Accord de
performance collective : refuser le chantage à l’emploi
08
Juillet 2020
L’épidémie
de coronavirus et ses conséquences sanitaires et économiques ont donné au
patronat un nouveau prétexte pour faire pression sur les salariés. En plus des
vols de congés, de l’allongement des journées de travail et des arnaques au
chômage partiel et au télétravail pratiquées par les patrons petits et grands
de façon instinctive, il existe une méthode scientifique et légale de procéder
: l’accord de performance collective (APC).
Cette
disposition, une modification du Code du travail adoptée au début du règne de
Macron, permet d’imposer pour un temps prétendument limité une baisse des
salaires et une modification des horaires de travail. Cette dégradation des
conditions de vie des travailleurs est évidemment présentée comme nécessaire
pour passer un cap difficile.
L’autre
solution, disent les patrons la main sur le cœur, consisterait en des
licenciements voire une fermeture pure et simple de l’entreprise. Lorsque
l’accord est signé, et il suffit pour cela de trouver quelques syndicalistes
complaisants, il a force de loi. Les travailleurs ne peuvent pas refuser de s’y
plier, sous peine de licenciement !
Le
patronat, les ministres qui transforment ses désirs en textes de loi et le
chœur médiatique qui applaudit béatement, présentent les APC comme des accords
entre gens de bon sens, acceptant librement des sacrifices pour se sortir
ensemble d’un mauvais pas. Certains patrons ne vont-ils pas jusqu’à diminuer un
peu leurs gains voire même jusqu’à différer le versement des dividendes aux
actionnaires ? Ils ne vont pourtant jamais jusqu’à ouvrir leurs livres de
comptes et surtout pas jusqu’à révéler le montant des fortunes des
propriétaires.
Les APC
sont des marchés de dupes. Rien en fait ne garantit que les emplois seront
conservés.
La
liste est longue des entreprises où les salariés ont été contraints aux
sacrifices et ont fini par se retrouver au bureau de chômage, depuis
Continental à Compiègne jusqu’à Michelin à La Roche-sur-Yon. Et si l’entreprise
continue à tourner, rien ne garantit non plus le retour aux anciennes
conditions de travail et de salaire. Les ouvriers de Smart, en Moselle, avaient
été contraints de travailler 39 heures payées 37. Non seulement personne ne
leur a jamais parlé de revenir à 37, mais, aujourd’hui, le patron cherche un
repreneur pour l’usine.
Les APC
ne concernent pas des cafetiers de quartiers ruinés par le confinement où des
patrons de campings attendant l’estivant, mais de grandes entreprises
multinationales et multimilliardaires, Ryanair, Derichebourg, Valéo… Ce sont
ces entreprises, leurs propriétaires en fait, qui font les lois, indiquent la
tendance et orchestrent la lutte de la classe capitaliste pour défendre ses
profits. Pour eux la réduction des salaires sous menace de licenciement,
longtemps interdite par le Code du travail, est désormais à l’ordre du jour.
Il y a
150 ans, le patron postait son contremaître à l’entrée de la filature pour
annoncer « à partir d’aujourd’hui, ce n’est plus trois francs, mais deux.
Et si tu n’es pas content, il y en a d’autres pour prendre ta place ». Le
patronat d’aujourd’hui et son personnel politique n’ont fait qu’enrober la
phrase du miel hypocrite d’un prétendu dialogue social.
Paul
GALOIS (Lutte ouvrière n°2710)
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