Bolivie :
la droite s’approprie la présidence
20 Novembre 2019
La démission d’Evo Morales et son
départ vers le Mexique ont entraîné une cascade de renoncements de ses alliés
aux postes politiques qui auraient pu assurer l’intérim. Une sénatrice très
conservatrice s’est empressée de remplir ce vide.
Jeanine Añez s’est proclamée
présidente devant un Parlement croupion, puisque les députés majoritaires du
parti de Morales, le MAS, l’avaient boycotté, ce à quoi le Tribunal
constitutionnel n’a rien trouvé à redire. Et, bien sûr, elle a été saluée par
l’armée, la droite et Washington.
La sénatrice est entrée dans le
palais présidentiel, la Bible à la main, en déclarant : « Dieu a
permis que la Bible entre à nouveau au palais. Notre force est Dieu, notre
pouvoir est Dieu », de quoi ravir la droite réactionnaire de toute
l’Amérique latine. C’est aussi une déclaration contre la Constitution laïque
mise en place par Morales.
Elle a redit qu’elle est là pour
préparer de nouvelles élections, mais elle n’est peut-être pas pressée que ces
élections aient lieu. Elle a d’ores et déjà insisté sur le fait que, si le MAS
peut présenter un candidat, ce ne peut être en aucun cas Morales.
Jeanine Añez prétend également
pacifier le pays. Mais son arrivée a plutôt attisé les feux. En effet elle est
connue pour des déclarations racistes dans le passé contre les Boliviens
d’origine indigène, y compris Morales. Cela n’a pas manqué de raviver la colère
des partisans du président sortant, qui refusent d’être présidés par une
raciste.
La droite et la bourgeoisie de la
région de Santa Cruz, dirigées par Fernando Camacho, a mis fin à ses
manifestations, mais la population favorable à Morales continue de manifester.
Les pancartes « Non au coup d’État » et les drapeaux indigènes y sont
nombreux. Le jour de l’autoproclamation, La Paz était bloquée, les magasins et
les écoles fermés, et la vie quotidienne tournait au ralenti. À Cochabamba, il
y a eu des affrontements violents avec la police et des appels à la guerre
civile. Les tensions sont donc bien loin d’être apaisées.
Le lendemain, des manifestants
venus de l’Altiplano ont commencé leur marche vers La Paz. Si les responsables
politiques du MAS font des déclarations dans le sens de l’apaisement, la base
du parti est consciente que la droite va tenter de détricoter les programmes
sociaux qui ont sensiblement amélioré les conditions d’existence des plus
démunis. Elle entend bien s’y opposer.
Jacques FONTENOY (Lutte ouvrière n°2677)