Hollande
: de déchéance en déchéance
Le Pen en avait rêvé, Sarkozy
l’avait promis, eh bien Hollande l’a fait ! En décidant d’inscrire dans la
Constitution la déchéance de la nationalité pour les binationaux nés en France
coupables d’actes de terrorisme comme il s’y était engagé lors de la réunion du
Congrès à Versailles, Hollande fait, en cette fin d’année, un calcul bassement
politicien.
Cette
mesure, marquée à droite, a toujours été dénoncée par la gauche comme une
violation du droit du sol et du principe d’égalité. Elle crée des Français de
seconde catégorie, ceux nés en France mais qui ont une seconde nationalité de
par leurs origines, qui auraient à « mériter » d’être Français, quand les
Français « de souche » n’ont eu qu’à se donner le mal de naître ici. Elle jette
la suspicion vis-à-vis des immigrés en entretenant l’amalgame entre eux et les
terroristes.
Tout
le monde en convient : la déchéance de la nationalité ne dissuadera aucun
terroriste. Elle est, sur le plan sécuritaire, complètement inefficace. Et
Hollande lui-même le dit, c’est un « symbole ».
Ce
serait, d’après Hollande, « le symbole de l’unité nationale » puisqu’un
gouvernement dit de gauche reprendrait à son compte une mesure de droite.
Hollande donne un coup de pied de l’âne à Sarkozy qui avait brandi la déchéance
de la nationalité en 2010 sans jamais la mettre en place, mais il parle «
d’unité nationale » ! C’est tout l’art de politiciens tels que Hollande que de
transformer une mesure et une manœuvre politicienne en vertu politique.
Hollande
cherche à se poser en père de la nation, en chef de l’État, au-dessus des
partis et loin des querelles partisanes. Pour couper l’herbe sous les pieds de
la droite et de l’extrême droite, il exploite au maximum la peur du terrorisme
et le filon sécuritaire. Lui qui demandait, il y a peu, d’être jugé sur ses
résultats en matière de chômage, a trouvé un fonds de commerce électoral jugé
plus rentable pour 2017.
Cette
déchéance de la nationalité contrarie plusieurs ministres et fâcherait quelques
dirigeants socialistes. Attention, des vagues seraient attendues au PS ! Mais
il suffit de voir comment Christiane Taubira s’accroche à son fauteuil de
ministre, alors qu’elle n’a jamais caché son hostilité à une telle mesure, pour
comprendre que ces vagues risquent vite de se perdre dans les sables des
ambitions personnelles.
C’est
pour la population et pour toute la société que les conséquences d’une telle
politique sont graves. Car il s’agit de toute une évolution.
Comme
le font remarquer certains notables du PS, le quinquennat a commencé par la
promesse du droit de vote aux étrangers aux élections locales, pour terminer
sur la déchéance de la nationalité. Autrement dit, le gouvernement tire toute
la vie politique à droite.
Et
tant pis si cela alimente la suspicion et la peur de l’étranger ! Tant pis si
cela conforte les amalgames et les racistes ! Tant pis si ces concessions à la
droite et à l’extrême droite renforcent ceux qui n’attendent qu’une occasion
pour s’en prendre physiquement à des immigrés, comme cela s’est produit à
Ajaccio ces derniers jours, avec des manifestations xénophobes insupportables !
En
accentuant les mesures sécuritaires, en lançant un débat sur la nationalité
dans un contexte de repli sur soi et de montée des idées racistes et
nationalistes, le gouvernement met de l’huile sur le feu.
En
son temps, Sarkozy avait fait la même chose en lançant un débat sur l’identité
nationale mais, à la différence de Hollande, il avait fini par rétropédaler
face à la zizanie qu’un tel débat créait dans les rangs de la droite.
Aujourd’hui,
c’est le gouvernement socialiste qui joue les pyromanes. Et cela n’empêchera ni
Hollande ni Valls de nous expliquer, la main sur le cœur, qu’ils sont résolus à
combattre le racisme et la xénophobie.
Ces
propos ne valent pas mieux que les promesses qu’il a faites sur le chômage, le
pouvoir d’achat et les impôts. Le gouvernement attaque le monde du travail
aussi bien sur le plan matériel que sur le plan des valeurs politiques.
Alors,
ce que nous espérons pour 2016, c’est que les travailleurs ne se laissent pas
entraîner dans cette déchéance morale. C’est qu’ils retrouvent le chemin des
luttes, ensemble, Français et immigrés.
C’est
qu’ils retrouvent la conscience de leur intérêt commun, celui d’avoir à
combattre les licencieurs, celui d’avoir à affronter la rapacité patronale,
pour inverser le cours des choses et faire en sorte que le rapport de force
redevienne favorable au monde du travail.