Barricade de la Chaussée-Ménilmontant, 18 mars 1871
Comme vous le savez, nous n’avons pas pu tenir le Cercle Léon Trotsky qui devait aborder le 150ème anniversaire de la Commune de Paris. Le texte de cet exposé intitulé « 150 ans après, l’actualité de la Commune de Paris de 1871 » est néanmoins disponible sur notre site lutte-ouvrière.org. Nous vous le proposerons jour après jour en « feuilleton » le présent blog « lo argenteuil »
Sommaire
- Marx et la Commune
- Aux origines de la Commune
- La révolution de 1848
- Les transformations du second Empire
- Le prolétariat se développe et s’organise
- Socialistes, blanquistes, proudhoniens
- L’Association internationale des travailleurs
- De la guerre contre la Prusse à la proclamation de la République
- Du 4 septembre 1870 au 18 mars 1871 : La République bourgeoise
- Le gouvernement de la Défense nationale
- La Garde nationale : le prolétariat en armes
- Agitation politique à Paris et en province
- L’Assemblée des monarchistes contre Paris
- Le Comité central de la Garde nationale, embryon de pouvoir ouvrier ?
- Le 18 mars : le pouvoir aux mains des Parisiens
- La Commune : première ébauche d’un État ouvrier
- Le Comité central se met en retrait
- Fallait-il marcher sur Versailles ?
- Les élus de la Commune
- Le rôle des femmes dans la Commune
- Travailleurs de tous les pays, unissons-nous !
- Démocratie prolétarienne contre démocratie bourgeoise
- Les répercussions de la Commune en province
- La première attaque des versaillais et le décret sur les otages
- L’œuvre de la Commune
- Des mesures pour les travailleurs et pour reprendre en main la production
- Contre la misère : remise des échéances, le mont-de-piété, l’assistance publique
- Égalité et éducation pour tous !
- La Banque de France et le respect de la légalité
- La Commune, devenue symbole de la lutte des classes entre le prolétariat et la bourgeoisie
Marx et la Commune
Il y a cent cinquante ans, la Commune de Paris incarna le temps de sa courte existence les espoirs du monde ouvrier. Nous tenons à célébrer sa mémoire en rappelant les leçons qu’en ont tirées Marx et Engels et, après eux, Lénine et Trotsky.
C’est un événement fondamental du point de vue du mouvement ouvrier, parce que pour la première fois dans l’histoire, pendant deux mois, de mars à mai 1871, le prolétariat a exercé le pouvoir à Paris, qui comptait alors près de deux millions d’habitants.
Marx y vit immédiatement une expérience historique d’une portée immense, un pas réel considérable dans la lutte de classe du prolétariat, « bien plus important, ajoutait Lénine, que des centaines de programmes et de raisonnements ». Bien qu’elle ait été réprimée impitoyablement, la Commune a été un jalon dans l’histoire du mouvement ouvrier, qu’elle a fécondé en lui montrant le chemin de la révolution sociale. Le Manifeste communiste, écrit en 1848, avait déjà démontré théoriquement la nécessité de la dictature du prolétariat. Mais Marx et Engels n’avaient pas cherché à préciser quelle forme concrète prendrait le pouvoir des travailleurs. Leur méthode, scientifique, matérialiste, s’appuyait sur l’expérience réelle des luttes de classes du passé comme sur celle du prolétariat qui se déroulait sous leurs yeux. La Commune de Paris constitua de ce point de vue une avancée immense, qui leur permit de préciser leurs idées sur l’État ouvrier.
La Commune vit le jour alors que la IIIe République avait été proclamée quelques mois plus tôt en France, sur les ruines de l’Empire de Napoléon III. La République n’éveillait pas les mêmes sentiments parmi les prolétaires et dans la bourgeoisie. Pour les prolétaires, elle devait être sociale, égalitaire, elle était censée défendre le peuple. Mais, pour les bourgeois qui s’étaient emparés du pouvoir, il était seulement question de préserver les intérêts des possédants et de faire taire les espoirs que la chute de Napoléon avait suscités dans les classes populaires. C’est cet antagonisme des classes qui conduisit à une rupture entre le gouvernement bourgeois et le prolétariat, à leur affrontement et à la naissance de la Commune.
Le prolétariat parisien fut presque le premier surpris de se retrouver avec le pouvoir entre les mains. Mais il montra qu’il était capable de se passer de la grande bourgeoisie et de son État. Aussitôt élue, la Commune entreprit des réformes dans bien des domaines : la réorganisation de l’administration et des services publics, le travail, l’éducation, le logement, la place de la religion et celle des femmes, etc. En deux mois d’existence, elle n’eut pas le temps d’aller au bout de ses projets, car elle dut se défendre contre les troupes envoyées par le gouvernement bourgeois pour écraser ce qu’il considérait et présentait comme une entreprise « criminelle ». La lutte pour la survie prit le dessus sur toutes ses autres tâches, mais on ne peut qu’être impressionné par tout ce que la Commune entreprit, même si peu de mesures dépassèrent le stade de l’ébauche. Pour la première fois, un gouvernement issu du prolétariat n’agissait plus dans l’intérêt de la minorité de privilégiés qui dominait la société, mais dans l’intérêt de la majorité de la population. C’était là une véritable révolution !
Marx était à Londres lorsque la Commune fut proclamée. Militant au sein de l’Association internationale des travailleurs, il s’efforçait de lui donner un programme révolutionnaire conséquent. C’était la première organisation internationale regroupant des socialistes de différentes tendances et de plusieurs pays dans un combat commun. Apprenant les événements parisiens, il salua l’héroïsme des communards « montant à l’assaut du ciel ». Selon lui, la principale œuvre de la Commune était son existence elle-même. « Son véritable secret, écrivait-il, le voici : c’était essentiellement un gouvernement de la classe ouvrière, le résultat de la lutte de la classe des producteurs contre la classe des appropriateurs, la forme politique enfin trouvée qui permettait de réaliser l’émancipation économique du Travail. »
Cependant, la Commune s’acheva
prématurément, violemment réprimée par la bourgeoisie. Elle fut définitivement
écrasée par l’armée en quelques jours, massacrée pendant la Semaine sanglante.
Mais certaines défaites ne sont pas vaines et l’héroïsme du prolétariat
parisien, luttant jusqu’au bout, a contribué à sa gloire. Un mois plus tôt,
voyant venir le danger, Marx avait écrit : « L’insurrection parisienne,
même si elle vient à être réduite par les loups, les cochons et les chiens de
la vieille société, est le plus glorieux exploit de notre parti depuis
l’insurrection parisienne de Juin [1848]. »
(Demain, Aux origines de la Commune, La révolution de 1848)
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