dimanche 13 août 2017

Made in France : étiquette et réalité...


Made in France ? Made in fric !

 
                   A d'autres...

En ces temps où le nationalisme cocardier a le vent en poupe, de nombreux consommateurs s'imaginent lutter contre le chômage ici, voire contre la surexploitation des travailleurs dans les pays pauvres, en achetant de préférence national. Des enquêtes d'opinion assurent même que certains seraient prêts à payer plus cher pour du « garanti français ».
Mais une ONG spécialisée dans la surveillance de l'alimentation s'est penchée sur l'appellation « Made in France » et la floraison des logos bleu blanc rouge – et elle révèle ce dont on pouvait se douter : rares sont les cornichons « conditionnés en France » à être éclos dans le pays ; et les fruits dont se composent les tartes « cuisinées en France » viennent des quatre coins du monde !
Et il y a des chances aussi que les drapeaux tricolores brandis dans les meetings, et de la droite, et de la gauche (même celle qui se dit insoumise) soient fabriqués en Extrême-Orient.
Qu’est-ce qu’ils nous feraient avaler !

Université, s'inscrire, un véritable sport semé d'obstacles


Universités : rafistoler et éliminer

S’inscrire en faculté continue à être un casse-tête. La filière des sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps) est particulièrement encombrée : on compte en effet 33 000 demandes pour 17 000 places.
Devant les protestations des parents, des élus locaux, des proviseurs de lycées, le gouvernement a proposé une aide d’urgence : il versera aux établissements 1 500 euros sur trois ans par inscrit supplémentaire. La faculté de Strasbourg a accepté et comptera 700 inscrits dans sa filière Staps, dont la capacité officielle est de 450 étudiants.
D’autres universités sont sollicitées et parfois hésitent. Même une aide financière de ce type ne règle pas les problèmes : celui de l’embauche d’enseignants qui, de toute façon, ne seront que des vacataires, ou celui de l’accès aux installations sportives en nombre limité. Et il est possible aussi que toutes les sommes promises n’arrivent pas à la filière en question. Dans d’autres circonstances ce type d’aide a servi en partie à combler les urgences du fonctionnement général des établissements.
Les universités débordent, et pas seulement dans la filière Staps. Beaucoup tirent sur le budget ne serait-ce que pour assurer le chauffage et l’entretien courant, sans parler évidemment du manque de locaux et de postes, alors que le nombre d’étudiants a augmenté.
Le gouvernement dénonce l’héritage laissé par les précédents gouvernements. Mais il utilise les mêmes ficelles et, surtout, il fait une campagne pour imposer l’obtention de pré-requis à l’entrée de l’université, une validation de connaissances diverses en plus de l’obtention du bac. C’est simplement un barrage supplémentaire, pour faire des économies et éliminer un certain nombre d’étudiants… avant même qu’ils commencent leurs études supérieures.

                                       Sylvie MARÉCHAL (Lutte ouvrière n°2558)

Révolution russe de 1917 : 20 et 21 avril 1917 : le premier heurt des ouvriers avec la contre-révolution


20 et 21 avril : le premier heurt des ouvriers avec la contre-révolution

À la mi-avril, deux mois après la révolution de Février 1917, commencent des manifestations contre la guerre après les déclarations du ministre libéral Milioukov en faveur de celle-ci et de la conquête de Constantinople par la Russie. Déjà, une fraction de la classe ouvrière, derrière le Parti bolchevik, envisage le renversement du gouvernement provisoire, tandis que la bourgeoisie et ses soutiens tentent de mobiliser leurs forces. Trotsky relate ainsi les événements du 20 avril (3 mai selon notre calendrier).
« Ce jour-là, la manifestation fut provoquée par le comité des bolcheviks de Petrograd. Malgré la contre-agitation des mencheviks et des socialistes-révolutionnaires, d’énormes masses d’ouvriers se dirigèrent vers le centre, venant des quartiers de Vyborg, et ensuite d’autres districts. Le comité exécutif envoya à la rencontre des manifestants des pacificateurs autorisés, avec, en tête, Tchkhéidzé [un des leaders mencheviks], Mais les ouvriers tenaient fermement à dire leur mot, et ils avaient quelque chose à dire. Un journaliste libéral bien connu décrivait, dans la Rietch, la manifestation des ouvriers sur la Nevsky : « En avant, environ une centaine d’hommes armés ; derrière eux, des rangs réguliers d’hommes et de femmes non armés, des milliers de personnes. Des chaînes vivantes sur les deux flancs. Des chants. Je fus frappé par l’expression des visages. Ces milliers d’individus n’avaient qu’une seule figure, extasiée, le visage monacal des premiers siècles du christianisme, irréductible, implacablement prêt aux meurtres, à l’inquisition et à la mort. » Le journaliste libéral avait regardé la révolution ouvrière dans les yeux et senti un instant sa résolution concentrée. (…) Ce jour-là, comme la veille, les manifestants ne s’en allaient pas renverser le gouvernement, bien que, certainement, leur majorité dût déjà sérieusement réfléchir à ce problème ».
En réponse, le régime mobilise ses propres troupes le 21 avril : « La Nevsky, artère principale de la bourgeoisie, se transforma en un immense meeting des cadets. Une manifestation considérable, à la tête de laquelle se trouvèrent les membres du comité central cadet, se dirigeait vers le palais Marie [siège du gouvernement]. Partout, l’on voyait des pancartes tout fraîchement sorties de l’atelier. « Confiance entière au gouvernement provisoire ! » « Vive Milioukov ! » Les ministres étaient aux anges : ils avaient trouvé leur « peuple » à eux, d’autant mieux visible que des émissaires du soviet s’épuisaient à disperser les meetings révolutionnaires, refoulant les manifestations d’ouvriers et de soldats du centre vers les faubourgs et dissuadant d’agir les casernes et les usines.
Sous couleur de défendre le gouvernement, avait lieu une première mobilisation franchement et largement déclarée des forces contre-révolutionnaires. Au centre de la ville apparurent des camions chargés d’officiers, de junkers, d’étudiants armés. Sortirent aussi les chevaliers de Saint-Georges. La jeunesse dorée organisa sur la Nevsky un tribunal public incriminant sur place les léninistes et les « espions allemands ». Il y eut des échauffourées et des victimes. La première collision sanglante, à ce que l’on a raconté, débuta par une tentative que firent des officiers pour arracher à des ouvriers un drapeau portant une inscription contre le gouvernement provisoire. On s’affrontait avec un acharnement toujours croissant, une fusillade s’ouvrit qui, dans l’après-midi, devint presque incessante. Personne ne savait exactement quels étaient ceux qui tiraient et dans quel but. Mais il restait déjà des victimes de cette fusillade désordonnée, causée en partie par la malfaisance, en partie par la panique (…)
Non, cette journée ne ressemblait en rien à une manifestation d’unité nationale. Deux mondes se dressaient l’un en face de l’autre. Les colonnes de patriotes, appelées dans la rue par le Parti cadet contre les ouvriers et les soldats, se composaient exclusivement des éléments bourgeois de la population, officiers, fonctionnaires, intellectuels. Deux torrents humains, l’un pour Constantinople, l’autre pour la paix, déferlaient de différentes parties de la ville. »

samedi 12 août 2017

Argenteuil, projet Héloïse, commerce : demain, une, voire deux "friches commerciales" à Argenteuil ?


Un très sombre avenir

 

5.3.4. Thème 4 : Impacts sur les commerces et le marché

Le commentaire de la commissaire enquêtrice :

« Le commissaire-enquêteur prend acte et comprend la position de la commune et de l’EPT et leur volonté de permettre une certaine dynamisation du commerce. Cependant, certains linéaires commerciaux du Centreville sont vides et le Centre Commercial Côté Seine semble lui aussi souffrir déjà d’un manque de clientèle. 

Contre-propositions 1 et 2 du Groupe Casino : Pour rappel, la CCI 92 et la CCI 95 invitent la commune et l’EPT à :  «   Respecter un équilibre commercial entre l'existant (centre-ville et centre commercial Côté Seine) et les futurs commerces qui seront Implantés dans cette zone, afin d'éviter un phénomène de vacance, pouvant affecter les commerces du centre-ville, et de voir une friche commerciale apparaître en cœur de ville ;   Définir une programmation commerciale complétant et enrichissant l'offre des linéaires commerciaux existants, en vue de capter de nouveaux flux de clients et d'éviter l'évasion commerciale vers d'autres polarités ;   Organiser une concertation entre les commerçants existants, la direction de Coté Seine et le promoteur/commercialisateur de cette future zone afin de répondre aux problématiques de tous les acteurs concernés. Aussi, la CCI du Val d'Oise se propose pour « accompagner cette démarche et évaluer les impacts économiques du projet sur les commerces d’Argenteuil. »
 Le commissaire-enquêteur ne peut que recommander à la commune ainsi qu’à l’EPT de veiller à la complémentarité des commerces entre l’existant et le projet, et d’accepter la proposition d’accompagnement des CCI 92 et CCI 95. »

 Confirmant ce que nous avions dit il y a quelques mois, le groupe Casino est intervenu lors de cette enquête. Avec ce projet Héloïse, la survie du centre commercial « Côté Seine » est posée. Casino qui y possède un établissement au second étage demandait que la superficie maximum de commerce de produits alimentaires dans le projet Héloïse soit limitée à 400 m², ce qui y excluait l’installation d’une grande surface concurrente. Sa contre-proposition a été rejetée ! Tout ce que nous disions sur l’installation d’une grande surface à Héloïse semble donc être confirmé. Oui, et nous pensons à tous les salariés non seulement de Casino-Côté Seine » mais aussi des boutiques qui y ont bien du mal à tenir, et aux habitants d’Argenteuil qui paieront demain la note d’une façon ou d’une autre, le risque est bien de créer « un phénomène de vacance, pouvant affecter les commerces du centre-ville, et de voir une friche commerciale apparaître en cœur de ville »

CNAV : retraites : oh secours !


Retraites : il ne faut pas être pressé


                              Photo : Jielbeaumadier sur Wikipédia
 
  

Les syndicats de la CNAV (caisse nationale d’assurance vieillesse) dénoncent les retards qui s’accumulent dans le traitement des demandes d’ouverture des droits à la retraite. En Île-de-France, près de 20 000 dossiers seraient en suspens.

« La direction avance ''la retraite en ligne'' comme une solution, on a fermé tous nos points d’accueil. Maintenant l’accueil se fait uniquement sur rendez-vous et l’assuré éprouve beaucoup de difficultés pour joindre un technicien dans des délais raisonnables », explique un délégué CGT, dénonçant la baisse du nombre d’agents.
L’âge du départ en retraite ne cesse de reculer, le montant des pensions stagne et même régresse, amputé par les nouvelles mesures du gouvernement ; et, pour couronner le tout, les coupes dans les budgets de services indispensables comme la CNAV entraînent des retards pour l’ouverture des droits à la retraite.
En activité ou non, les travailleurs sont la cible des mêmes attaques !
 

Tous ensembles, actifs, chômeurs et retraités, le 12 septembre !

Deliveroo : pédaler vers le XIXème siècle


Mobilisation des livreurs Deliveroo

                                                               

                                                                     Photo Flickr Franklin Heijnen
Après Bordeaux et Lyon, les livreurs à vélo Deliveroo manifestent à Paris vendredi 11 août. Ils protestent contre la rémunération à la course que l’entreprise veut leur imposer à tous, soit 5 euros par course ou 5,75 à Paris en raison du coût plus élevé de la vie.

A ce tarif, sans aucun fixe garanti, ils doivent passer leur vie sur leur vélo, en particulier le soir où les commandes sont plus nombreuses, sans aucune garantie d’atteindre ne serait-ce que le smic. Ce paiement à la tâche se rajoute à la précarité du statut d’auto-entrepreneur de ces jeunes travailleurs, qui rime avec absence de congés payés ou d’arrêts maladie payés.

Pédaler plus pour gagner moins, c’est non !

Photo : flickr - Franklin Heijnen

Lectures d'été. Duong Thu Huong, Au-delà des illusions.Mary Ann Schaffer et Annie Barrows, le cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates


Un temps pour dévorer les livres…

La lecture permet de sortir du présent, de ses lieux, des situations habituelles. Il me manque quelque chose durant l’année les jours où je ne lis guère. Alors, pendant les vacances, voilà que je rattrape les lectures perdues. Livres achetées à la fête de Lutte ouvrière, au Salon « sous les couvertures » ou tout au long de l’année au Presse-papier, voilà que les tas de livres peuvent enfin être dévorées…

Deux livres pour vous :
 
 

Duong Thu Huong, Au-delà des illusions, Picquier poche

C’est un petit livre grave et profond à la manière d’un roman russe. Sauf que là, nous sommes dans la région d’Hanoï, dans les années 1980. Une société marquée par les difficultés de la vie et où les individus sont aussi divers qu’ici, au-delà des stéréotypes que l’on imagine, si l’on a des préjugés sur la réalité du Vietnam et sur un réalisme socialiste qui serait à la mode de ce pays. Donc, là-bas, comme ici, il y ceux qui sont prêts à tout pour réussir, ceux qui sont hors de la société, ceux qui ne se savent pas trop comment s’y prendre pour s’opposer aux forces de la société qui les entraînent, et ceux que l’on appelle les « êtres entiers » qui, comme Linh, n’acceptent pas les compromissions. Et il y a l’amour… et les bonnes odeurs de la cuisine vietnamienne qui tout au long du roman titillent avec bonheur les narines du lecteur.

 


Mary Ann Schaffer et Annie Barrows, le cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates, 10-18

 
Abandonnons le champ du grave pour nous faire plus léger, et nous laisser emporter par le souffle de ce roman qui va nous faire passer plusieurs heures d’heureuse lecture.
         Le grave ne nous quittera pas complètement, mais il est diminué par l’air marin qui baigne l’ensemble de ces pages. Nous sommes en 1946, si peu de temps après la fin d’une guerre qui a tellement brutalisé durant cinq ans la planète. Le cœur du roman est à Guernesey, cette île dite anglo-normande qui a été occupée dès 1940.
         Et puis, il y a la littérature. Pas la peine d’être docte, diplômé, ou intellectuel pour être entraînée par l’amour de la lecture, ou par le livre tout simplement, ou par le simple fait de se réunir autour de cet objet merveilleux, mais surtout en très bonne compagnie fraternelle…
         Et puis, je vous prie de m’excuser de me répéter, il y a encore l’amour…

Révolution russe de 1917 (8). Les débuts des "jounées d'avril"


Le début des « journées d’avril »

Dès la mi-avril 1917, il apparaît de plus en plus nettement aux yeux des ouvriers que le gouvernement provisoire, qui s’est installé après la révolution de Février, n’entend pas rompre l’alliance militaire avec la France et la Grande-Bretagne et avec la guerre elle-même. Les jusqu’au-boutistes soutiennent l’effort de guerre et son porte-parole au gouvernement, le libéral Milioukov, comme le relate Trotsky dans son Histoire de la Révolution russe.
« Le 17 avril, à Petrograd, eut lieu — vision de cauchemar — une manifestation patriotique d’invalides : une immense foule de blessés, sortis des hôpitaux de la capitale, amputés des jambes, des bras, enveloppés de pansements, s’avançait vers le palais de Tauride. Ceux qui ne pouvaient marcher étaient transportés sur des autocamions. On lisait sur les drapeaux : “La guerre jusqu’au bout”. C’était la manifestation de désespoir de débris humains de la guerre impérialiste qui voulaient que la révolution ne reconnût pas absurdes leurs sacrifices. Mais, derrière les manifestants, se tenait le parti cadet, plus précisément Milioukov, qui se préparait à frapper le lendemain un grand coup. »
Le lendemain, paraît en effet une note du ministre des Affaires étrangères réaffirmant les buts de guerre du tsarisme, qui fait, selon l’expression de Lénine, « l’effet d’une bombe ». Trotsky fait le récit de la mobilisation immédiate des masses ouvrières et de la troupe.
« Les bolcheviks, parmi les troupes et dans les usines, déployèrent une énergique activité. À la revendication “Chassez Milioukov” qui était une sorte de programme minimum du mouvement, ils ajoutèrent des appels placardés contre le gouvernement provisoire dans son ensemble et, au surplus, les éléments divers comprenaient cela de différentes façons : les uns comme un mot d’ordre de propagande, les autres comme la tâche du jour même. Lancé dans la rue par les soldats et les matelots en armes, le mot d’ordre “À bas le gouvernement provisoire !” introduisait fatalement dans la manifestation un courant insurrectionnel. De considérables groupes d’ouvriers et de soldats étaient assez disposés à faire sauter sur l’heure le gouvernement provisoire. (…) Une armée de vingt-cinq à trente mille hommes, descendus dans la rue pour combattre ceux qui prolongeaient la guerre, était parfaitement suffisante pour renverser un gouvernement même plus solide que celui à la tête duquel se trouvait le prince Lvov, Mais les manifestants ne s’assignaient pas ce but. Ils ne voulaient en somme que montrer un poing menaçant sous la fenêtre, afin que ces messieurs de là-haut cessassent de se faire les dents avec leur Constantinople et s’occupassent comme il fallait de la question de la paix. De cette façon, les soldats comptaient aider Kérenski et Tsérételli [respectivement ministre socialiste du gouvernement et un des dirigeants socialistes du soviet de Petrograd] contre Milioukov.
À la séance gouvernementale se présenta le général Kornilov, qui donna des nouvelles des manifestations armées à ce moment en cours et déclara qu’en qualité de commandant des troupes de la région militaire de Petrograd, il disposait de forces suffisantes pour écraser la sédition à main armée : pour marcher, il ne lui fallait qu’un ordre.
Présent par hasard à la séance du gouvernement, Koltchak raconta plus tard, au cours du procès qui précéda son exécution, que le prince Lvov et Kérenski s’étaient prononcés contre une tentative de répression militaire à l’égard des manifestants. Milioukov ne s’était pas exprimé nettement, mais avait résumé la situation en ce sens que messieurs les ministres pouvaient, bien entendu, raisonner tant qu’ils voudraient, ce qui ne les empêcherait pas d’aller loger en prison. Il était hors de doute que Kornilov agissait de connivence avec le centre cadet.
Les leaders conciliateurs réussirent sans peine à persuader les soldats manifestants de quitter la place du palais Marie [siège du gouvernement] et même à leur faire réintégrer les casernes.
L’émotion soulevée en ville ne rentrait cependant point dans ses bords. Des foules s’assemblaient, les meetings continuaient, on discutait aux carrefours, dans les tramways l’on se partageait en partisans et adversaires de Milioukov. »