Charlie
Hebdo – Médiapart : débat ou caricature ?
Depuis
que Charlie Hebdo a caricaturé dans son style habituel l’intellectuel
islamiste Tariq Ramadan, accusé de violences sexuelles, la polémique a enflé
dans les médias. Le journaliste de Mediapart Edwy Plenel a accusé Charlie
de complaisance envers l’islamophobie.
Puis le
débat s’est enrichi, ou plutôt s’est encore appauvri, quand Manuel Valls s’en
est mêlé. Celui qui, Premier ministre, chassait les Roms et jouait allègrement
à confondre musulman et terroriste, a vu là l’occasion de faire reparler de lui
en se livrant, au nom de la laïcité, à des tirades que ne renierait pas une Le
Pen.
Charlie
Hebdo, on le sait, s’est spécialisé dans l’anticléricalisme et,
comme il sied à son style bien particulier de journal satirique, il le fait à
coups de caricatures que l’on peut ou non apprécier, d’autant qu’elles tendent
aussi souvent à mettre dans le même sac les militants de l’obscurantisme, les
tartufes à la Tariq Ramadan, et la masse des fidèles des religions. On peut
trouver leur goût douteux ou surtout penser, comme c’est notre cas, que le
combat contre l’obscurantisme religieux mérite d’autres arguments. Mais, quoi
qu’il en soit, personne n’est obligé d’acheter Charlie.
Mais
surtout, comment la publication d’une caricature de Tariq Ramadan peut-elle
suffire à déclencher, dans une partie de ce qu’on appelle la gauche, une telle
levée de boucliers ? Le fait est que beaucoup en sont venus à voir dans toute
critique de la religion, et en particulier de l’islam, de l’islamophobie voire
du racisme. Mais c’est avoir bien du mépris pour les masses influencées par la
religion que refuser de discuter de leurs croyances et de ce que souvent elles
impliquent.
C’est
ainsi qu’on risque de se retrouver dans le camp d’un Tariq Ramadan.
Suffisamment beau parleur pour avoir décroché une chaire à Oxford en tant que
philosophe, et sans même parler des accusations de harcèlement qui le visent,
celui-ci continue de défendre la charia, le port du voile pour les femmes, la
lapidation de l’épouse adultère ou les exécutions pratiquées en Arabie
saoudite, tout cela au nom de la défense de la tradition religieuse...
Il y a
une lutte à mener pour changer la société, et elle est à mener sur tous les
plans. Cela inclut la lutte contre le racisme, contre l’obscurantisme
religieux, contre les violences sexuelles, contre toutes les discriminations et
les idées fausses que la société capitaliste secrète ou revivifie en
permanence, et bien sûr la lutte contre le capitalisme lui-même. Mais si cette
lutte se rabaisse au niveau d’une polémique entre un Manuel Valls et un Tariq
Ramadan et leurs alliés, elle est perdue d’avance.
P. S. (Lutte ouvrière n°2573)
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