
Dans
toutes les têtes, dans toutes les assemblées, la volonté de faire reculer ce
gouvernement et la détermination restent intactes.
Les
actions qui permettent les rencontres avec des usagers, comme celles visant les
péages d’autoroute, ou les distributions de tracts, ou les rencontres et manifestations
avec d’autres grévistes, dopent le moral des participants. Il n’y a nulle trace
de corporatisme. Il y a au contraire le souhait et l’espoir que la résistance
des cheminots ouvre la voie à une contre-offensive plus générale.
Jusqu’à
présent, les grévistes continuent très majoritairement de s’inscrire dans la
grève par périodes de deux jours sur cinq, telle qu’elle est proposée par les
organisations syndicales. Après les journées des 14 et 15 avril, l’organisation
de celles des 18 avril et surtout du 19, journée de grève et de manifestation
interprofessionnelle, a été mise à l’ordre du jour. La vague gréviste peut et
doit encore s’élever pour faire tanguer le navire gouvernemental.
Christian
BERNAC (Lutte ouvrière n°2594)
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