samedi 7 septembre 2013

Retraites : le 10 septembre dans la rue à Paris. Rendez-vous pour nos amis d'Argenteuil. 12 heures 45 devant la salle Jean Vilar. Une longue histoire de reculs : un article de l'hebdomadaire Lutte Ouvrière de cette semaine (1 euro) en vente auprès des militants et à la librairie du Presse-papier

Retraites : vingt ans après, Hollande sur les pas de Balladur 

Il y a vingt ans, le 22 juillet 1993, le gouvernement dirigé par Édouard Balladur, Premier ministre dans un gouvernement de droite sous la présidence de Mitterrand, faisait adopter une réforme qui modifiait le mode de calcul des pensions des salariés ainsi que leur mode d'indexation.
     Le montant des pensions de la Sécurité sociale, au moment du départ en retraite, était désormais calculé sur la base d'un salaire de référence égal à la moyenne des salaires des vingt-cinq meilleures années, au lieu des dix meilleures. Cela revenait à faire entrer dans le calcul de la retraite de moins bonnes années, comme par exemple celles où le salarié avait été au chômage. Et pour établir ce salaire de référence, il fut décidé que les salaires des vingt-cinq meilleures années seraient revalorisés en fonction de l'évolution des prix et non plus de celle du salaire moyen.
     L'âge légal du départ à la retraite, fixé depuis 1983 à 60 ans, ne fut pas modifié. Mais un décret du 27 août 1993 allongea la durée de cotisation nécessaire pour obtenir une retraite complète. Elle passa de 150 trimestres (37,5 ans) à 160 (40 ans). C'était une façon supplémentaire de programmer une diminution des pensions. En 1993, à peine les trois quarts des hommes arrivant à 60 ans avaient leurs 37,5 années de cotisation, et pour les femmes c'était encore pire.
      La réforme entra en application le 1er juillet 1994 : c'était une bombe à retardement. Le passage de 150 à 160 trimestres de cotisation fut étalé sur dix ans, à raison d'un trimestre de cotisation supplémentaire par an, et le passage de dix ans à vingt-cinq ans pour le calcul du salaire de référence fut étalé sur quinze ans, à raison d'une année supplémentaire par an. Le changement du mode d'indexation des pensions en revanche fut appliqué immédiatement.
C'est le patronat qui creuse le déficit
     La réforme de Balladur - comme toutes celles qui ont suivi - s'inspirait du Livre blanc des retraites, commandé par le socialiste Michel Rocard en 1991. Alors Premier ministre de Mitterrand, celui-ci défendait la nécessité d'une réforme des retraites menacées d'explosion par le vieillissement de la population et le déséquilibre prévisible entre le nombre de retraités et celui des cotisants.
     Prétendre que le vieillissement de la population menaçait à terme le système de retraite était un mensonge.
     Si le financement des retraites était - et est aujourd'hui - menacé, ce n'est pas parce que, globalement, on vit plus longtemps. C'est parce qu'une part de plus en plus grande des richesses supplémentaires produites grâce aux gains de productivité a été et est accaparée par les patrons, non pour investir dans la production mais pour les redistribuer à leurs actionnaires sous forme de dividendes.
     Au-delà des justifications avancées, depuis le Livre blanc de Rocard, par tous les gouvernements successifs et aujourd'hui par Hollande, ces réformes, comme les réformes de l'assurance-maladie ou de l'assurance-chômage, reflètent avant tout l'offensive de la bourgeoisie capitaliste. Relayée par les gouvernements, elle vise à restaurer ses profits, à préserver et même à développer ses revenus, dans un contexte de marasme et de crise économiques, tout en réduisant grâce au chômage la masse salariale, les salaires, mais aussi les retraites et l'ensemble des prestations sociales.
     Pour combler le trou creusé dans le budget de la Sécurité sociale par la politique du patronat, ce furent les assurés sociaux, les travailleurs, les retraités, les chômeurs qui furent mis à contribution.
     Ce fut d'abord l'augmentation des cotisations. Entre 1974 et 1981, les taux de cotisation retraite des salariés firent plus que doubler alors que les cotisations patronales n'augmentaient que de 40 %.
    Au début des années 1980, face à une campagne du patronat - en particulier d'Yvon Gattaz, patron du CNPF, ancêtre du Medef actuel - sur le thème du coût du travail trop élevé, les gouvernements successifs, de gauche comme de droite, n'osèrent plus toucher aux cotisations salariales et patronales pour la retraite.
     En dix ans, les retraites ont baissé en moyenne de 10 %
     La réforme Balladur de 1993 inaugura les plans d'économies sur les retraites. D'après une étude de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV), dix ans après sa mise en place, cela avait déjà entraîné une baisse de la pension moyenne de l'ordre de 10 %. L'indexation de l'évolution des retraites versées sur les prix au lieu des salaires occasionna pour tous les retraités une perte sur leur pension d'environ 8 % sur dix ans, et devrait se traduire par une perte d'environ 20 % sur vingt-cinq ans.
    Cette première réforme des retraites n'était qu'un début. Depuis, sans compter la tentative avortée de Juppé en 1995 de réformer les retraites des fonctionnaires et les régimes spéciaux, les conditions exigées pour obtenir une retraite complète furent successivement durcies pour le secteur privé et, de plus en plus, pour le secteur public, en 2003, 2007, 2008 et 2010. On a ainsi abouti à la situation actuelle : l'âge légal de départ a été porté à 62 ans à compter du 1er juillet 2011 pour tous les régimes - y compris pour les fonctionnaires et les régimes spéciaux ; la durée de cotisation atteindra quarante et un ans et demi à l'horizon 2020. Aujourd'hui, Hollande et son gouvernement s'apprêtent à en rajouter avec les mêmes arguments, les mêmes objectifs que les gouvernements de Chirac et de Sarkozy.
                                                               Jean-Jacques LAMY

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