Glyphosate
: cancérogène probable ou possible, mais rentabilité certaine
Énième épisode d’un feuilleton,
le 27 novembre l’Union européenne s’est prononcée pour la prolongation pendant
cinq ans de l’autorisation à la vente du glyphosate dans les pays européens.
Mis sur le marché dans les années
1960 sous le nom de Roundup par la firme Monsanto, cet herbicide total entre
depuis dans la composition de nombreux pesticides, au point d’être aujourd’hui
le plus vendu au monde. Il faut dire qu’il est redoutablement efficace. En
effet, après son épandage, le sol est nettoyé, aucune herbe n’y grandit sauf
les pousses issues de semences résistantes au glyphosate. Et, cerise sur le
gâteau, ces semences se trouvent être produites et vendues par… les mêmes
firmes que celles qui vendent l’herbicide. De quoi engendrer bien des appétits
de la part des Monsanto et compagnie, bien des pressions auprès des
décisionnaires afin de continuer à prospérer de la vente de l’herbicide.
Voilà maintenant des dizaines
d’années que la sonnette d’alarme est tirée concernant la dangerosité du
glyphosate. C’est en effet en 1985 que l’Organisation mondiale de la santé
(OMS) avait classé cette substance dans la catégorie des cancérogènes «
possibles ». Depuis, nombre d’études, d’expertises et de contre-expertises ont
été conduites, faisant balancer le glyphosate du statut de cancérogène «
possible » à celui de « probable » ; c’est-à-dire – seule chose qui intéresse
les industriels – de substance pouvant rester sur le marché à celle de produit
interdit.
Une énième expertise a ainsi
démarré il y a deux ans. C’est peu de dire que les industriels y ont pesé de
tout leur poids. Il y a un peu plus d’un mois, la presse révélait le scandale
des « Monsanto papers » : des dizaines de pages du rapport d’expertise étaient
constituées d’un simple copier-coller de publications de Monsanto, qui
s’opposaient bien sûr aux effets nocifs du glyphosate.
Finalement, le 27 novembre, la
balance a penché en faveur d’une continuation de l’autorisation pour encore
cinq ans dans les pays européens. Il fallait pour cela une majorité de 55 % des
États et représentant au moins 65 % de la population européenne. C’est chose
faite, d’autant que l’Allemagne a finalement voté pour l’autorisation alors
qu’on présageait son abstention. Certains y voient l’expression des luttes politiques
liées au résultat des récentes élections et d’autres, ou les mêmes, l’effet du
projet de rachat de Monsanto par la firme allemande Bayer.
La France, elle, a voté contre
l’autorisation. Alors, aujourd’hui, Macron joue les gros bras, jurant que tout
sera fait pour que l’utilisation du glyphosate soit interdite en France au plus
tard dans trois ans. Des bobards qui doivent faire sourire les industriels.
En attendant, si les effets
délétères du glyphosate resteront « possibles » ou « probables », les rentrées
financières, elles, continueront avec certitude.
Sophie
GARGAN (Lutte ouvrière n°2574)
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