Les
responsables des fédérations de cheminots viennent de se mettre d’accord pour
l’organisation d’une grève dite « perlée » : deux jours de grève
par semaine sur plusieurs mois à partir du 3 avril. On verra quelle sera la
réponse des cheminots eux-mêmes à ce qui apparaît comme un refus des
fédérations syndicales d’engager la vraie lutte pour amener le gouvernement à
retirer ses projets concernant la SNCF et les cheminots. Sur cette question,
ci-dessous, un article de notre hebdomadaire Lutte ouvrière, de cette semaine,
écrit la veille de la rencontre des dirigeants syndicaux de la SNCF.
Les
dirigeants syndicaux discutaillent, les cheminots défendent leur peau !
Le gouvernement a déclaré la
guerre aux cheminots et vise derrière eux l’ensemble du monde du travail. Face
à cette offensive frontale, l’attitude des directions syndicales aurait dû être
de sonner le branle-bas de combat, de donner l’exemple de la combativité,
d’organiser la riposte. Eh bien non, elles baladent toutes les cheminots et les
autres travailleurs prêts à se mobiliser, le 22 mars et après, en parlant de « projet
industriel », de « vraie réforme » ou de négociation
avec le gouvernement. Mais le gouvernement ne négocie pas : il s’en prend à l’emploi des cheminots, à leur salaire, à leur
peau ! Parler
d’autre chose, c’est être en dessous de tout !
Le 7 mars, Laurent Brun, le
secrétaire de la fédération CGT cheminots, présentait son « rapport
sur le développement du service public ferroviaire », qu’il disait
être l’antithèse du rapport Spinetta. Comme si le
gouvernement allait tenir compte de l’avis d’un dirigeant syndical concernant le
fonctionnement de la SNCF. Il n’en tient compte pour rien, il l’a affirmé haut
et fort en annonçant qu’il ferait passer sa réforme par ordonnance.
Le 12 mars, Martinez, le
secrétaire de la CGT, a aussi botté en touche alors qu’il était interrogé sur
les intentions de riposte de la CGT. Il a répondu : « La balle est dans le camp du
gouvernement. » Sa seule
exigence était d’être reçu par le Premier ministre pour lui remettre
un rapport de 70 pages contenant les propositions de la CGT pour une « vraie réforme ». Martinez fait des propositions, envisage
une réforme… au moment où le gouvernement s’apprête à décapiter les droits des
cheminots. Et tous, de la CFDT à FO, en passant par SUD et la CGT, d’attendre
les décisions du gouvernement, alors qu’elles sont clairement énoncées depuis
des semaines. Quelle honte !
Les dirigeants syndicaux ne sont
évidemment pas dupes, ils savent pertinemment que le gouvernement ne les
écoutera pas. S’ils utilisent ces arguments, c’est parce qu’ils se refusent à
envisager une lutte sérieuse.
L’inaction des dirigeants
syndicalistes n’est pas uniquement dans le discours, mais aussi dans l’absence
d’un plan de riposte. La CGT cheminots, le syndicat le plus influent à la SNCF,
a refusé et milité contre le dépôt d’un préavis de grève national pour le 22
mars, sous prétexte que les conducteurs devaient amener les cheminots à la
manifestation. Comme si, en 1995 ou en 1968, la grève générale des transports
avait empêché la tenue de manifestations monstres ! Comme
si les travailleurs n’avaient
pas les moyens d’assurer à la fois le succès de la grève et de la manifestation !
Cerise sur le gâteau, les
directions syndicales ont décidé que les cheminots et les travailleurs de la
fonction publique ne défileraient pas ensemble. Un cortège partira de la place
de la République, l’autre de Bercy… mais ils se rejoindront à Nation. C’est
cela la convergence des luttes pour les dirigeants syndicaux !
Totalement soumises au calendrier
du gouvernement, toutes les fédérations syndicales ont décidé d’attendre le 15
mars pour proposer éventuellement une suite au 22 mars, alors que de nombreux
cheminots se posent déjà le problème de quoi faire pour continuer le mouvement.
Sous prétexte d’unité syndicale, elles se sont alignées jusqu’à présent sur la
proposition systématiquement la moins combative, sur le plus petit dénominateur
commun. L’unité dont les travailleurs ont besoin, c’est pour entraîner, donner
confiance, certainement pas pour tirer en arrière.
Avant même cette date, plutôt que
de militer activement pour la préparation et la construction d’une vraie grève
pour le retrait du plan Macron, la fédération CGT a organisé une consultation
en interne, proposant le choix entre une grève reconductible ou au contraire
des grèves de 48 heures ou 72 heures
reconductibles de semaine en semaine, voire des grèves tournantes, métier par
métier.
Et, bien souvent, les
représentants de la fédération reprenaient des arguments démoralisants dans les
réunions de syndiqués : les cheminots ne sont pas prêts
à une lutte comme en 1995, les usagers sont contre nous, etc. Comme si, en
1995, il n’avait pas déjà fallu s’appuyer sur les secteurs les plus combatifs
pour entraîner les autres. Comme si la sympathie des usagers, en tant que
travailleurs, n’avait pas été acquise quand il s’était avéré que les cheminots
se battaient pour de bon, et du coup aussi pour l’ensemble des travailleurs.
Quels que soient les freins
actuels ou futurs à la mobilisation, ils pourront être surmontés par la
mobilisation consciente et multiforme des travailleurs du rail eux-mêmes, en
direction d’autres cheminots et des autres travailleurs. Les bureaucrates se
préoccupent de sauver leurs intérêts d’appareils syndicaux. Mais les cheminots,
eux, défendent leur peau. Alors, la balle n’est pas dans le camp du
gouvernement, elle est dans le camp des cheminots et de l’ensemble des
travailleurs !
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